Raton-Liseur's 2022 reading log (Part 3)

Dies ist die Fortführung des Themas Raton-Liseur's 2022 reading log (Part 2).

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Raton-Liseur's 2022 reading log (Part 3)

1raton-liseur
Bearbeitet: Sept. 14, 2022, 1:32 pm

Time to open my third and last thread for 2022. Time flies, books as well!

Some information to be found in my first 2022 thread
Some memorable reads from 2021
Reading aspirations for 2022
Literary culture lists

2raton-liseur
Bearbeitet: Sept. 14, 2022, 2:58 pm

Some memorable reads from earlier in 2022
So far, I think the main highlights of my readings this year are graphic stories. I therefore decided to split my list of memorable reads by (broad) genres in order to better do justice to more books that are great in some many different ways.

Fiction:


Tout s’effondre de Chinua Achebe, traduit de l'anglais (Nigeria) par Pierre Girard
Milwaukee blues de Louis-Philippe Dalembert
Knock, ou le triomphe de la médecine de Jules Romains
Les Invisibles de Roy Jacobsen, traduit du norvégien (Norvège) par Alain Gnaedig
Seul le grenadier de Sinan Antoon, traduit de l'arabe (Irak) par Leyla Mansour
Nord et Sud d'Elizabeth Gaskell, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Françoise du Sorbier
La Sterne rouge d'Antonythasan Jesuthasan, traduit du tamoul (Sri Lanka) par Léticia Ibanez
La Promesse de Damon Galgut, traduit de l'anglais (Afrique du Sud) par Hélène Papot
Les Abeilles grises d’Andreï Kourkov, traduit du russe (Ukraine) par Paul Lequesne

Non fiction:


The Good girls : un meurtre ordinaire de Sonia Faleiro, traduit de l'anglais (Inde) par Nathalie Peronny
Une datcha dans le Golfe d'Emilio Sánchez Mediavilla, traduit de l’espagnol (Espagne) par Myriam Chirousse
Matelot de caïque : d'Yport à Terre-Neuve 1958-1962 de Maurice Gehan
Les Otages : Contre-histoire d'un butin colonial de Taina Tervonen

Graphic stories (fiction or non fiction):


Un matin de ce printemps-là de Park Kun-woong, traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-hee et Catherine Biros
Ce n’est pas toi que j’attendais de Fabien Toulmé
Magasin général, intégrale de Régis Loisel et Jean-Louis Tripp
Gaza 1956 : En marge de l'histoire de Joe Sacco, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Sidonie Van den Dries
Le Photographe, intégrale d'Emmanuel Guibert (dessin) et Didier Lefèvre (scénario)
Soixante printemps en hiver de Aimée de Jongh (dessin) et Ingrid Chabbert (scénario)
Perpendiculaire au soleil de Valentine Cuny-Le Callet

3raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 27, 2022, 5:10 am

Reading commitments
My current reading commitments are linked to:
the Asian book challenge organised by PaulCranswick in the 75 Books Challenge for 2022.
I use this challenge as an opportunity to read long-awaiting books directly from my bookshelves.
September - Authors from Korea
October - Authors from Indo-China & other countries neighbouring China
This month challenge includes books from Mongolia, Nepal, Burma, Bhutan, Vietnam, Cambodia, Laos and Thailand
November - Authors from the Malay Archipelago
This will include books from the following countries: Malaysia, Singapore, Indonesia and Philippines.
December - Authors from the Asian Diaspora

the Victorian tavern group reads I want to participate to (or lurk on, to be fair…):
L'Importance d'être constant d'Oscar Wilde, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Angeline Tomi

the Geeks who love the Classics group reads I want to participate to (or, again, to lurk on...):
(Q4 read-along) La Mort d'Ivan Illitch de Léon Tolstoï, traduit du russe (Russie) par Michel-R. Hofmann

two personal reading commitments
Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire : Les Rougon-Macquart d’Emile Zola
(relecture) Tome 2 : La Curée
(relecture) Tome 3 : Le Ventre de Paris

Luis Sepúlveda in extenso
(relecture) Un nom de toréro
Le Neveu d’Amérique

4raton-liseur
Bearbeitet: Sept. 21, 2022, 1:47 pm

Lists of fairly recently acquired books that I would like to read in 2022
Books bought in 2020 or 2021
Harlem Quartet de James Baldwin, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Christiane Besse
Les Cacatoès de Patrick White, traduit de l'anglais (Australie) par Nathalie Pavec et Jean-Marc Victor
De Purs Hommes de Mohamed Mbougar Sarr
Paradis d'Abdulrazak Gurnah, traduit de l'anglais (Tanzanie) par Anne-Cécile Padoux
Underground Railroad de Colson Whitehead, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Serge Chauvin
La Septième Croix d’Anna Seghers, traduit de l’Allemand (Allemagne) par Françoise Toraille
Mère à Mère de Sindiwe Magona, traduit de l'anglais (Afrique du Sud) par Sarah Davis Cordova
Kintu de Jennifer Nansubuga Makumbi, traduit de l'anglais (Ouganda) par Céline Schwaller

Books bought earlier in 2022
Puissions-nous vivre longtemps d'Imbolo Mbue, traduit de l'anglais (Cameroun) par Catherine Gibert
Les Nuits de la peste d'Orhan Pamuk, traduit du turc (Turquie) par Julien Lapeyre de Cabanes
Bonsoir Marie-Josèphe de Jean David
Pélagie-la-Charrette d’Antonine Maillet
Le Colonel de Mahmoud Dowlatabadi, traduit du persan (Iran) by Christophe Balaÿ
Jakob le menteur de Jurek Becker, traduit de l’allemand (RDA) par Claude Sebisch
La Garde blanche de Mikhaïl Boulgakov, traduit du russe (URSS) par Claude Ligny
Lais de Marie de France, traduit de l’ancien français par Philippe Walter
Une si longue lettre de Mariama Bâ

5raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 11, 2022, 4:54 am

Books read in September 2022


79. 55. (33) Les Gens de la rue des rêves de Miyamóto Teru, traduit du japonais (Japon) par Philippe Deniau
80. 56. (34) L'hiver, cette année-là de Yi Munyol, traduit du coréen (Corée du Sud) par Ch’oe Yun et Patrick Maurus
81. 57. (-) Hors-la-loi d'Anna North, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean Esch
82. 58. (-) Il était un petit navire de Martine Pouchain
83. 59. (-) Nous, les Allemands d'Alexander Starritt, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Diane Meur
84. -. (-) Le Pirate et l’apothicaire de Robert Louis Stevenson, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Marc Porée et illustré par Henning Wagenbreth
85. 60. (35) Des Amis de Baek Nam-Ryong, traduit du coréen (République démocratique populaire de Corée) par Patrick Maurus et Yang Jung-Hee
86. 61. (-) Journal de guerre de Mario Vargas Llosa, traduit de l'espagnol (Pérou) par Annie Vignal
87. -. (-) Marre du rose de Nathalie Hense, illustré par Ilya Green
88. 62. (-) La Volonté des femmes de Mary Eleanor Wilkins Freeman, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pauline Tardieu-Collinet
89. 63. (-) Chouette de Claire Oshetsky, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Karine Lalechère

6raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 1, 2022, 1:45 pm

Books read in October 2022


90. 64. (-) Faire bientôt éclater la terre de Karl Marlantes, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Suzy Borello
91. 65. (-) Le Faire ou mourir de Claire-Lise Marguier
92. 66. (-) L'Importance d'être constant, une comédie frivole pour gens sérieux d'Oscar Wilde, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Angeline Tomi
93. -. (-) Légendes de la Garde de David Petersen, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Marion Roman, Corinne Daniellot et Isabelle Troin
94. -. (36) Musique verte de Christophe Léon
95. 67. (-) Ô pays, mon beau peuple ! d'Ousmane Sembène
96. 68. (37) La Pagode sans ombre de Hyun Jin-Geon, traduit du coréen (Corée) par Mi-Kyung Friedli et David Reichenbach
97. 69. (-) La Lune de l'âpre neige de Waubgeshig Rice, traduit de l'anglais (Canada) par Antoine Chainas
98. 70. (38) Vigdis la farouche de Sigrid Undset, traduit du norvégien (Norvège) par M. Metzger
99. -. (-) Shadow Life d'Ann Xu (dessin) et Hiromi Goto (scénario), traduit de l'anglais (Canada) par Marie-Paule Noël
100. -. (-) Automnal de Daniel Kraus (scénario) et Chris Shehan (dessin), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Philippe Touboul

7raton-liseur
Bearbeitet: Jan. 7, 2023, 11:10 am

Books read in November 2022


101. -. (-) Le Petit Frère de JeanLouis Tripp
102. 71. (39) Axiomatique de Greg Egan, traduit de l'anglais (Australie) par Sylvie Denis, Francis Lustman, Quarante-Deux et Francis Valéry
103. -. (-) Bleu Pétrole de Gwénola Morizur (scénario) et Fanny Montgermont (dessin)
104. -. (-) Nouvelles histoires pressées de Bernard Friot
105. 72. (40) The Wonderful wizard of Oz de Lyman Frank Baum
106. 73. (41) Po-on de Francisco Sionil José, traduit de l’anglais (Philippines) par Amina Saïd
107. -. (-) Moon River de Fabcaro
108. 74. (42) La Mort d'Ivan Illitch, suivi de Maître et serviteur et Trois morts de Léon Tolstoï, traduit du russe (Russie) par Michel-R. Hofmann, Boris de Schloezer et J.W. Bienstock
109. -. (-) Le peuple du chemin de Marion Achard
110. 75. (43) Les Bohémiens des vendanges de John Steinbeck, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean-François Chaix
111. 76. (-) Candide, ou l'optimisme de Voltaire
112. 77. (-) Une Vie de Guy de Maupassant
113. 78. (-) Dernière Manche de Catherine Dabadie
114. 79. (-) Un Cœur simple de Gustave Flaubert

8raton-liseur
Bearbeitet: Jan. 7, 2023, 1:17 pm

Books read in December 2022


115. 80. (-) Sables noirs d'Hervé Giraud
116. -. (-) Et à la fin, ils meurent : la sale vérité sur les contes de fées de Lou Lubie
117. -. (-) Chaussette de Loïc Clément (scénario) et Anne Montel (dessin)
118. 81. (-) Ce genre de petites choses de Claire Keegan, traduit de l’anglais (Irlande) par Jacqueline Odin
119. -. (-) Méridien d’Arnaud Le Gouëfflec (scénario) et Briac (dessin)
120. -. (-) Walk me to the corner d'Anneli Furmark, traduit du suédois (Suède) par Florence Sisak
121. 82. (44) One Amazing Thing de Chitra Banerjee Divakaruni
122. 83. (-) Enfin libre : Grandir quand tout s'écroule de Lea Ypi, traduit de l'anglais (Albanie) par Emmanuelle Aronson et Philippe Aronson
123. 84. (-) Abondance de Jakob Guanzon, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Charles Bonnot
124. 85. (45) La Fin du chant de Galsan Tschinag, traduit de l’allemand (Mongolie) par Dominique Petit et Françoise Toraille
125. -. (-) Douce France de Lionel Chouin (dessin) et Simon Rochepeau (scénario)
126. -. (-) Les Portugais d’Olivier Afonso (scénario) et Chico (dessin)
127. -. (-) Tananarive de Mark Eacersall (scénario) et Sylvain Vallée (dessin)
128. 86. (46) Voler ! de Kim Jaeyeon, illustré par Kim Sehyeon et traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel
129. -. (-) Nettoyage à sec de Joris Mertens
130. -. (-) Les grands cerfs de Gaétan Nocq, d'après le roman de Claudie Hunzinger

Note: See post 9 in my first 2022 thread for explanations on the numbering of reviews.

9raton-liseur
Bearbeitet: Sept. 30, 2022, 1:13 pm

New-to-me authors read in September 2022
Photos from LT unless otherwise stated.


Miyamóto Teru
Yi Munyol
Anna North
Martine Pouchain
Alexander Starritt
Baek Nam-Ryong, or Nam-nyong Paek (photo from Babelio)
Mary Eleanor Wilkins Freeman
Claire Oshetsky (photo from Babelio)

10raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 25, 2022, 5:51 am

New-to-me authors read in October 2022
Photos from LT unless otherwise stated.


Karl Marlantes
Claire-Lise Marguier (photo from Babelio)
Ousmane Sembène
Waubgeshig Rice (photo from Babelio)

11raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 29, 2022, 5:51 am

New-to-me authors read in November 2022
Photos from LT unless otherwise stated.


Greg Egan (well, this is self explanatory)
Lyman Frank Baum
Francisco Sionil José (photo from wikipedia)
Catherine Dabadie (photo from babelio)

12raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 30, 2022, 5:36 am

New-to-me authors read in December 2022
Photos from LT unless otherwise stated.


