> L'INTELLIGENCE DE L'UNIVERS, de Dominique Casterman. — L’oeuvre de Dominique Casterman est un essai de synthèse épistémologique réalisée par-delà l’incohérence apparente des nombreux savoirs analytiques que présentent aujourd’hui les sciences expérimentales et humaines, et les connaissances anthropologiques des traditions religieuses et ésotériques. Elle est aussi, avant tout, le témoignage d’un esprit indépendant attisé par le pressentiment que la nature du Réel, échappant aux réflexes conditionnés de la pensée discursive, préexiste en l’humain, en son Moi essentiel sollicité dès la plus tendre enfance par son propre mystère...
« ...très précocement dans ma vie, j’ai été frappé, intrigué, déconcerté et aussi, au même degré, fasciné, émerveillé, par la présence, en apparence banale, de la matière, de la vie, de la conscience et aussi de l’univers, cette immensité cosmique dans laquelle nous baignons et au sein de laquelle nous sommes issus. Intrigue et émerveillement sont probablement les éléments qui me poussent irrésistiblement à chercher le sens de notre présence en ce monde. »
Ces paroles, auxquelles tout lecteur ne manquera pas d’adhérer fraternellement, y reconnaissant ses propres instants d’intensité existentielle, nous invitent dès l’abord à cheminer en compagnie de l’auteur vers d’insoupçonnables découvertes : celles qui renvoient l’investigateur spirituel en Lui-même, allégé des réponses stéréotypées qu’entretient tyranniquement son intellect habituellement identifié à ses rêves alternativement idylliques ou cauchemardesques.
« Toute réflexion métaphysique, toute recherche ayant pour objet la connaissance de soi est fondée sur l’hypothèse, sur l’espoir (n’ayons pas peur d’être honnêtes avec nous-mêmes), que l’homme aurait la possibilité de sentir intuitivement l’évidence de certaines vérités qui ne se prêtent à aucune image perceptible, à aucune représentation. Mais l’idée intuitive n’est admissible et partageable qu’entre des individus qui vivent la même intuition non verbale du réel. Cette conviction intérieure est parfaitement irrationnelle, elle ne saurait et n’a pas à être prouvée, pas plus quelle ne pourrait et n’a pas à être niée. »
Revigorés devant la tâche titanesque qui nous incombe (poursuivre notre quête jusqu’à en perdre, par un dépouillement salvateur, toute image ou toute représentation mentales), nous accostons avec la fougueuse espérance communicative de Dominique Casterman, par un dévoilement abrupt et impromptu, aux rives du Réel dont le siège insondable est la Conscience éveillée à Elle-même. La difficulté d’élaborer des concepts permettant d’en rendre compte se mue en “docte ignorance” selon les termes judicieux de Nicolas de Cuse. C’est en effet sur cette terra incognita, ce no-man’s-land : Shunyata pour les bouddhistes, que germera puis s’épanouira, en l’individu, la compréhension expérientielle de l’Intelligence de l’Univers. Chez l'auteur : D. Casterman, 1991
—3e millénaire, (20), Été 1991