Hervé Giraud (photo from babelio)
Claire Keegan
Lea Ypi
Jakob Guanzon
Kim Jaeyeon

13raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 12, 2022, 4:18 am

Books acquired in September 2022
Bought
21. L'Arc-en-ciel blanc de Akira Yoshimura, traduit du japonais (Japon) par Martin Vergne
22. Essai sur l'exotisme de Victor Segalen
23. Bones Bay de Becky Manawatu, traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par David Fauquemberg
24. Les Yeux du Rigel de Roy Jacobsen, traduit du norvégien (Norvège) par Alain Gnaedig
25. Mémoires d'une jeune fille rangée de Simone de Beauvoir
26. La Mort d'Ivan Illitch, suivi de Maître et serviteur et Trois morts de Léon Tolstoï, traduit du russe (Russie) par Michel-R. Hofmann, Boris de Schloezer et J.W. Bienstock

Press service
(netgalley) Il était un petit navire de Martine Pouchain
(netgalley) Journal de guerre de Mario Vargas Llosa, traduit de l'espagnol (Pérou) par Annie Vignal
(netgalley) Chouette de Claire Oshetsky, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Karine Lalechère
(masse critique Babelio) La Volonté des femmes de Mary Eleanor Wilkins Freeman, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pauline Tardieu-Collinet

14raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 29, 2022, 12:00 pm

Books acquired in October 2022
Bought
27. Funérailles molles de Fang Fang, traduit du chinois (Chine) par Brigitte Duzan
28. L'Homme au cheval blanc de Theodor Storm, traduit de l'allemand (Allemagne) pasRaymon Dhaleine
29. L'Ange de pierre de Margaret Laurence, traduit de l'anglais (Canada) par Sophie Bastide-Foltz

Press service
(netgalley) Ô pays, mon beau peuple ! d'Ousmane Sembène
(masse critique Babelio) La Lune de l'âpre neige de Waubgeshig Rice, traduit de l'anglais (Canada) par Antoine Chainas

15raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 18, 2022, 11:17 am

Books acquired in November 2022
Press service
(netgalley) Dernière Manche de Catherine Dabadie
(netgalley) Enfin libre : Grandir quand tout s'écroule de Lea Ypi, traduit de l'anglais (Albanie) par Emmanuelle Aronson et Philippe Aronson
(netgalley) Abondance de Jakob Guanzon, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Charles Bonnot
(masse critique Babelio) Sables noirs d'Hervé Giraud

16raton-liseur
Bearbeitet: Jan. 11, 2023, 3:41 am

Books acquired in December 2022
Bought
30. Une Vie de Simone Veil
31. Feuilles d’herbe de Walt Whitman, traduit de l'anglais par Jacques Darras

Press service
(masse critique Babelio) ***Mathurin Méheut

17raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 16, 2022, 12:12 pm

~~~~~~~~ 🦝 ~ September ~ 🦝 ~~~~~~~~

September is almost halfway through. I have been reading actively, but far less active on LT and I have a few reviews to write and to post. Nevermind, here are the plans for this month.
September reading will be heavily influenced by the Asia book challenge, as for this Korean month, I have selected 3 to 5 books from my shelves (one of which is from North Korea, I think it’s the first time I will read an author from this country so I’m all excited!) and by the three netgalleys I have received in the course of the last week of August: despite thinking I am far above the Rentrée littéraire considerations, I found myself requesting many books that will be released in September. Hopefully, it is not more books than I can chew…
And obviously, my annual plans are still relevant, although I tend to push them from one month to the other...

September reading plans:
(Asian book challenge - Writers from Korea) L'hiver, cette année-là de Yi Munyol, traduit du coréen (Corée du Sud) par Ch’oe Yun et Patrick Maurus
(Asian book challenge - Writers from Korea) La Pagode sans ombre de Hyun Jin-Geon, traduit du coréen (Corée) par Mi-Kyung Friedli et David Reichenbach
(Asian book challenge - Writers from Korea) Des Amis de Baek Nam-Ryong, traduit du coréen (Corée du Nord) par Patrick Maurus et Yang Jung-Hee
(netgalley) Nous, les Allemands d'Alexander Starritt, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Diane Meur
(netgalley) Faire bientôt éclater la terre de Karl Marlantes, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Suzy Borello
(netgalley) Hors-la-loi d'Anna North, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean Esch

If times allows, I might be willing to read one or two more books from Korea:
(Asian book challenge - Writers from Korea) Voler! de Kim Jaeyeon, traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel
(Asian book challenge - Writers from Korea) Monsieur Han de Hwang Sok-Yong, traduit du coréen (Corée du Sud) par Jean-Noël Juttet (relecture)

I have a degrowth goal of 6 books maximum per month, and my plan is for 6 books, and 2 optional. Nothing inconsistent...

18raton-liseur
Bearbeitet: Sept. 21, 2022, 1:51 pm

79. 55. (33) Les Gens de la Rue des Rêves de Miyamóto Teru, traduit du japonais (Japon) par Philippe Deniau
Titre original : 夢見通りの人々 (Yumemi-dori no hitobito)
Titre en anglais : non traduit



Me voilà à nouveau en train de lire une série de nouvelles reliées entre elles. Mais cette fois, je suis à Osaka à l’époque (presque) contemporaine.
Les commerçants et les habitants de la rue des rêves ont des vies plus complexes que ce que les apparences peuvent laisser supposer, mais je dois avouer que je n’ai pas réussi à accrocher. Ces instants de vie, pourtant souvent déterminants, parfois émouvants, d’autres fois scabreux, n’ont fait que glisser sur moi. Avec ce genre de recueil de nouvelles, c’est souvent comme ça, soit on aime soit on reste en dehors. Cette fois je suis dans le deuxième cas et je m’éloigne donc de cette rue animée sans regret.

19raton-liseur
Bearbeitet: Sept. 14, 2022, 1:08 pm

80. 56. (34 ) L’hiver, cette année-là de Yi Munyol, traduit du coréen (Corée du Sud) par Ch’oe Yun et Patrick Maurus
Titre original : 그해 겨울 (Kŭhae kyŏul)
Titre en anglais : non traduit



Je ne fais que courir selon mon instinct. Je me demande jusqu’où s’enfonceront les racines de cet hiver... (p. 59).

S’il n’existe aucune valeur absolue et objective pour nous guider, c’est avec nos propres mains que nous devons bâtir notre salut. Nos vies ne sont plus faites pour se conformer à diverses attitudes, elles doivent être reconnues et valorisées par nous-mêmes et nos propres efforts. (p. 86-87).

Je ne me souviens plus pourquoi j’ai acheté ce livre, probablement au moment de sa parution, peut-être pour son titre aussi doux qu’un tapis de neige et pour sa couverture d’une grande délicatesse. Mais je ne m’attendais pas à cela en l’ouvrant, une sorte de Sur la route coréen, avec une plume certes plus retenue et un héros bien plus solitaire, mais c’est un peu de cela qu’il est question : un jeune homme en rupture de ban erre un peu au hasard sur les routes de Corée du Sud, dans les années 60, réfléchissant à son avenir et à comment il pourra trouver une place dans sa société.
Ce roman est en grande partie autobiographique. Yi Munyol étant le fils d’un communiste passé au Nord, ce qui, dans la société extrêmement crispée de la jeune Corée du Sud indépendante, est un handicap majeur.
Ce récit laisse voir une grande détresse, une profonde solitude, mais il se distingue aussi par sa grande retenue. Tout est dit à mot couvert, et sans jamais se plaindre. Le livre est peut-être un peu difficile à décrypter pour des personnes qui ne connaîtraient rien à la Corée du Sud dans ces années-là. J’ai pour ma part eu la chance de lire plus tôt cette année un récit graphique, Un matin de ce printemps-là qui décrit l’atmosphère étouffante de ce pays dans les années qui ont suivi la guerre de Corée. Cela m’a aidé à comprendre certains aspects de ce livre, à le replacer dans un contexte plus large, et à compléter la vision que j’avais de ce pays, car outre l’errance du personnage principal, on y voit la détresse économique dans laquelle vit une partie de la population, et parfois on a du mal à se souvenir que l’on est dans les années 60 dans un pays allié des Etats-Unis.
Une belle découverte que ce texte et cet auteur, il faudra que je découvre la partie de son œuvre non autobiographique.

20raton-liseur
Sept. 14, 2022, 7:04 am

81. 57. (-) Hors-la-loi d’Anna North, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jean Esch
Titre original : Outlawed



Le savoir peut être une chose très précieuse, mais seulement si les gens le désirent. Sinon, ça peut être pire qu’inutile.
(p. 43, Chapitre 2).

J’avais lu une note de lecture lorsque ce livre est paru aux Etats-Unis qui le qualifiait de western dystopique et féministe, il ne m’en a pas fallu beaucoup plus pour guetter sa sortie en français, et c’est cette rentrée littéraire et les éditions Stock qui nous l’offrent.
Nous sommes aux Etats-Unis, à la fin d’un XIXème siècle qui ressemble beaucoup au nôtre, à deux petits détails près : une Grande Grippe a frappé le pays et tué 9 personnes sur 10 un peu plus d’un demi-siècle plus tôt, et le Petit Jésus est apparu pour demander aux survivants de croître et multiplier pour repeupler la terre. Deux petits détails, qui permettent à Anna North de mettre un verre grossissant sur certains travers de notre société. Parce que dans ce monde-là, les filles sont élevées pour devenir des mères, et si elles ne tombent pas enceintes dans les premières années de leur mariage, elles sont chassées de chez leur mari et deviennent vite des sorcières qui n’ont pour perspective que la pendaison ou la fuite. Ada fait partie de ces femmes stériles et elle doit fuir, d’abord dans un couvent puis en rejoignant la bande du Kid.
Anna North surfe ici sur des thèmes à la mode comme celui des sorcières et propose un roman dans l’air du temps, comme chaque rentrée littéraire nous en livre un ou deux, un roman dans la lignée des Heures rouges de Leni Zumas ou des Graciées de Kiran Millwood Hargrave. Je dois avouer que je m’attendais à un roman plus profond (d’autant qu’il est édité dans la collection La Cosmopolite, qui me semble d’habitude proposer des lectures plus exigentes) et j’ai donc été assez déçue par ma lecture.
Cela reste cependant un bon roman pour qui veut un roman facile à lire et original. Il y a de bonnes idées, par exemple la façon dont le mythe de Billy the Kid est détourné pour devenir un repère de femmes stériles qui veulent reprendre leur vie en main, ou bien l’idée de faire d’Ada une femme stérile mais aussi une sage-femme, ce qui permet de confronter différents points de vue sur la stérilité (même si le savoir médical s’est en grande partie perdu avec la Grande Grippe), mais aussi sur le sens qu’une femme peut donner à sa vie au-delà de ses propres maternités. Rien de révolutionnaire dans ce livre donc, mais une lecture qui pourra faire passer un bon moment et qui ne manque pas d’originalité dans sa façon de traiter des thèmes pourtant maintes fois évoqués.

Merci aux éditions Stock de m’avoir permis de lire ce livre, via netgalley.

21raton-liseur
Sept. 14, 2022, 7:05 am

82. 58. (-) Il était un petit navire de Martine Pouchain
Titre en anglais : non traduit



Tu te rends compte que ce monde est pourri quand même ? Jusqu’à la moelle, non ? Non ? On n’en a pas parlé déjà ? (…) C’est vrai qu’on n’est pas arrivés aux mêmes conclusions. La mienne n’a pas changé : foutu pour foutu, autant en profiter ! Sois honnête un peu, me dis pas que t’espères modeler ce putain de monde avec tes petites mains pour qu’il colle à ton idéal ? Si ? Tu veux le réparer avec tes petites mains ? Chapeau alors ! Et bon courage… (p. 25).

Une quatrième de couverture inquiétante, un titre qui fait explicitement référence à une des comptines enfantines les plus cruelles que je connaisse, ni une ni deux, je me suis lancée dans cette lecture courte et noire.
Le roman, qui ne fait pas 100 pages en grand format, est écrit comme une fable. On ne s’embarrasse pas de scène d’introduction ou de détails superflus. Pas besoin de longues descriptions, l’écriture se concentre sur l’essentiel et réussit ainsi à instiller une tension qui va croissant. Quatre adolescents partent pour une croisière qui tourne mal. Sur le radeau de survie, les jours passent et les chances d’être secourus s’amenuisent. Les questions de survie et d’humanité se posent alors avec une acuité qui n’a plus rien de théorique.

C’est un bon roman pour jeune ado (il est recommandé à partir de 14 ans et cela me paraît effectivement justifié). Il est noir à souhait et n’a pas peur d’être brutal, par exemple quand un des protagonistes meure dès les premières pages. Il est court et son écriture est efficace, ce qui plaira aux jeunes lecteurs pressés, et même peut-être aux jeunes qui ne sont guère lecteurs. Les thèmes sont intéressants et amènent à se poser des questions.
Martine Pouchain ne va pas aussi loin que j’aurais voulu : le gentil reste gentil, le cynique encore plus cynique, ça ne se passe pas toujours aussi simplement dans les situations extrêmes..., et puis on a le droit à un beau deus ex machina à la fin, mais c’est un roman pour jeune ado, je suppose donc que c’était prévisible et je ne peux pas juger ce livre avec mes yeux d’adulte.

Je ressors donc de ma lecture avec le sentiment d’avoir lu un roman efficace, qui dérange juste ce qu’il faut et que je me vois bien recommander à un jeune lectorat qui croit que la liberté ne s’accompagne pas de responsabilité ou que les questions philosophiques ne sont que de la théorie inutile. Une belle découverte au rayon jeunesse de cette rentrée littéraire.

Merci aux éditions Thierry Magnier de m’avoir permis de lire ce livre, via netgalley.

22labfs39
Sept. 14, 2022, 7:36 am

Happy new thread! And four reviews to start things off. You've been busy.

23raton-liseur
Sept. 14, 2022, 8:13 am

>22 labfs39: Thanks! And I am now up to date on my reviews!

24MissBrangwen
Sept. 17, 2022, 5:45 am

Happy New Thread!
Unfortunately I am only able to understand your reviews if I have some previous knowledge of the topic or it is quite an easy one, but how great that you are up to date now!

(I am using the Duolingo App to work on my French, but it is taking me ages because I often forget or am too tired - but I hope to get back to where I once was one day!)

25raton-liseur
Sept. 18, 2022, 6:00 am

>24 MissBrangwen: Perfectly understandable. I know that by writting in French I request an extra effort, so I won't take offence if anyone decide to skip some or all of my reviews.
If you have any question on a particular book, though, do not hesitate to ask (and I promise, I'll write the answer in English. :)

Good luck for the learning of French. I do not have your drive to even start learning a new language, although I'd love to be able to speak more languages than I do...

26raton-liseur
Okt. 11, 2022, 1:32 pm

Work and life have been busy recently, so I had little time (and little drive) to write reviews and to stay on top of LT, but I've been reading a lot, hence a nice backlog in terms of reviews...
I'll try to write and to post at least a few of them in the coming days. I have read some pretty bad books, but also some very good ones, including Nous les Allemands/We Germans that I will review next and Faire bientôt éclater la terre/Deep River that I finished last Sunday after a 10-day reading marathon.

27raton-liseur
Okt. 11, 2022, 1:33 pm

83. 59. (-) Nous, les Allemands d’Alexander Starritt, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Diane Meur
Titre original : Us Germans



Nous, les Allemands, un titre qui pourrait paraître pompeux voire usurpé lorsque l’on sait qu’il a été écrit en anglais. Mais il serait faux de rester sur cette impression et de passer à côté de ce livre dont la lecture m’a emballée. L’usurpation, d’abord… Alexander Starritt est un auteur de langue anglaise, certes, mais avec une double nationalité, écossaise et allemande, comme le petit-fils du livre d’ailleurs, petit-fils qui reçoit une longue lettre posthume de son grand-père, ancien soldat allemand sur le front de l’Est pendant la seconde guerre mondiale. Nul doute qu’Alexander Starritt a mis beaucoup de lui-même et de son histoire personnelle dans ce roman. Le caractère pompeux, ensuite… Eh bien non, le titre reflète avec une grande exactitude ce que ce roman tente de faire et ce qu’il fait, à mon avis très bien.
Car dans cette longue lettre qui est comme une confession, et au cours de laquelle le petit-fils se permet des inserts pour commenter certains passages, pour les préciser, ou pour les éclairer d’une lumière différente en racontant l’héritage de cette guerre pour sa génération (avec en plus la distance que lui donne sa double nationalité qui le place à la fois du côté des vainqueurs et du côté des vaincus, du côté des gentils et du côté des méchants), le grand-père, Meissner, raconte un épisode de la guerre, de sa guerre, celle du front de l’Est, une avancée victorieuse éclair puis un lent reflux de petites défaites en petites défaites. Cet épisode est peu glorieux, c’est le moins qu’on puisse dire, mais, au fond, au vu de toutes les horreurs perpétrées pendant les guerres et pensant cette guerre en particulier, c’est bien peu de choses.
Mais le fait de raconter ses souvenirs est pour l’ancien soldat Meissner l’occasion de revisiter plus qu’un fait de guerre. Il se demande ce qu’il fait là, quelle est sa part de responsabilité dans tout cela. Ce à quoi il a participé directement et ce à quoi il n’a pas participé directement. Et c’est là que le titre prend tout son sens, dans ce va-et-vient entre responsabilité individuelle et responsabilité collective.
Et comme si ce thème n’était pas assez complexe, Meissner, qui écrit une lettre qu’il sait posthume, s’interroge aussi sur la façon dont on peut continuer à vivre avec tout cela, en articulant encore une fois sa réflexion entre le niveau individuel et le niveau collectif. Il s’interroge sur ce qui reste, de la responsabilité, de la culpabilité ou de la honte.

C’est un texte extrêmement riche, donc, dont la lecture demande une certaine concentration, mais cette profusion de thèmes est très bien maîtrisée et à aucun moment je ne me suis sentie perdue dans cette lecture. Le livre est court (seulement 158 pages dans mon édition électronique), et donc particulièrement dense, mais c’est une lecture passionnante à chaque instant, et pour moi une très belle découverte de cette rentrée littéraire étrangère.

Un grand merci aux éditions Belfond pour m’avoir permis de lire ce livre, via netgalley.

28raton-liseur
Okt. 11, 2022, 1:38 pm

The covers for the US edition and the French edition both feature a wolf, which is a bit strange as there is no reference to wolves in the book (only once in French, but it’s a reference to the “loup de la finance” expression, “finance wolves”, for those young people who are just eager to build their fortune and their power, and it’s Calum, the grand-son who uses it, not the grandfather).
I get the idea of the pack that can be behind this image (although it’s always a solitary wolf that is shown), but I feel the choice of cover is not that obvious and maybe too oriented compared to the whole point of the book.



On the contrary, I have found an English edition which is totally different, and a bit cryptic as well...

29raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 12, 2022, 1:43 am

84. -. (-) Le Pirate et l’apothicaire de Robert Louis Stevenson, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Marc Porée et illustré par Henning Wagenbreth
Titre original : Robin and Ben or The Pirate and the Apothecary, in Moral Emblems



Je cherchais un livre à lire pour une classe de CM1, alors j’ai enfin ouvert ce titre que j’avais mis sur les étagères de P’tit Raton mais qu’il n’avait jamais lu je pense, et moi non plus. J’avais acheté ce livre suite, je crois, à sa présentation dans l’émission « L’as-tu lu, mon p’tit loup », un incontournable de la littérature jeunesse sur France Inter. Je me souviens qu’il était question de livre amoral et c’est cela qui m’avait plu (outre le nom de l’auteur bien sûr), ce n’est pas souvent que l’on a des livres amoraux au rayon jeunesse de nos librairies ou de nos bibliothèques !
Je n’aime pas trop le genre de dessin qui illustre ce conte, mais je me suis tout de même lancée dans ma lecture et, surprise, c’est un texte rimé ! Une bonne façon de rythmer cette lecture, et chapeau au traducteur de cette édition, Marc Porée, qui a dû s’arracher quelques cheveux pour garder les rimes tout en proposant un texte accessible aux enfants.
Le pirate et l’apothicaire, donc, une « nouvelle » tirée d’un recueil appelé Moral emblems, de courts textes que Stevenson s’est amusé à composer pendant une cure dans un sanatorium et que son beau-fils qui s’était entiché d’imprimerie a imprimé et vendu aux autres curistes. Le pirate et l’apothicaire, disais-je, sont deux frères qui choisissent deux voies bien différentes, et qui se retrouvent plusieurs années plus tard et se mettent à deviser de leurs métiers respectifs, de leurs avantages et de leurs inconvénients. Et la morale, parce qu’en fait il y en a une, n’est pas celle que l’on pourrait imaginer de prime abord…

Finalement, je n’ai pas lu ce livre à cette classe de CM1, il faut se connaître un peu plus avant de proposer ce type de livre, mais je crois que je vais la garder sous le coude pour une autre occasion. Je suis curieuse de voir comment des élèves d’une dizaine d’années vont réagir à cette lecture, intéressante tant dans sa forme que dans son fond. Et ça promet une discussion intéressante sur savoir si il y a le bien et le mal et c’est tout, ou s’il y a des gradations dans le mal, ou des qualifications. Affaire à suivre...

30labfs39
Bearbeitet: Okt. 12, 2022, 10:47 am

>27 raton-liseur: >28 raton-liseur: Excellent review of We Germans. You sold it to me, and onto the wishlist it goes. I also like your discussion of the covers.

>29 raton-liseur: Liked this review too. What is CM1? I have only read a couple of RLS classics: Kidnapped, Treasure Island. I really should try some of his different types of fiction.

Edited to add: Ha, ha. We Germans is already on my list thanks to Kay/RidgewayGirl!

31thorold
Okt. 12, 2022, 10:57 am

>27 raton-liseur: Sounds very interesting — thanks for that!

32raton-liseur
Okt. 12, 2022, 11:18 am

>30 labfs39: Ha, ha! I was watchnig for the French translation because of RidgewayGirl review actually. As they say, great minds...

BTW, CM1 (Cours Moyen 1ère année) is a grade in elementary school. Children are 9 years old when they are in CM1.
I have a few Stevenson i'd like to read too. This one is a very short read.

>30 labfs39: and >31 thorold: Lokking forward to your reviews if you decide to read it. It is really a great book (hoping I do not over-sell it).

33raton-liseur
Okt. 16, 2022, 10:08 am

85. 60. (35) Des Amis de Baek Nam-Ryong, traduit du coréen (République démocratique populaire de Corée) par Patrick Maurus et Yang Jung-Hee
Titre original : Pǒt
Titre en anglais : Friends



Quand vous aurez une vision saine des choses, qund vous vivrez en harmonie avec votre mari, votre but sera atteint et votre famille heureuse.
(p. 206, Chapitre 13, Partie 2, “Deux vies”).

La note de lecture de ce livre n’est pas évidente à faire. Parce que, quoi qu’en dise le traducteur et éditeur de cet ouvrage, on ne le lit pas pour ses qualités littéraires, et on ne le lit pas forcément pour les bonnes raisons. Ce n’est pas le titre ou la couverture, ou bien le résumé ou la note d’un autre lecteur qui m’a donné envie de le lire, mais bien le simple fait que, publié en 2011, il s’agisse du premier roman nord-coréen publié en France, et je ne suis pas sûre qu’il y en ait eu beaucoup d’autres depuis.
J’étais curieuse d’une œuvre qui n’est pas celle d’un dissident maintenant emprisonné, ni celle d’un opposant au régime, passé « à l’ouest » comme on disait en un autre temps. Non, il s’agit d’une œuvre publiée en Corée du Nord, donc approuvée par le régime en place, et qui en plus a pu passer les frontières (je me demande dans quelle mesure ce sont les éditeurs étrangers qui ont choisi de traduire ce livre ou si ce sont les autorités qui ont considéré que cette œuvre était une vitrine acceptable pour leur pays et en ont orchestré la diffusion…). Il n’en a pas fallu beaucoup plus pour attiser ma curiosité, et j’ai acheté ce livre dès que j’ai su qu’il existait. Il m’a ensuite fallu quelques années pour me décider à l’ouvrir, mais le temps que mes livres passent sur mes étagères avant que je ne me décide enfin à les lire, voilà une autre histoire, trop longue pour cette note de lecture…

Arrivons-en au fait, donc. Des Amis, un titre un peu énigmatique puisqu’il s’agit de l’histoire d’un divorce. Une femme, Chai Soon-Hwi, se rend chez un juge pour demander le divorce d’avec son mari, Ri Sok-Chun. Tous deux ouvriers lorsqu’ils se sont rencontrés, elle est maintenant cantatrice alors que lui travaille toujours au même poste dans la même usine. Leurs aspirations et leurs modes de vie ne semblent donc plus compatibles et tous deux sont donc d’accord pour ce divorce.
Mais les choses ne sont pas si simples. La cellule familiale est la base de la société nord-coréenne, une cellule familiale qui disparaît, c’est donc tout le parti et tout le pays qui est affaibli. Une demande de divorce entraîne donc une enquête, à l’issue de laquelle un juge décidera si le divorce est justifié ou non. Et c’est toute cette enquête, menée par le juge Jong Jin-Woo, le véritable personnage principal de ce roman, que l’on suit. Une façon de retracer la vie des époux depuis leur rencontre, mais aussi les pensées que cette enquête suscite chez le juge, tant à propos d’affaires passées qu’au sujet de son propre mariage.

Si les qualités littéraires de ce roman ne m’ont pas convaincue et que l’on sent beaucoup le poids de la rhétorique et de la doctrine du parti dans ce livre, si l’intrigue est cousue de fil blanc et qu’il ne faut pas être un grand devin pour savoir comment tout cela va se finir, j’ai tout de même trouvé cette lecture passionnante. En effet, pour avoir lu quelques romans venant de Corée du Sud ces derniers temps, j’ai été frappée d’y retrouver beaucoup de choses, l’imbrication entre la vie personnelle et la vie sociale est loin d’être propre au communisme. L’importance de la stabilité de la cellule familiale comme garante de l’équilibre social en général m’avait frappée dans d’autres livres situés de l’autre côté de la frontière, par exemple dans le récit graphique Un matin de ce printemps-là de Park Kun-woong, où l’on voit, entre autre, comment l’opprobre sociale touche toute une famille (parfois au sens élargi du terme) dès qu’un de ses membres est mis à l’index ou dans le parcours de Yi Munyol, qui a eu beaucoup de mal à trouver sa place dans la société Sud-Coréenne parce que son père était passé au Nord.
Il est difficile, donc, dans ce roman, de démêler les influences communistes des influences culturelles habituelles, et c’est finalement cela qui le rend passionnant, la façon dont on perçoit cette imbrication, dont on peut la toucher du doigt sans pouvoir forcément la mettre facilement en mots. C’est une vision très différente de ce que la littérature que j’ai pu lire de ce pays, le dernier en date étant La Traversée de Pyongyang de Marc Nexon, le compte-rendu d’un journaliste passant « incognito » quelques jours dans le pays et, incapable d’en voir quoi que ce soit, ne relatant que le côté secret et fermé de cette société. Ici, nous sommes en plein cœur de la société et nous la voyons bouger et respirer, prise dans ses espoirs et ses contradictions. Si l’intrication entre culture et communisme est intéressante, on la trouve aussi exprimée dans une célébration du passé et des traditions qui m’a beaucoup surprise, comme ces canards mandarins, symboles de fidélité conjugale, brodés sur les oreillers des jeunes mariés alors que la révolution a déjà balayé toutes les féodalités du passé. Pour moi, le communisme rime avec une certaine vision positiviste de l’histoire et de sa marche en avant, qui s’accommode mal d’une célébration du passé. Ce livre a donc remis en cause une vision trop simpliste que je pouvais avoir des pays communistes, et j’en ai beaucoup appris.
Et il est intéressant de voir la rhétorique politique à l’œuvre ici. Je me suis demandée tout au long du roman si l’auteur y croyait, ou si il récitait une leçon bien apprise… Il y a des fois où l’on a l’impression qu’il peut dire une chose et son contraire, selon ce qui arrange le parti, et toujours au nom de la doctrine. Celle qui veut avancer trop vite et renier ses origines à tort, celui qui veut rester à sa place et ne pas rechercher les honneurs a tort aussi, la bonne attitude est un compromis constant et un équilibre bien instable. Quel travail constant et exténuant de rester toujours ainsi sur la crête de la vague, dans le travail, dans la vie de famille, à chaque instant de sa vie. La pression pour donner le meilleur de soi parce que sinon ce serait comme voler le pays est déjà difficile à supporter par livre interposé, alors j’ai du mal à imaginer ce que c’est que vivre dans une telle société, et encore plus de mal à imaginer comment on peut s’y épanouir.
Avec ce livre qui se doit d’être à la gloire d’un pays et d’un système politique, c’est en fait un immense malaise que j’ai ressenti et une bien étrange expérience de lecture. Je ne peux donc que recommander ce livre à tout lecteur qui aime regarder de l’autre côté de la barrière, car c’est un moment de lecture intéressant, passionnant même, à condition de ne pas s’arrêter à un style un peu poussif (mais n’est-ce pas la rhétorique du parti qui le nécessite) et une histoire cousue de fil blanc (mais on savait tous dès le départ que le parti allait en sortir vainqueur, non?). Un livre des plus intéressants, et il est dommage qu’il n’ait pas été suivi par plus de traductions venues de ce pays, pour nous en offrir une vision plus contrastée, plus riche, plus nuancée et si possible plus juste dans sa diversité et sa complexité.

34raton-liseur
Okt. 16, 2022, 10:08 am

Les deux livres cités dans cette note, le récit graphique Un matin de ce printemps-là de Park Kun-woong et le récit La Traversée de Pyongyang de Marc Nexon, sont deux lectures que je recommande, en particulier la première. J’ai aussi lu il y a peu L’hiver, cette année-là de Yi Munyol, que je recommande avec moins d’empressement mais qui fut aussi une lecture intéressante il y a quelques semaines de cela, en me faisant découvrir un nouvel auteur et son univers.

35raton-liseur
Okt. 16, 2022, 10:14 am

86. 61. (-) Journal de guerre de Mario Vargas Llosa, traduit de l’espagnol (Pérou) par Annie Vignal
Titre original : Diario de Irak
Titre en anglais : L’édition américaine de Diario de Irak semble être bilingue et inclut des photos de la fille de Mario Vargas Llosa, photographe professionnelle avec qui il a réalisé ce voyage.



L’Irak est le pays le plus libre du monde, mais comme la liberté sans ordre et sans lois n’est que chaos, c’est aussi le plus dangereux.
(p. 14, Chapitre 1, “La liberté sauvage”).

J’ai lu quelques-uns des romans de Mario Vargas Llosa, pas toujours les plus connus, mais ce sont des lectures que j’avais appréciées. J’étais donc contente de lire cette série de reportages de cet écrivain qui a aussi été journaliste. Bien sûr, je sais que ses idées politiques récentes sont plutôt éloignées des miennes, j’ai bien vu aussi que les portraits contenus dans ce livre sont le fruit d’un voyage de seulement 12 jours en Irak, je sais qu’il s’agit d’une guerre qui a duré et qu’à l’époque où il a écrit ces lignes, Mario Vargas Llosa ne savait pas ce que cette guerre allait donner. Beaucoup de précautions à prendre avant de lire ce livre, donc.
Et pourtant, malgré cela, je me retrouve avec un livre qui m’a plutôt déçue. Le livre est assez plat, il n’y a pas d’analyse originale ou profonde, Mario Vargas Llosa se contente de décrire les gens qu’il rencontre et de rapporter leurs dires, sans beaucoup de distance ou de mise en perspective. Et puis, ses constantes plaintes concernant la chaleur, ou la nourriture, sont des plus irritantes. Je suis certaine qu’il a voyagé dans des conditions tout à fait acceptables pour ce qui reste un voyage de presse dans un pays en guerre, et si je comprends l’inconfort, j’aurais aimé qu’il garde ses réflexions pour lui, car au bout d’un moment, j’ai fini par les trouver plutôt indécentes vis-à-vis du pays dans lequel il était.
Pas besoin que j’en dise beaucoup plus sur ce livre, dont je ressors avec un profond sentiment d’irritation. Je suis bien embêtée car les éditions de La Martinière m’ont gracieusement permis de lire ce livre et je leur en suis reconnaissante, mais l’honnêteté m’oblige à dire que je suis loin d’être convaincue par ce livre. Maintenant, je sais que je continuerai à lire les romans de Mario Vargas Llosa, mais j’éviterai ses essais, en particulier les plus récents.

Merci aux éditions de La Martinière de m’avoir permis de lire ce livre, via netgalley.

36raton-liseur
Okt. 16, 2022, 11:21 am

87. -. (-) Marre du rose de Nathalie Hense, illustré par Ilya Green
Titre en anglais : non traduit



Je n‘écris pas de note de lecture pour tous les albums jeunesse que je lis, mais je veux garder une trace de celui-là, qui est une petite pépite. Contre les préjugés que l’on plaque sur les tout petits : quels jeux il faut aimer, quelles qualités il faut développer, quelles couleurs il faut porter, selon que l’on ait une zézette ou un zizi. La petite fille de ce livre est une vraie fille (elle le sait, parce qu’elle a les cheveux longs, une zézette et des barrettes brillantes), et pourtant sa maman lui répète qu’elle est un « garçon manqué ». Et elle ne comprend pas pourquoi elle serait un garçon raté et non une vraie fille. Un livre très équilibré, qui dit que l’on peut être une fille et aimer à la fois des choses dites de fille et des choses dites de garçon, et que c’est vrai aussi pour les garçons. Les questions d’identité de genre mises à hauteur d’enfant dans une réflexion bien plus complexe qu’habituellement, à travers une petite fille et ses copains aux identités bien personnelles, qui font fi des barrière que l’on y met habituellement. Un livre que je ne manquerai pas de lire et de discuter avec des petits élèves de 4 à 6 ans, voire plus, il y a vraiment beaucoup à réfléchir dans ce livre joyeux et profond. Une superbe réussite !

37raton-liseur
Okt. 16, 2022, 11:23 am

88. 62. (-) La Volonté des femmes de Mary Eleanor Wilkins Freeman, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pauline Tardieu-Collinet
Titre original : sélection de 7 nouvelles tirées des principaux recueils de l’autrice, ainsi qu’une nouvelle publiée uniquement dans une revue



Son front, entre les courbes lisses de ses cheveux gris, était doux et bienveillant, et des lignes dociles tombaient autour de son nez et de sa bouche ; mais ses yeux, rivés sur le vieil homme, semblaient signifier que cette docilité était le fruit de sa propre volonté, certainement pas de celle d’un autre.
(p. 44, “La révolte de « Maman »”).

Je l’avoue, la couverture du livre, avec cette femme en salopette croquant dans sa pomme (un fruit défendu ?) avec un regard qu’on pourrait qualifier d’effronté, y est pour beaucoup dans mon envie de lire ce livre. Puis quand j’ai vu qu’il s’agissait d’un recueil de nouvelles écrit au tournant du siècle (pas ce tournant, celui d’avant…) par une femme elle-même peu conventionnelle qui n’avait jamais été traduite en français, je savais que c’était un livre pour moi.
Et j’ai apprécié ma lecture de bout en bout. Je n’ai bien sûr pas le recul pour savoir dans quelle mesure les nouvelles choisies ici sont représentatives de l’œuvre de Mary Eleanor Wilkins Freeman, mais je crois que je serais prête à lire n’importe quel recueil de nouvelles écrites par elle et qui viendrait de ce côté-ci de l’Atlantique ! Parce qu’elles sont vraiment chouettes ces nouvelles, ces femmes qui tout d’un coup, pour une raison ou pour une autre, décident que cette décision-là ne sera pas prise à leur place par quelqu’un d’autre. Parfois ces femmes sont jeunes, parfois très âgées, mais la plupart du temps elles sont d’âge mûr. Elles ne sont pas là pour révolutionner la société, elles y ont leur place, celle qu’on leur a assignée, mais elle veulent juste, pour un moment ou pour plus longtemps, faire pour une fois un pas de côté.
Ce n’est pas un féminisme revendicatif, ni même un féminisme qui dit son nom. Est-ce d’ailleurs du féminisme ? Oui, parce que toutes les héroïnes sont des femmes, mais il m’a semblé que ces nouvelles décrivaient avant tout l’émancipation d’un être humain, qui se trouve être une femme, certes, mais un être humain avant tout, pris dans les rets de la société à laquelle il appartient. Cette société, c’est la société rurale de la Nouvelle-Angleterre à la fin du XIXème et au début du XXème siècles, un cadre plutôt atypique pour des nouvelles féministes, mais qui me parle, car il a le calme des vies droites et des bonheurs simples, ce que j’aimerais peut-être que ma vie soit de temps en temps (le patriarcat en moins, cependant, j’aurais du mal à me contenter de faire le ménage et la cuisine toute la journée et tous les jours).
Ces huit nouvelles forment un tout cohérent, avec une trame assez similaire de l’une à l’autre (sauf la dernière, qui m’a prise par surprise) : une femme qui tout à coup décide de partir dans une direction qu’on ne lui a pas indiquée, et qui fait fi de tous les obstacles qu’elle rencontre sur son chemin. Elle obtient ce qu’elle veut, payant un prix plus ou moins élevé pour cela, et tout rentre dans l’ordre d’une façon ou d’une autre. Comme un étang dans lequel on aurait jeté une pierre et dont les vaguelettes s’évanouiraient peu à peu. Mais ces nouvelles resteront en moi pour bien plus longtemps que ces quelques vaguelettes, et j’espère avoir la chance de recroiser Mary Eleanor Wilkins Freeman dans mes pérégrinations de lectrice.

Un grand merci aux éditions Finitude pour m’avoir permis de découvrir ce livre dans le cadre de l’opération Masse Critique de Babelio.

38raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 16, 2022, 11:25 am

Ce livre m’a souvent fait penser à Willa Cather, et son O! Pioneers /Pionniers que j’ai lu l’année dernière, et dans lequel elle fait le portrait d’Alexandra Bergson, une femme qui elle ne se rebelle pas mais s’impose tout simplement comme la matriarche du domaine familial dans les contrées sauvages du Nebraska. Et en écrivant cette note de lecture, c’est Lucy Townsend Warner qui m’est venue en tête, avec Lolly Willowes / Laura Willowes (du moins la première partie), dans laquelle une femme décide un jour, sur un coup de tête semble-t-il, de donner à sa vie la direction qu’elle souhaite et non celle qu’on veut lui imposer, dans la société anglaise bien pensante du XIXème.
Il est intéressant de voir que les deux autrices que je viens de mentionner ont certes été traduites en français mais sont très difficiles à trouver, leurs ouvrages étant souvent indisponibles et non réimprimés. Tout comme Mary Eleanor Wilkins Freeman, traduite pour la première fois avec ce livre. Un coup de chapeau aux éditions Finitude pour cette initiative, donc, en espérant qu’elle soit suivie d’autres de la même sorte !

39raton-liseur
Okt. 16, 2022, 11:23 am

89. 63. (-) Chouette de Claire Oshetsky, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Karine Lalechère
Titre original : Chouette



C’est à se demander comment on peut accepter d’être mère, quand on sait que la maternité est une source inévitable de conflit et de remords, et qu’elle conduit tout droit à la mort et à l’éviscération.
(p. 96, Chapitre 4).

Je suis assez dubitative par rapport à ce livre. Ce n’est pas du tout ce que j’avais imaginé en lisant le résumé de l’éditeur, et maintenant je me demande un peu ce que j’ai lu et pourquoi je l’ai lu. Tiny, la narratrice, est enceinte, et elle met au monde une chouette, qu’elle doit apprendre à élever comme la chouette qu’elle est et non comme l’enfant-chien (oui, car les chiens représentent la normalité ici) qu’elle aurait dû être. Tout au long de cet apprentissage, le père de Chouette cherche à rendre sa fille normale, les médecins expérimentent les techniques les plus barbares, mais Tiny tient bon et apprend de sa fille.
Je pensais qu’il s’agirait d’un livre sur les enfants différents, une allégorie sur la difficulté d’être mère d’un tel enfant, de savoir comment l’éduquer, comment l’amener à donner le meilleur de lui-même, à trouver sa place et son bonheur.
Mais dès le début j’ai été dérangée par le fait que Tiny savait dès le début que son enfant serait différent, on pourrait même dire que c’était inscrit dans son histoire, peut-être même dans ses gènes. Cela m’a paru un peu étrange. Puis, la façon dont Tiny décide d’élever sa fille me pose problème, peut-être autant que le père. L’un veut que sa fille devienne normale, l’autre refuse tout simplement quoi que ce soit qui pourrait la faire changer. Pourrait-il y avoir un juste milieu ? Chouette est une enfant particulière, mais le but de son éducation n’est-il pas de lui permettre de trouver une place dans la société (même si c’est une société de chiens), d’y participer d’une façon qui lui permette de s’épanouir ?
J’entends la métaphore sur l’enfant qui dévore sa mère, puis qui prend son indépendance, un peu comme certaines araignées se repaissent du cadavre de leur mère avant de partir explorer le monde, mais la façon dont Tiny considère sa fille ne me paraît pas non plus très saine, et j’ai été très mal à l’aise pendant une grande partie de ma lecture, mal à l’aise à cause des idées que je voyais véhiculées dans ce livre. J’ai été contente d’arriver au bout et de pouvoir le refermer. Je ne suis pas le public habituel pour un livre qui est une longue métaphore filée, mais j’aurais voulu aimer ce livre, je n’ai pas aimé ce qu’il disait sur la maternité, ni sur la difficulté d’être la mère d’un enfant différent. Les avis sur ce livre semblent très partagés, pour ma part, j’ai choisi mon camp, et je regrette que ce livre soit une occasion manquée.

Merci aux éditions Phébus de m’avoir permis de lire ce livre, via netgalley.

40raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 16, 2022, 11:24 am

Le nom de ce livre est Chouette (et non Owl), autant en français qu’en anglais, sa langue originale. Bien sûr, avec la traduction, on perd l’étrangeté du mot. Et c’est intéressant de comparer les couvertures utilisées de part et d’autre de l’Atlantique.
Dans l’édition américaine, on a une chouette tout ce qu’il y a de plus classique, blanche sur fond noir. Cela dévoile peu du livre, mais explicite le titre. Dans l’édition française, c’est une étrange petite fille avec un étrange masque en papier aluminium et un étrange petit bol dans les mains. Un masque de chouette, je ne sais pas ? Mais le sentiment est étrange, comme si l’on pouvait choisir d’être une chouette un moment, puis décider de ne plus l’être le moment d’après. Peut-être que j’analyse trop, mais dans un roman qui se veut une grande métaphore, je suppose que j’ai le droit.
Mais dans ce cas, la couverture américaine donne plutôt raison à la mère (« Ma fille est Chouette, entièrement Chouette, et rien ne changera quoi que ce soit dans son comportement, qui doit être accepté tel quel, voire encouragé. »), alors que la couverture française donnerait presque raison au père qui fait tout son possible pour rendre sa fille conforme, normale. Suis-je trop alambiquée si je pense que la solution se trouve entre les deux et que ce livre est une occasion manquée pour une vraie réflexion sur ce sujet ? Ou suis-je à côté de la plaque parce que le livre parle de maternité et moi je parle d’éducation ?

41raton-liseur
Okt. 16, 2022, 11:50 am

September recap
A skippable post, mainly for personal reference

It’s a bit late, while half of October has already passed to write a recap for September, so I’ll be quick. It has been a busy reading month, mainly filled with press services, as well as a few Korean books for the Asia book challenge, but not as many as I had planned.

The degrowth goal: Read more owned books than bought.
This month, I have bought 6 physical new book (as a result of a large order that was awaiting for me at the bookshop), and no ebook. In the same time, I have read only 3 owned physical books (none of those bought this month) and 0 bought ebook.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have bought 26 physical new books and 1 ebook, while I have read 35 owned physical books and 2 bought ebooks.

The serene sobriety goal: Read an average of 4 to 6 books per month, no more.
Missing my target again this month, as I have read 9 proper books.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 63 proper books, while my annual total target is a maximum of 72 books. I guess I’ll read more than 9 books in the coming 3 months.

The open-ended goals
Read global and diverse (i.e. books outside of France, UK and US).
Out of my 9 proper books for this month, 1 is French (a teen book), 1 is from the UK and 3 from the US. Among the 4 others, 1 is from Peru, 2 from South Korea and 1 from North Korea.
I can’t call this a diverse month even if I read more women authors than previously this year, and if I book-visited North Korea for the first time through the eyes of a North Korean author.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 23 books from French authors, 5 from UK authors and 4 from a US author. 31 books are from authors that are neither from France, UK or the US.

Read classics and forgotten classics, both European and non-European.
One forgotten classics this month, I think, with Mary Eleanor Wilkins Freeman, who is a classic author in the US according to the publisher’s blurb, although she is not famous this side of the ocean.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I read 8 classics.

Read at least one book for each of my personal challenges.
Nothing new.
Cumulative totals: Unchanged. Since the beginning of the year, I have read 0 book for my Emile Zola personal challenge and 1 book for my Luis Sepúlveda personal challenge.

Read at least two books with more than 400 pages.
Nothing new.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 2 books with more than 400 pages.

Read at least one book directly in English.
Still nothing to report.
Cumulative totals: Nothing to report yet.

42raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 19, 2022, 8:43 am

~~~~~~~~ 🦝 ~ October ~ 🦝 ~~~~~~~~

Again, I am late for my monthly plan. I’ll try to lay it out as I had it in my head at the beginning of October. On the last day of September, I had started a 800-page book, and I have few books from my shelves that fit this month countries for the Asia book challenge, two reasons to make reasonnable plans for this month.
There are two read-along I’d like to participate in. Both being quarter-long, I do not plan to read them in October as I have over-committed with service press recently and would like to regain some freedom in my book choices for a while.
So here are my plans. One "firm" commitment only (as firm as my reading commitments are...), and a few maybes.

October reading plans:
(Asian book challenge - Writers from Indo-China) La Fin du chant de Galsan Tschinag, traduit de l’allemand (Mongolie) par Dominique Petit et Françoise Toraille

If times allows, I might tackle one of the Q4 read along I want to participate/lurk on, and I might be willing to read one or two more books from Korea that I did not have chance to go to in September:
(Victorian tavern group read) L'Importance d'être constant d'Oscar Wilde, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Angeline Tomi
(Geeks who love the Classics group read) La Mort d'Ivan Illitch de Léon Tolstoï, traduit du russe (Russie) par Michel-R. Hofmann
(Asian book challenge - Writers from Korea) La Pagode sans ombre de Hyun Jin-Geon, traduit du coréen (Corée) par Mi-Kyung Friedli et David Reichenbach
(Asian book challenge - Writers from Korea) Voler! de Kim Jaeyeon, traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel

43raton-liseur
Okt. 16, 2022, 1:56 pm

90. 64. (-) Faire bientôt éclater la terre de Karl Marlantes, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Suzy Borello
Titre original : Deep River



Bordel de merde ! cria-t-il, sa voix petite en comparaison des collines et de la forêt environnante même s’il se faisait clairement entendre.
(p. 234, Chapitre 19, Partie 2, “1904-1910”).

— Peut-être qu’Aino a raison, dit Matti. Le patriotisme est une arnaque. Je me fiche que le bois aille aux Anglais ou aux Allemands. Le patriotisme ne fait que couper le marché en deux.
— Oui, convint Kyllikki. Mais sans cette « arnaque » il n’y aurait pas de guerre ni de hausse du prix de l’épicéa.
M. Saari et Matti se tournèrent vers elle, momentanément coupés dans leur élan.
— Le patriotisme existe, insista Matti en se tournant vers Emil Saari. On peut se faire de l’argent avec l’épicéa.
— Mais on fera des bénéfices grâce à la guerre, souligna Kyllikki.
Matti se tourna vers elle.
— Ce que font les gouvernements ne me regarde pas, et donc ne nous regarde pas.
Kyllikki n’émit aucun commentaire.

(p. 392, Chapitre 8, Partie 3, “1910-1917”).

J’ai passé une bonne dizaine de jours en compagnie d’une galerie de personnages, d’abord en Finlande puis sur les rives de la Columbia River, entre Oregon et Washington, sur la côté Ouest des Etats-Unis. Je pensais passer plus de temps avec Aino et sa famille, mais j’ai été tellement happée par cette fresque historique que je n’ai pas réussi à la lâcher et j’ai avalé ses presque 800 pages en à peine plus d’une semaine !
Aino est née en Finlande à un moment où la conscience d’être une nation en est encore à ses balbutiements mais où la présence russe fait beaucoup pour catalyser le processus. Aino grandit en Finlande alors que les idées communistes s’y répandent. Patriotisme, socialisme… Toutes ces idées en -isme seront la cause de son émigration aux Etats-Unis, ainsi que de celle de ses deux frères, Ilmari et Matti.
C’est le long de la Columbia River que s’écrivent dorénavant leurs vies, dans les premiers jours du nouveau siècle, le XXème, alors que cette partie du pays s’ouvre tout juste à l’appétit des hommes et à leur industrie. Au cours des deux ou trois décennies qui suivent, on assiste à la croissance de l’industrie du bûcheronnage et de la scierie, aux avancées techniques et à la croissance des villes qui accompagnent l’essor économique. Même si je ne connais rien au bûcheronnage et que les descriptions des machines et des techniques me sont parfois restées obscures, la description de cette industrie et de ses acteurs, grandes firmes et petits indépendants, banquiers véreux et tenanciers de lieux de perdition rôdant autour.
Mais le livre n’est pas que cela, c’est aussi une chronique des affrontements entre salariés et patrons au cours de ces décennies, les luttes, souvent violentes et les affrontements pour obtenir des conditions de travail un tant soit peu décentes : des salaires un peu meilleurs, mais aussi des heures fixes, des normes de sécurité qui évitent les nombreux accidents qui tuent ou laissent des hommes invalides à une fréquence difficile à imaginer, ou tout simplement de la paille fraîche une fois par semaine pour les lits. Cette histoire était inconnue de moi, même si j’avais déjà croisé l’IWW (Industrial Workers of the World, les Wobblies) dans une nouvelle de Jack London, Le Mexicain, pas plus tard qu’il y a quelques mois, et j’ai trouvé le compte-rendu de cette lutte passionnante, cette poussée entre communisme et syndicalisme dans un pays foncièrement capitaliste et individualiste. La litanie des grèves et des répressions est peut-être un peu trop exhaustive à mon goût, d’autant qu’on sort du cadre initial de l’histoire en s’aventurant dans d’autres secteurs et d’autres zones géographiques, mais ce sera le seul reproche que je pourrais faire à ce livre.
Et puis il y a aussi cette galerie de personnages, car ce livre n’est pas juste un prétexte pour nous faire découvrir un pan de l’histoire de la construction des Etats-Unis comme puissance industrielle. C’est aussi l’histoire de sa construction comme nation. Car au fil des années qui passent, les personnages évoluent. Certains sont nés aux Etats-Unis, d’autres arrivés très jeunes, d’autres arrivés alors qu’ils étaient déjà adultes. Cela détermine leur rapport initial au pays et aux langues qu’ils parlent, mais ensuite, chacun suit sa trajectoire. Et l’on voit peu à peu l’américanisation se faire, avec la langue qui est parlée à la maison, le nom donné aux plats traditionnels qui change, le 4 juillet qui est fêté pour la première fois (sans que ni les personnages ni l’auteur ne notent la signification de ce moment qui me semble pourtant un point de bascule important). On voit ceux qui, comme Aino, ont fui leur pays à cause de leurs idéaux et les ont clairement emmenés dans leurs (maigres) bagages, on voit ceux qui identifient très vite les potentialités de ce pays non encore abouti et qui sont capables d’en tirer le meilleur parti. Cette évolution des personnages est, sans que l’auteur semble y toucher, une passionnante description du processus d’émigration et d’assimilation, entre rivalités entre communautés et mouvances des allégeances.

Et à cela il faut ajouter les descriptions du paysage, des saisons qui passent, des pluies incessantes, et l’on a le merveilleux décor d’une saga au souffle épique, car Karl Marlantes l’explique dans une note à la fin du livre (une note qui pourrait être placée au début car il me semble que la lire avant de se lancer dans ce roman enrichirait la lecture), ce livre est plus qu’un simple roman historique. C’est le roman de ses ancêtres, car il est issu de ces Scandinaves qui se sont faits bûcherons, troquant leurs hivers de neige et leur végétation rase pour des étés pluvieux et des arbres dont la circonférence peut faire plusieurs dizaines de mètres. C’est aussi un roman qui, il le suggère, reprend la trame du Kalevala, la grande épopée mythologique finlandaise. Cela explique peut-être les décisions de certains personnages, que je n’ai pas toujours trouvées cohérentes, mais qui étaient nécessaires pour coller à la trame choisie, en tout cas cela donne une profondeur supplémentaire à cette œuvre. Et on n’est pas à un paradoxe près que de compter l’assimilation aux Etats-Unis en suivant la trame d’un chant finlandais.
Ce roman avait tout pour me plaire au vu de mes goûts littéraires, mais c’est plus que cela. Cette lecture m’a véritablement emportée, j’ai découvert beaucoup de choses, vu des arbres aux dimensions que je ne soupçonnais pas, j’ai senti la pluie sur mon visage, entendu le Kantele, vu la détermination des grévistes et celle de leurs opposants, et je ne suis pas encore tout à fait revenue de ma lecture.

Un grand merci aux éditions Calmann-Lévy de m’avoir permis de découvrir ce livre, via netgalley.

44raton-liseur
Okt. 16, 2022, 2:17 pm

Ce roman semble plutôt bien accueilli en France où il est sorti depuis deux mois maintenant, même s’il reste plutôt confidentiel (trop à mon goût). Etrangement, les notes de lectures émanant des anglophones semblent plus partagées. Est-ce parce que l’histoire du syndicalisme américain est peu du goût de certains (c’est vrai que ce qui est raconté n’est pas toujours à la gloire du pays de la liberté…). Ou est-ce, plus prosaïquement, parce que ce livre détonne dans l’œuvre (encore peu fournie) de cet auteur, qui, avant ce troisième roman, a écrit deux livres sur la guerre, un roman et un récit, tous deux tirés de son expérience en temps que militaire, en particulier au Vietnam ? En tout cas, même si nul n’est prophète dans son pays, cette différence de réception, si ce n’est pas une perception erronée de ma part, est intéressante à relever et serait intéressante à tenter d’expliquer.

Et puisque je suis dans les post scriptum, je m’interroge sur le titre énigmatique de cet ouvrage. Je ne pense pas l’avoir compris, et il me paraît d’autant plus étrange que le titre original est Deep River, du nom de la rivière (fictive) qui passe près de la ferme d’Ilmari, non loin des camps de bûcherons et qui irrigue tout le livre. Cela aurait été moins vendeur en France et je comprends la nécessité de ne pas conserver le titre original, mais le choix de l’éditeur ou de la traductrice me laisse avec un grand point d’interrogation, même à l’issue de ma lecture.

45raton-liseur
Okt. 16, 2022, 2:17 pm

Au cours de cette lecture, je n’ai pas pu m’empêcher de regarder des photos des paysages de cette partie des Etats-Unis, avec ses ciels toujours chargés et les couleurs profondes de ses cours d’eau et de ses forêts.
J’ai aussi trouvé quelques photos du bûcheronnage, que je mets ici. Elles viennent du site d’un musée canadien, en Colombie Britannique, mais correspondent tout à fait aux descriptions du livre.



(1) Abatteurs au travail
(2) Treuil à vapeur utilisé pour le remorquage des troncs, International Timber, près de Campbell River, 1926
(3) Un train de grumes, Industrial Timber Mills, à Lake Cowichan, 1946

46Dilara86
Okt. 17, 2022, 11:34 am

>36 raton-liseur: Merci : ça, ça va direct dans ma liste d'envie !

47raton-liseur
Okt. 17, 2022, 2:05 pm

>46 Dilara86: Ce n'est pas ma lecture la plus intellectuelle du mois, mais un joli rayon de soleil pour un chouette bouquin.
(Je le recommandais pas plus tard que cet après-midi à mes collègues! Je n'ai pas d'élèves avec qui je pourrais le lire cette année, mais ce n'est que partie remise).

48labfs39
Okt. 17, 2022, 4:04 pm

Goodness, when you get posting you really go to town!

>33 raton-liseur: I will look for this book, as I too am interested in the North Korean viewpoint. I've read a few books by defectors and the excellent Nothing to Envy by Barbara Demick, but nothing by a state-approved author, so to speak.

>36 raton-liseur: I was all set to look for Marre du rose to read with my niece, then saw that it hasn't been translated to English. rats

>40 raton-liseur: I enjoyed your review of Chouette and discussion of the covers. I find it interesting the choices publishers make in different countries and what it says about the readers in those countries.

>43 raton-liseur: And finally the Marlantes. Wow. You put this book on my radar and your review has moved it up the queue. I loved Matterhorn a lot, but had been put off by the setting of this novel. Although I spent 15 years in the Pacific Northwest and loved it (I lived in the next town over from where Marlantes lives), I wasn't sure I wanted to read 800 pages about logging. Silly me. Interesting that Marlantes uses the Kalevala for the spine of Deep River, he used the legend of Parzival for Matterhorn. Have you read the latter?

49raton-liseur
Okt. 19, 2022, 9:10 am

>48 labfs39: ;) I had written a few reviews and not posted them, which is a bit silly because posting all at once is not very nice on other CR members!

I don't know how the children book market is and if there are many translation into English, but I feel Marre du rose has some potential and might be translated at some point. I hope so, 'cause it's really a nice book!

I will be curious, if you decide to read Des amis/Friend and/or Faire bientôt éclater la terre/Deep River, to see your review. We already discussed that, but for the moment, it seems we have similar interests when it comes to international (non-US and non-European) literature, but that we might differ regarding our "domestic" litterature. As we expand the readings we share, it will be interesting to refine this comparison. And in particular the Marlantes seems to have a better reception in France than in the US (empirically comparing reviews in LT and its francophone equivalent, and although the review sample I've read is probably too small to be significant). So it will be interesting to have your take on this one, which might well be different from mine.
(And this reminds me I have not yet read Le Colonel/The Colonel that I bought following your review. I shoudl consider including it in my November reading plans.)

Oh, and about reading another Marlantes book... I have not made up my mind yet. His two other books are highly praised, but they seem so different, and I am not sure I am in the mood for a book on the Vietnam War at the moment. I'll keep this in mind, but probably for later.
Interesting to see that he is familiar in using myths or legends as a road map for his books. It makes me willing to know more about this author, for sure.

50raton-liseur
Okt. 19, 2022, 2:30 pm

91. 65. (-) Le faire ou mourir de Claire-Lise Marguier
Titre en anglais : non traduit



Voilà un livre coup de poing s’il en est, et c’est d’autant plus troublant qu’il se trouve dans le rayon jeunesse. Le titre est énigmatique, la quatrième de couverture ne dit pas grand-chose, si bien qu’il est difficile d’écrire une note de lecture un tant soit peu circonstanciée sans en dire plus que l’autrice et l’éditeur n’ont décidé de le faire.
Et finalement, je crois que cela m’arrange. Ce livre aborde plusieurs thématiques adolescentes. L’une d’entre elle me touche de près et je ne veux pas non plus en dire plus. Alors je n’en dirai pas plus sur le contenu. Le style est un mélange d’oral et de « courant de conscience » qui le rend un peu difficile à lire pour moi qui n’est pas l’habitude d’une prose aussi hachée ; des mots sont mis sur des difficultés adolescentes, des mots parfois incomplets, parfois contradictoires, souvent difficiles à entendre, et encore plus difficiles à écouter. Et cette façon d’écrire s’accorde bien avec le contenu du livre.
Un livre coup de poing, donc, pour des adolescents ou des parents qui aiment les livres qui remuent, qui questionnent et qui parfois aident à comprendre ou à grandir. Avec sa fin énigmatique, ce livre laisse la porte ouverte à la réflexion, et c’est une de ses réussites.
Un livre atypique, je crois qu’on n’aime ou qu’on déteste. Mais dans ma petite librairie indépendante, plusieurs libraires en parlent avec passion et se souviennent de ce livre des années après l’avoir lu. Mon P’tit Raton le considère comme un de ses livres préférés. Pour moi, la lecture est encore trop fraîche et trop coup de poing pour que je puisse en parler avec la justesse dont je voudrais faire preuve. A découvrir, à la condition quand même d’avoir le cœur bien accroché.

51raton-liseur
Okt. 19, 2022, 2:30 pm

92. 66. (-) L'Importance d'être constant, une comédie frivole pour gens sérieux d’Oscar Wilde, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Angeline Tomi
Titre original : The Importance of Being Earnest: A Trivial Comedy for Serious People



La vie est une question de tact.
(p. 17, Acte 1).

Si un éditeur me demandait un énième recueil d'aphorismes d'Oscar Wilde, je crois que c'est par ici que je commencerais mes recherches. En effet, cette pièce n'a l'air d'être qu'une suite de petites phrases assassines sur la classe des aisés et des oisifs, sur leur manque d'esprit et les effets de mode, sur les codes sociaux auxquels ils se conforment ou qu'ils cherchent à détourner…
C'est une pièce drôle et réjouissante. L'aristocratie anglaise du XIXème siècle est loin de mon mode de vie, mais c'est agréable, parfois, de se moquer des autres, surtout quand c'est fait avec l'esprit d'Oscar Wilde et, qu'on ne s'y trompe pas, ce n'est pas parce qu'on est dans un autre siècle, de l'autre côté de la Manche et dans une autre classe sociale que l'on n'en prend pas pour son grade de temps en temps…
Ceci étant dit, je dois avouer que la pièce m'a paru manquer un peu de souffle. A force de n'être qu'une longue série d'aphorismes, la pièce a eu du mal à garder mon attention. Bien sûr, l'histoire est cousue de fil blanc, et heureusement, c'est une comédie donc on sait que tout finira bien, et on ne tarde d'ailleurs pas à savoir comment.
Une pièce qui gagne donc probablement à être vue, et à être abordée avant tout comme un divertissement plein de causticité, voire de méchanceté, et qui n'aspire pas à plus que cela. Un jeu pour Oscar Wilde, un jeu pour les spectateurs aussi, une veine d'Oscar Wilde que je ne connaissais pas, qui n'est probablement pas celle que je préfère, mais qui à l'époque a dû avoir un beau succès mondain.

52raton-liseur
Okt. 19, 2022, 2:32 pm

Allez, je ne résiste pas à citer quelques aphorismes. Je suis restée raisonnable, je me limiterai à deux citations.
Vraiment, si les classes populaires ne nous donnent pas le bon exemple, à quoi peuvent-elles bien servir ? Elles semblent, en tant que classe, n’avoir aucune conscience de leur responsabilité morale.
(p. 2, Acte 1).

[Le socialisme] mène à une conception rationnelle du vêtement. Et je suppose que quand une femme est habillée rationnellement, alors, on la traite rationnellement. Et elle le mérite sans doute.
(p. 22, Acte 2).

53LolaWalser
Okt. 19, 2022, 3:02 pm

>44 raton-liseur:

American trade unions also partake of American "exceptionalism" in that they are practically the only ones in the world to have defended the bourgeoisie and liberalism instead of robust championship of workers' rights.

>52 raton-liseur:

Witty, yes-- but Wilde's quips shouldn't be taken at face value.

Oscar Wilde, 1891: The Soul of Man under Socialism

To the thinker, the most tragic fact in the whole of the French Revolution is not that Marie Antoinette was killed for being a queen, but that the starved peasant of the Vendee voluntarily went out to die for the hideous cause of feudalism.

54raton-liseur
Okt. 20, 2022, 6:02 am

>53 LolaWalser: Thanks for these historical perspectives. Interesting.

55raton-liseur
Okt. 21, 2022, 2:48 am

93. -. (-) Légendes de la Garde, intégrale de David Petersen, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Marion Roman, Corinne Daniellot et Isabelle Troin
Titre original : Mouse Guard

Cette critique se rapporte aux quatre volumes de la série de bande dessinée « Légendes de la Garde », que j’ai lus dans l’ordre de leur publication :
Automne 1152
Hiver 1152
La Hache Noire, dont l’action se situe avant les deux premiers même si elle est racontée plus tard
Baldwin le Brave et autres contes, qui a pu être qualifié de hors série car il revient sur les contes qui ont bercé l’enfance de nos héros



« Des héros insignifiants, une intrigue insignifiante, et pourtant il arrive à en faire une histoire », c’est ce que j’ai dit en lisant cette bande dessinée, et M’sieur Raton, qui l’a beaucoup aimée, a trouvé ça très péjoratif, alors que ça n’était pas l’intention. J’ai probablement moins apprécié cette lecture que M’sieur Raton, ce qui m’a fait prendre conscience que je ne suis pas sensible aux livres qui sont avant tout centrés sur la création d’un univers. C’est peut-être pour cela que je n’ai jamais réussi à lire Le Seigneur des Anneaux (même si je ne désespère pas), alors que M’sieur Raton adore ce livre.

Bon, après ces considérations personnelles, il serait bon que je commence enfin à parler du livre. Il est donc question de tout petits héros, d’une histoire plutôt ténue, et pourtant, avec seulement cela, David Petersen arrivé à créer une grande fresque aux accents d’épopée.Car la série des Légendes de la Garde est une bande dessinée basée sur la création d'un univers, un peu comme Tolkien a créé ses Terres du Milieu, et non sur une histoire ou sur des personnages. D'ailleurs, l'impression de déjà vu (ou lu pour être plus exact) n'est jamais loin tant cette histoire reprend sans les modifier les codes des épopées héroïques.
Mais l’intérêt et la grande réussite de cette série n’est pas là mais dans les dessins et l’univers graphiques. Comme pour beaucoup de lecteurs, c’est la couverture, entraperçue dans les bacs de la bibliothèque de mon village qui m’a amenée à emprunter et lire ce livre (presque toute ma famille Raton a fait de même, c’est pour cela que j’aime bien laisser traîner quelques temps les bd empruntées sur la table du salon). Trois petites souris avec des épées minuscules (enfin, proportionnées à leur taille) et un regard fier et farouche écartant de belles feuilles d’érable aux couleurs automnales. Un mélange de douceur (dans les couleurs, dans le décor) et de caractère (dans le regard et le geste déterminé des souris), cette couverture est un résumé parfait du livre, qui est un alliage parfaitement équilibré entre ces deux contraires. Le meilleur exemple de cela est une vignette dans le premier tome , où les méchants partent assiéger les gentils. Ils sont harnachés en conséquence, leur chef fait une déclaration à la Poutine (« Il faut aux Territoires un chef unique, qui garantisse sécurité et prospérité, qui n ‘hésite pas à chasser nos prédateurs. Un chef qui soit davantage qu’un simple garde. », chapitre 5, “L’Aube de Minuit”,p. 107-108), et on voit les souris (les méchantes, donc) traverser une rigole d’eau sur des pommes de pin, dans un paysage baigné de lumières crépusculaires et sous une pluie battante, c’est mignon comme tout...

Pas besoin d’en dire beaucoup plus. Les dessins sont d'une grande douceur, avec des couleurs un brin passées et une profusion de détails qui fait de cet univers médiévalo-celtique un endroit très agréable où se promener. C'est mignon, c'est reposant, et si je peux me permettre ce néologisme, c'est évadant. Cette bande dessinée vaut avant tout pour ses superbes dessins, tant de la nature que des villes où habitent les souris, c’est un très bel univers pour qui aime se plonger dans ces mondes qui, bien que n’étant pas idéaux, font rêver.

56raton-liseur
Okt. 21, 2022, 2:55 am

94. -. (36) Musique verte de Christophe Léon
Titre en anglais : non traduit



Encore un joli titre de la collection Petite Poche des éditions Thierry Magnier, une collection faite pour les « petits lecteurs », ceux qui n’aiment pas les gros livres mais qui ont l’âge qu’on leur propose des livres un peu consistants quand même.
Ici, Christophe Léon, auteur jeunesse prolifique, propose un court texte dans lequel il ne se passe pas grand chose, juste quelques souvenirs émerveillés d’un été passé chez un grand-père qui sait regarder la nature. C’est une belle relation entre un grand-père et son petit-fils qui se noue au fil des plantes et des non-dits. Christophe Léon dit les odeurs, les rares dialogues, les moments d’observation, les gestes lourds de sens. C’est une écriture qui suggère plus qu’elle ne dit et c’est une ode aux liens entre les générations et à la transmission.
Un beau texte pour des petits lecteurs de 8 à 12 ans, voire plus, surtout s’ils ont dans leur entourage un passionné de nature ou un aïeul un peu fantasque. Un livre qui pourra ouvrir ces petits lecteurs à des plaisirs littéraires qu’ils ne soupçonnaient pas.

57raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 21, 2022, 4:12 am

95. 67. (-) Ô pays, mon beau peuple ! d’Ousmane Sembène
Titre en anglais : non traduit



… Parfois, quelqu’un te demande : « Où as-tu appris le français ? Comment fais-tu pour le parler ? » Tout de suite, il pense que c’est la civilisation des Blancs qui a fait de toi une personne capable de réagir, de voir et même de sentir, alors ils te considèrent comme leur œuvre. D’autres te demandent : « Es-tu habitué à notre cuisine ? Notre façon de s’habiller ne te gêne pas quand tu marches ? » Lorsqu’il fait chaud, ils disent : « Ne te plains pas, tu es d’un pays chaud ; ta peau te rend insensible à la chaleur… Comment vit-on chez toi ? » Il y en a aussi qui se marrent à la vue d’un nègre : quand un Noir leur parle, ils battent des cils comme si les mots leur tombaient du firmament. Dans les salles de spectacle, il y en a qui changent de place, car la présence d’un sac de charbon les compromet et, en partant, leur regard te fait comprendre ce qu’ils n’osent pas exprimer ; c’est pareil dans le bus ou le métro…
(p. 83, Partie 2, Chapitre 1).

Je ne veux pas vous faire concurrence, je veux simplement lutter. Si je perds d’avance, cela ne fait rien ; ceux qui viendront après moi vous tiendront tête jusqu’à ce que vous soyez assis à la même table.
(p. 140, Partie 3, Chapitre 2).

Je découvre avec ce livre, que les éditions Presse de la Cité ont eu la bonne idée de rééditer, Ousmane Sembène, qui fut acteur majeur de la scène culturelle sénégalaise de l’époque de la décolonisation et des indépendances. Ce livre n’est pas son plus célèbre, mais c’est le deuxième qu’il écrit et le premier qui se passe au Sénégal. Il est publié en 1957, 3 ans avant l’indépendance du Sénégal et alors qu’Ousmane Sembène est encore docker sur le port de Marseille. Il y a donc beaucoup d’Ousmane Sembène dans le héros de ce livre, Oumar Faye, qui revient dans son village de Casamance après 8 ans passés en France, dont 4 à faire la guerre, 8 années pendant lesquelles il a eu l’occasion de se frotter à des idées nouvelles, 8 années pendant lesquelles il a eu accès à l’éducation, dispensée notamment par les syndicats (et Ousmane Sembène a lui aussi profité des bibliothèques et des cours gratuits du Parti Communiste et de la CGT).
Oumar Faye arrive donc en Casamance, fort de ses idées nouvelles et prêt à vivre dans son village, mélangeant respect de la tradition et idées nouvelles. Petit détail, il débarque avec sa femme blanche, Isabelle. Le livre, somme toute assez court, suit les premiers mois de l’installation d’Oumar Faye et de sa femme : les réticences de sa famille (un père iman et une mère un peu sorcière, c’est compliqué quand on amène des idées neuves et une femme blanche…), la défiance des villageois face à un dynamisme entrepreneurial auquel ils ne sont pas habitués. Mais Ousmane Sembène croit en son peuple (le titre du livre est assez explicite sur ce point !) et Oumar Faye arrive à emmener dans son sillage les jeunes de sa génération, et même peu à peu les générations plus âgées. Mais c’est sans compter sur l’administration coloniale qui voit d’un mauvais œil se lever la figure de cet homme charismatique et prêt à tout changer.

Il me semble que le livre a quelques faiblesses, avec notamment une galerie de personnages secondaires très secondaires et peu caractérisés, ce qui rend parfois difficile le fait de les suivre au fil de l’histoire. Mais l’intérêt du livre n’étant pas là, c’est une faiblesse que l’on pardonne aisément, d’autant qu’il s’agit d’une œuvre de jeunesse, il faut bien que plume se fasse.
Mais par-delà ces faiblesses, c’est une lecture très intéressante, qui met en scène l’évolution de la société et les rapports entre les générations, les espoirs de certains et le fatalisme des autres, les tiraillements qu’il peut y avoir au sein des individus comme des collectivités dans un moment qui précède des grands bouleversements. Ce livre ayant été écrit avant l’indépendance, ce n’est pas une relecture de ce moment en sachant ce qui allait se passer après et comment tout cela finirait, non, Ousmane Sembène est dans le même état d’expectative que son personnage, il aspire au changement, il rejette activement la colonisation, mais il ne sait pas où cela va mener, ni si sa cause vaincra, ni quelle forme cette victoire pourrait prendre. Et l’on sent bien cela dans l’écriture de ce roman, tous les possibles sont encore là, et si l’on espère, on ne peut pas savoir. Cela explique probablement la fin qu’Ousmane Sembène a choisi pour son roman, probablement le seul destin possible pour un homme qui était probablement en avance d’une décennie, mais qui représente ceux qui ont tracé le début du chemin qu’Ousmane Sembène et d’autres ont suivi après eux pour sortir de la colonisation et enfin écrire leur propre histoire sur leur propre sol.

Merci aux Presses de la Cité de m’avoir permis de découvrir ce livre, via netgalley.

58LolaWalser
Okt. 21, 2022, 9:22 am

> 57

Haven't read that, would like to. Sembène made films based on his novels, reaching as wide as possible. Have you seen any? My favourites, from the beginning and end of his career, are Black Girl and Moolaadé. Since he addressed audiences of varying literacy, the films are much more than entertainment and have a hugely important political function.

59raton-liseur
Okt. 21, 2022, 10:44 am

>58 LolaWalser: I don't know if you've read Sembène at all. Just for the record, Ô pays, mon beau peuple ! is not translated into English, bu what seems to be his most famous novel, Les Bouts de bois de Dieu is. The English title is God's Bits of Wood.

Ousmane Sembène was, you're right, a complete artist (and a highly political one), not only a writer. I have a very limited cinema culture, so I've never watched any film by him. I make a note of your suggestions.

60LolaWalser
Okt. 21, 2022, 11:24 am

>59 raton-liseur:

I've read Vehi-Ciosane ou Blanche-Genèse: suivi du Mandat, and Les bouts de bois de Dieu (but not the English translation of the latter, which is what I found to buy). I mentioned his films because they form a whole with his publications.

61labfs39
Okt. 22, 2022, 7:57 am

>49 raton-liseur: Although I am not ready for the new Marlantes tome at the moment, I will look for a copy. I thought Matterhorn was excellent, but I think it wise to wait until you are in the mood. It too is lengthy. As for myths, Marlantes is a smart cookie. He was a National Merit scholarship winner and went to Yale, won a Rhodes scholarship, and after serving in Vietnam, got his Masters degree at Oxford.

I hope you like The Colonel when you get to it, if nothing else, to repay you for the recommendation of The Corpse Washer, which I liked a lot.

62raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 22, 2022, 12:09 pm

>60 LolaWalser: Noted. I should read more Sembène, but it won't be in a near future.

>61 labfs39: smart cookie, I love this English expression! You're right, these are quite a number of achievements.
So both of us will wait a bit for our next Matterhorn.
Le Colonel / The Colonel is moving up my pile of waiting-to-be-read books.

63raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 27, 2022, 1:47 pm

96. 68. (37) La Pagode sans ombre de Hyun Jin-Geon, du coréen (Corée) par Mi-Kyung Friedli et David Reichenbach
Titre original : 무영탑 (Muyeongtap)
Titre en anglais : non traduit



Le soir était tombé sur le temple. Au sommet du mont Toham, qui soutenait sur ses épaules le ciel pastel, des nuages gris clair avaient éclos comme des boules de coton ; la forêt de pins ondoyait sur le flanc de la montagne tel un flot d’huile verte ; l’eau de l’étang, devant le temple, ne pouvait contenir sa joie, malgré l’absence de vent, et caressait les rivages de pierre en dispersant son écume comme des nymphéas blancs. Les vaguelettes hésitaient comme si elles ne savaient où aller ; quelques-unes reculaient et disparaissaient ; d’autres, décidant de se diriger plutôt vers les ponts Cheongun et Yeonhwa, se précipitaient sous l’arche Hongye puis tournaient sur elles-mêmes et s’évanouissaient, comme prises de vertiges.
(p. 25, Chapitre 6).

« Il ne reste plus beaucoup de fleurs... » Ces mots hantèrent Juman comme le refrain d’un chant triste. La tragédie de la vie d’une fleur, arrachée par le vent et tombant seule dans la nuit, sans personne pour s’en rendre compte ‒ cela lui brisait le cœur… Etait-ce son destin ?
(…) Juan, elle, pensait encore à la fleur ; soudain, elle sentit sa gorge se nouer : « Si elle flétrit après une belle floraison, c’est malheureux mais elle n’a rien à regretter. Ce qui est pire, c’est un bourgeon qui tombe sans avoir pu éclore... »

(p. 129-130, Chapitre 57).

Sous ce titre énigmatique, se cache un roman choral situé dans le royaume de Silla, dans l’actuelle Corée du Sud, au VIIIème siècle. Les pagodes de pierre Dabotap et Seokgatap, du temple de Bulguksa, en sont le théâtre, théâtre qui met en scène un triangle amoureux, ou plutôt un carré, ou non, même un hexagone amoureux (même si certains amours s’apparentent plutôt à du désir). Asadal est le tailleur de pierre responsable de l’élaboration de ces pagodes. Cela fait bientôt trois ans qu’il s’y consacre, nuit et jour, guidé par sa seule fièvre créatrice. Mais le monde continue de tourner autour de lui : sa belle et jeune femme restée au village et qui, sans soutien masculin, est l’objet de nombreuses convoitises ; une jeune noble exaltée qui tombe amoureuse de cet artisan si solitaire ; un père qui veut la marier ; et surtout un pays qui est en train de perdre son âme. Car ce roman a été écrit alors que la Corée était alors occupé par le Japon. Elle y perdait son indépendance et sa culture, chose contre laquelle Hyun Jin-Geon souhaitait lutter. Avec ce livre, il s’empare d’une légende coréenne connue (d’après ce qu’en dit l’éditeur sur la quatrième de couverture, sans hélas donner de détails, et je n’en ai pas trouvé trace lors de mes rapides recherches sur internet) et il situe l’intrigue à un moment de l’histoire où la Corée était sous l’influence de la dynastie chinoise des Tang et, selon Hyun Jin-Geon perdait son âme et sa grandeur (les moines ne sont plus guère de saints hommes, les guerriers ne sont plus bien valeureux…). Seule une poignée d’hommes tentent de résister et d’affirmer l’indépendance politique et culturelle de leur pays. Le parallèle avec la situation de la Corée au début du XXème siècle est assez évident.
Si j’avais beaucoup aimé les nouvelles de Hyun Jin-Geon que j’avais découvertes un peu par hasard grâce à un envoi de l’éditeur, j’ai un peu moins aimé ce texte, plus classique et faisant preuve de moins de tendresse envers ses personnages. Mais j’ai tout de même trouvé cette lecture très intéressante pour la fenêtre qu’elle ouvre sur une période historique dont je ne connaissais rien et sur une culture dont on perçoit très vite que l’on n’a pas tous les codes. La fin du roman, et là où il se rapproche probablement le plus de la légende est à ce titre très troublant, célébrant un amour que l’on ne trouve pas dans nos mythes occidentaux.
Un livre que je ne recommanderais probablement pour ses qualités littéraires et stylistiques, il est peut-être un peu trop classique et un peu trop didactique pour cela, mais il s’agit d’une belle découverte, dépaysante et instructive (mes incursions récentes et répétées dans la littérature coréenne au cours de ces dernières semaines vont d’ailleurs assez unanimement dans ce sens), mais aussi un moment de lecture plaisant, dans un livre édité avec soin par les Ateliers du Cahier, avec une belle couverture épaisse dans un papier beige aux allures de vieux papier agréable autant à la vie qu’au toucher. Un bel écrin pour un classique contemporain de la littérature coréenne, dont nous avons la chance qu’il ait été traduit en français.

64raton-liseur
Okt. 25, 2022, 12:59 pm

Ce roman historique m’a amenée dans une époque et un lieu qui me sont bien étrangers, et ce fut un dépaysement complet. L’éditeur signale, sur la quatrième de couverture, que ce livre est « une version romancée de la fameuse légende d’Asadal de Baekje ». Hélas, malgré l’adjectif « fameux », je n’ai pas trouvé trace de cette légende lors de ma recherche rapide sur internet. Je ne sais donc pas ce qui est pris à la légende et ce que Hyun Jin-Geon y a mis.
Par contre, les lieux dont il est question, et même les deux pagodes qui sont le théâtre de ce livre existent bel et bien et sont considérées comme des trésors nationaux en Corée du Sud. Le temple de Bulguksase situe dans la ville de Gyeongju, appelée Seorabeol (prononcer Sorabol, avec l’accent méridional pour les « o ») au temps du royaume de Silla. Ce temple, dont le nom signifie « temple des terres de Bouddha » date au moins du VIème siècle. Il ne subsiste de l’époque du royaume de Silla que les structures en pierre, dont les deux pagodes Dabotap(« pagode des trésors abondants), toute en dentelle de pierre, et Seokgatap, d’un style plus épuré. On trouve aussi à quelques kilomètres la grotte de Seokguram(qui signifierait « temple du Bouddha de pierre »), qui fait écho à la statue de Bouddha dont il est question vers la fin du livre.
Des monuments aussi anciens que cela qui viennent jusqu’à nous, cela fait rêver… Et petite anecdote que j’ai découvert en lisant l’article de wikipédia, on a découvert en 1966 la faveur d’un vol raté les reliques que contenait la pagode Seokgatap. Et parmi ces reliques, on a trouvé ce qui pourrait bien être le plus ancien texte imprimé au monde que l’on connaisse, un texte bouddhiste imprimé à partir de blocs de bois, antérieur à la construction des deux pagodes que l’on situe aux alentours de 751, date de reconstruction du temple pendant la période du royaume de Silla. Hyun Jin-Geon ne connaissait bien sûr pas l’existence de ce texte.



(1) Pagode de Dabotap, haute de 10,4m
(2) Pagode de Seokgatap, haute de 8,2m
(3) Réplique du texte imprimé retrouvé dans les reliques de Seokgatap (751 ou antérieur)

65raton-liseur
Bearbeitet: Okt. 26, 2022, 9:22 am

97. 69. (-) La Lune de l'âpre neige de Waubgeshig Rice, traduit de l’anglais (Canada) par Antoine Chainas
Titre original : Moon of the Crusted Snow



‒ Quand des jeunes me rendent visite, j’entends parler de fin du monde. Ils disent que la civilisation s’effondre, que le courant ne reviendra pas, qu’on va tomber en panne d’essence et que plus personne ne viendra des régions du Sud. La nourriture s’épuise, on court un grand danger, c’est le… comment disent-ils ? L’apo… L’apoca…
Evan dévisagea sa vénérable interlocutrice.
‒ L’apocalypse ?
‒ Voilà, l’apocalypse ! Quel mot ridicule ! Je peux te dire qu’il n’y a pas d’équivalent en anichinabé. Et je n’ai jamais entendu de terme approchant dans la bouche des anciens.

(p. 203-204, Chapitre 22, Partie 2, “Biboon - Hiver”).

Je ne suis pas une grande lectrice de romans d’anticipation, mais j’ai toujours eu un petit faible pour les romans post-apocalyptiques. Celui-ci, écrit par un auteur d’origine amérindienne promettait d’être différent, alors je me suis facilement laissée tenter.
Dommage qu’il ne tienne pas ses promesses. Il se passe bien au Nord du Canada, dans une réserve Anichinabée, dont les membres, qui cherchent un équilibre entre modernité et tradition avec plus ou moins de succès, voient peu à peu les systèmes électriques et téléphoniques tomber en panne, et se retrouvent coupés du monde à l’orée de l’hiver. Ils mettent à peu prêt cent pages (sur les 300 que compte le bouquin) pour réaliser qu’une catastrophe a eu lieu et qu’ils ne peuvent compter que sur leurs propres ressources. Tout cela pourrait être intéressant, voir comment ce groupe humain, avec des caractéristiques que l’on ne voit guère explorées dans les romans de ce genre, va réagir, mais finalement, le récit n’est pas si original que cela et n’explore pas de façon assez franche les prémices qu’il s’est lui-même imposés.
Pire, l’auteur évite les moments cruciaux en faisant des bons dans le temps, bien commodes pour ne pas avoir à décrire ce qui se joue dans ces points de bascule, mais il n’évite pas les poncifs. Dans le style d’abord, avec quelques tics de langage, le plus flagrant étant que tous les personnages sont habillés d’un sweat à capuche (le T-shirt avec logo finit par disparaître au bout de 100 pages, quand les températures commencent à vraiment descendre, mais le sweat à capuche est un incontournable en toute saison). Dans les ressorts dramatiques aussi, avec le méchant venu de l’extérieur (c’est tellement plus commode), et puis un méchant qui est vraiment méchant, on ne fait pas les choses à moitié… Et puis je ne relèverai pas ici toutes les incohérences dans l’histoire elle-même.
Je suis donc déçue de cette lecture, je me suis empressée de finir ce livre pour pouvoir passer à autre chose, sans pouvoir me départir du sentiment qu’il avait manqué d’un bon éditeur pour pouvoir donner corps à l’idée de départ, qui était intéressante, mais qui est ici très mal exploitée (mais vêtue d’un sweat à capuche, ne l’oublions pas).

Merci aux éditions Les Arènes de m’avoir permis de découvrir ce livre dans le cadre de la masse critique de Babelio.

66raton-liseur
Okt. 25, 2022, 2:25 pm

Avec tous ces « netgalleys », et tous ces défis et groupes de lecture, je m’aperçois que cela fait bien longtemps que je ne me suis pas postée devant mes étagères en me disant, « bon, tiens, et qu’est-ce que je lis maintenant ? ».
J’ai l’impression d’avoir beaucoup lu « sur commande » ces deux ou trois derniers mois. Je ne m’en plains pas, c’est choisi, et puis même s’il y a eu quelques grosses déceptions, j’ai fait de très belles découvertes, mais j’ai l’impression de ne pas avoir eu le loisir de vagabonder librement d’un livre à l’autre.
C’est peut-être pour cela que, mon livre pour le défi Asie de ce mois-ci m’attendant toujours, j’ai décidé, sur un coup de tête, après la lecture de la note de labfs39, de lire Vigdis la farouche, de Sigrid Undset. Un livre qui n’est dans aucune de mes listes du moment (mais qui était sagement sur une étagère), et une envie soudaine et irrépressible de le lire…
J’ai l’impression de faire l’école buissonnière !



Détail du tableau Rêves, ou La Rêveuse (1896) de Vittorio Matteo Corcos.

67labfs39
Okt. 25, 2022, 4:50 pm

>66 raton-liseur: LOL, gotcha! I too am playing hooky from my assigned reading, but by reading a espionage thriller, not a Nobel Prize winning author.

>65 raton-liseur: Sorry you didn't like this one more. I liked it quite a bit, but in large part because I grew up in rural Maine and spent a lot of time further north at my grandparent's camp, which resembled Rice's setting.

>64 raton-liseur: Thanks for this sidebar. Interesting history, but I think I'll skip the book.

68Dilara86
Okt. 26, 2022, 3:23 am

>58 LolaWalser: Sembène was such a talented, multifaceted artist. I saw a special screening of La noire de... (which I guess is the original title of Black Girl) put on by the local Africa and Comores association at the cinema and we were all stunned when the lights came on again at the end.

>63 raton-liseur: That's pretty much what I thought of this book! My mum loved it though. Horses for courses...

>65 raton-liseur: Shame it's disappointing - I'd added this novel to my scribd queue: it sounded really promising!

69raton-liseur
Okt. 26, 2022, 5:48 am

>67 labfs39: You make me sound as an egghead! :)
I am not into espionage and thriller, but I do read enough young and teen literature to know it's great to indulge oneself with some easy-to-read books. And Vigdis is a great companion for playing hooky!

>68 Dilara86: Another recommandation for Sembène's films. I'll check what my public library has in store.
You've read La Pagode sans ombre, how funny! If you've not read his short stories, I would really recommand Un Jour de chance, I liked it a lot!

And regarding the Waubgeshig Rice book, I would really not recommand. The marketing is really well done, the book is promissing, but it was a real disappointement to me. However, I have seen some very positive readers reviews as well, so you migh like it after all and see what I was not able to see in this book.

70raton-liseur
Nov. 1, 2022, 9:37 am

98. 70. (38) Vigdis la farouche de Sigrid Undset, traduit du norvégien (Norvège) par M. Metzger
Titre original : Vigaljot og Vigdis
Titre en anglais : Gunnar's Daughter



J’ai découvert Sigrid Undset avec Kristin Lavransdatter, que l’on considère généralement comme son chef-d’œuvre. Et effectivement, mes lectures suivantes n’ont jamais été aussi intenses, et c’est le cas ici avec cette œuvre de jeunesse, qui selon certains préfigure d’ailleurs Kristin Lavransdatter. J’ai cependant pris beaucoup de plaisir à la lire. D’abord parce que je suis revenue sur les terres de Norvège à l’époque lointaine de la christianisation, ensuite parce que Vigdis a un tempérament tout aussi bien trempé que celui de Kristin. Ce sont aussi les mêmes forces qui façonnent leurs destins : l’amour, certes, mais aussi et peut-être surtout l’honneur et la fierté (le terme « farouche » du titre, jamais utilisé dans le texte, n’est pas usurpé!). Mais les parallèles s’arrêtent là, et Vigdis n’est pas une ébauche de Kristin, c’est bien un roman à lui tout seul. J’ai peut-être trouvé au début le style de Sigrid Undset un peu froid et distancié, mais soit qu’il se réchauffe soit que je m’y suis habituée, cette sensation s’est très vite estompée et j’ai suivi Vigdis sur les chemins de sa vie avec un immense plaisir de lectrice.
Un très bon moment de lecture, tant pour ceux qui connaissent déjà Sigrid Undset et veulent explorer son œuvre au-delà de ses grands succès que pour ceux qui ne la connaissent pas et que la longueur de Kristin Lavransdatter pourrait intimider.

71raton-liseur
Nov. 1, 2022, 9:44 am

J’ai tellement aimé Vigdis la farouche que j’ai eu du mal à trouver un livre pour lui succéder. J’ai lu le livre de Sigrid Undset en seulement deux ou trois jours, mais en en sortant, je n’avais aucune envie d’aller en Mongolie où ma dernière lecture prévue pour octobre devait m’emmener, ni même au Chili pour continuer mon exploration de Sepulveda ou en Corée pour lire un des livres prévus pour septembre que je n’avais pas lu.
Alors pour ne pas voyager vers un autre pays, j’ai continué à faire l’école buissonnière (voir >66 raton-liseur:) et j’ai entamé, encore sur un coup de tête, le recueil de nouvelles Axiomatique de Greg Egan. Un auteur de SF australien que M’sieur Raton a découvert il y a à peine six mois, mais dont il vient de finir le quatrième livre aujourd’hui ! Me voilà donc à découvrir de la « hard fiction », un sous-genre de SF dont je n’avais pas entendu parler il y a encore quelques mois...

72raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 1, 2022, 12:33 pm

99. -. (-) Shadow Life d’Ann Xu (dessin) et Hiromi Goto (scénario), traduit de l’anglais (Canada) par Marie-Paul Noël
Titre original : Shadow Life



Avec ce roman graphique, on fait la connaissance de Kumiko, une femme âgée qui, on le découvre petit à petit, est bien décidée à vivre selon ses propres termes et non selon ceux que la société impose habituellement à ceux de son âge. C’est une femme qui a du caractère cette Kumiko, et elle ne s’en laisse pas conter, même quand il s’agit d’acheter un aspirateur. Elle sait apprécier les petits bonheurs ou les petites victoires du quotidien (une séance de piscine, se faire réchauffer un paquet de nouilles lyophilisées pour le dîner…) et ne se cache pas les embarras de la vieillesse (un mal de dos le matin après une nuit sur un mauvais matelas, l’incontinence, les oublis épisodiques...). Cela donne un portrait très nuancé et, je crois, très juste, des premières années de la vieillesse, quand on en voit les effets sur soi-même mais que l’on est bien décidé à lutter pied à pied et à continuer à profiter de ce que la vie offre encore.
Dans une seconde partie, la mort se rapproche, au sens littéral du terme, et l’histoire prend alors un tour différent, plus tragique, et avec une dose de réalisme magique qui permet de dire certaines choses autrement difficiles à exprimer. J’ai peut-être moins aimé cette deuxième partie, pourtant plus rythmée et plus dramatique, mais l’impression générale qui se dégage de ce roman graphique est un grand respect et une grande tendresse pour le personnage principal, respects et tendresse que les autrices savent faire communiquer au lecteur.
Avec un scénario assez tenu et qui pourtant tient la longueur, avec un trait qui relève plus du manga que de la bd traditionnelle, un trait qui ne fait d’ombre ni à l’histoire ni au personnage, c’est un roman graphique sans grande prétention mais bien agréable que l’on peut lire ici, avec une joie de vivre douce-amère que j’ai bien appréciée.

73labfs39
Nov. 1, 2022, 12:51 pm

>70 raton-liseur: I'm glad you enjoyed Gunnar's Daughter. My review from the early 90s impacted someone in 2022. That's cool!

74raton-liseur
Nov. 1, 2022, 1:39 pm

>73 labfs39: Yes, indeed. Thanks for talking me into this read with your review. And keep on posting!

75raton-liseur
Nov. 1, 2022, 1:46 pm

100. -. (-) Automnal de Daniel Kraus (scénario) et Chris Shehan (dessin), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Philippe Touboul
Titre original : The Autumnal



Je n’aurais jamais lu cette bd si elle ne figurait pas dans la sélection d’un prix bd auquel j’ai l’intention de participer. Les films d’horreur, ce n’est pas mon truc, les livres d’horreur, ce n’est pas non plus mon truc, donc bien évidemment, les bd d’horreur, ça n’a pas de raison d’être mon truc. Mais il est parfois bon d’essayer de nouvelles choses, alors je me suis lancée.
La bd commence par une sorte de tangente, on n’entre pas dans le vif du sujet tout de suite, ce qui est une bonne façon de mettre le lecteur à la hauteur des personnages, et de faire monter la tension dans l’attente de quelque chose qui ne vient pas tout de suite. Mais une fois arrivés à Comfort Notch (l’entaille confortable, entaille au sens de l’entaille du bücheron dans le tronc d’un arbre, drôle de nom pour une ville) avec Kat et Syb, on sent tout de suite que quelque chose ne tourne pas rond. Une tragédie qui remonte à il y a quelques années, des habitants au comportement étrange, une propension à ratisser les feuilles mortes (ah oui, parce que ça se passe en automne bien sûr…), une espèce d’arbre particulièrement lucrative qui pousse ici et nulle part ailleurs, cela fait beaucoup pour une seule petite bourgade américaine. Et peu à peu, l’étau se resserre...
Le scénario m’a paru assez classique. J’y ai retrouvé des accents de Lovecraft notamment. Mais l’intérêt de cette bande dessinée réside principalement dans son traitement graphique, qui oscille entre des couleurs d’automne riches et chaudes et les mêmes couleurs qui se font tout à coup menaçantes et encerclantes.
J’ai peu de références dans le domaine, mais cette bande dessinée me paraît réussie. Je ne suis pas le public qu’elle vise, elle m’a mise mal à l’aise sans raison et d’habitude j’accepte qu’un bouquin me mette mal à l’aise, mais à condition que cela m’apprenne quelque chose, ici, mais c’est le genre qui veut cela, le fait de mettre mal à l’aise est une fin en soi et non un moyen. Et puis il n’y a qu’à voir, le lendemain de ma lecture, j’étais au volant de ma voiture et ça soufflait bien. Une petite feuille inoffensive aux jolies couleurs rouges et or s’est collée sur mon pare-brise et j’ai eu, littéralement, un mouvement de recul, avant de me reprendre et de sourire de moi-même. Une bd réussie, vous dis-je...

76raton-liseur
Nov. 1, 2022, 1:57 pm

October recap
A skippable post, mainly for personal reference

Another busy reading month, with quite an interesting diversity in terms of genres. I have not read the only book that was a firm reading plan, La fin du chant, for this month Asia book challenge because I decided to play hooky at the end of the month and chose books from no set lists. I’ll read it next month, though.
Press service has been less demanding this month as well (except the 800-page book I started the month with, only 2 catches this month, both because the rentrée littéraire frenzy has long lived and because after so many books received from netgalley, I think I am less inclined in placing requests.

I have also read quite a few graphic stories, and I have written my hundredth book review for this year. That's for the quantity aspect. In terms of quality, I read some great books, in particular Faire bientôt éclater la terre / Deep river by Karl Marlantes and Vigdis la farouche / Gunnar’s daughter by Sigrid Undset.

The degrowth goal: Read more owned books than bought.
This month, I have bought 3 physical new books, and no ebook. In the same time, I have read 3 owned physical books (all bought a couple of years ago) and 0 bought ebook. So I’m perfectly even.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have bought 29 physical new books and 1 ebook, while I have read 38 owned physical books and 2 bought ebooks.

The serene sobriety goal: Read an average of 4 to 6 books per month, no more.
7 proper books read this month, for a total of 70 since the beginning of the year. I will miss my target, except if I stop reading almost completely, which won’t happen!
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 70 proper books, while my annual total target is a maximum of 72 books.

The open-ended goals
Read global and diverse (i.e. books outside of France, UK and US).
Out of my 7 proper books for this month, 1 is French (a teen book, same as last month), 1 is from the UK and 1 from the US. The 4 others are from authors from Canada (a Native American writer), Senegal, Korea and Norway. A middly diverse month.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 24 books from French authors, 6 from UK authors and 5 from a US author. 35 books are from authors that are neither from France, UK or the US. France, UK and US account for exactly half of my readings, more than what I would have expected (especially with the Asia book challenge going on).

Read classics and forgotten classics, both European and non-European.
One classics this month, with L’Importance d’être constant / The importance of being Earnest, and two forgotten or less known ones : La Pagode sans ombre that seems to be considered as a classics in Korea and Vigdis la farouche / Gunnar’s daughter by the Nobel Prize winner Sigrid Undset in 1928.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I read 11 classics.

Read at least one book for each of my personal challenges.
Nothing new.
Cumulative totals: Unchanged. Since the beginning of the year, I have read 0 book for my Emile Zola personal challenge and 1 book for my Luis Sepúlveda personal challenge.

Read at least two books with more than 400 pages.
Faire bientôt éclater la terre is 800 pages in my electronic version, more than 600 in the hardcover paper version, so it definitely qualifies here.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 3 books with more than 400 pages.

Read at least one book directly in English.
Still nothing to report.
Cumulative totals: Nothing to report yet.

77raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 19, 2022, 6:06 am

~~~~~~~~ 🦝 ~ November ~ 🦝 ~~~~~~~~

November was not supposed to be a busy month in terms of short term reading commitments, as I am up to date on my press service books and I have only one book lined up for the Asia book challenge, plus the one for October that I have not read yet because I was busy playing hooky while choosing my next book to read... But (because there is a "but") well no, there are two…
First "but", I’ve decided to try to participate in a local graphic stories prize (see >78 raton-liseur: for the selection), so I’ll probably read a lot of graphic stories in the coming months. A good way to slow down on the « proper books » read and not to be completly outside of my serene sobriety goal ?
Second "but", as we are coming closer to the end of the year, there are some reading plans that are still pending and that I should try to honour. Reading a book in English is planned for December, with the Asia book challenge, but I have still not read any book in the Rougon-Macquart series and could do with another Sepúlveda for this year. And I would like to finish David Copperfield that I have started earlier this year for the Victorian tavern Q1(!) read along (which will become a read alone, obviously)…

November reading plans:
(Asian book challenge - Writers from Indo-China) La Fin du chant de Galsan Tschinag, traduit de l’allemand (Mongolie) par Dominique Petit et Françoise Toraille
(Asian book challenge - Writers from the Malay Archipelago) Po-on de Francisco Sionil José, traduit de l’anglais (Philippines) par Amina Saïd
(Geeks who love the Classics Q4 group read) La Mort d'Ivan Illitch de Léon Tolstoï, traduit du russe (Russie) par Michel-R. Hofmann

If times allows, I still have one Korean book that I really want to read but keep postponing...
(Asian book challenge - Writers from Korea) Voler! de Kim Jaeyeon, traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel

End-of-year (November and December) reading plans:
(Les Rougon-Macquart) (relecture) La Curée d’Emile Zola
(Victorian Tavern Q1 read along) David Copperfield de Charles Dickens, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Paul Lorain
(Luis Sepúlveda in extenso) (relecture) Un nom de torero de Luis Sepúlveda, traduit de l’espagnol (Chili) par ***

Note: This plan does not include the graphic stories, as I will read them over the coming four or five months, depending on the availability at the library.

78raton-liseur
Bearbeitet: Jan. 21, 2023, 1:30 pm

Je ne suis pas très prix littéraire, même si j’aime bien suivre quelques prix un peu obscurs. Le Prix Gens de merpar exemple, rien que pour son intitulé, ou bien le Prix Emile Guimet, parce qu’il est décerné par un de mes musées parisiens favoris… Mais ici, c’est un prix encore plus obscur dont il est question : Brrr !, le prix BD ado-adultes du réseau de bibliothèques de mon coin de campagne…
13 œuvres graphiques récentes ont été sélectionnées. Les usagers de la bibliothèque qui souhaitent participer doivent lire au moins 7 de ces œuvres, puis voter pour leurs trois préférées. Le prix a commencé en octobre et nous avons jusqu’à la fin du mois de février pour voter. Le gagnant du prix sera annoncé le 24 mars…
Et pendant toute ces périodes, les bibliothèques accueilleront différentes animations en lien avec les bd sélectionnées ou d’autres.

Voici donc la sélection :
Nettoyage à sec de Joris Mertens
Les grands cerfs de Gaétan Nocq, d'après le roman de Claudie Hunzinger
Tananarive de Mark Eacersall (scénario) et Sylvain Vallée (dessin)
(2023) Soul keeper, tome 1 de Tsutomu Takahashi, traduit du japonais (Japon) par Arnaud Takahashi
(2023) Mes mauvaises filles de Zelba
(2023) La république du crâne de Vincent Brugeas (scénario) et Ronan Toulhoat (dessin)
(2023) L'ogre lion, tome 1 : Le Lion barbare de Bessadi
Méridien d’Arnaud Le Gouëfflec (scénario) et Briac (dessin)
Automnal de Daniel Kraus (scénario) et Chris Shehan (dessin), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Philippe Touboul
Le petit frère de JeanLouis Tripp
Moon River de Fabcaro
Shadow life d’Hiromi Goto (scénario) et Ann Xu (dessin), traduit de l’anglais (Canada) pas Marie-Paule Noël
Et à la fin, ils meurent : la sale vérité sur les contes de fées de Lou Lubie

Cette sélection comprend beaucoup d’œuvres que je n’aurais probablement pas choisies spontanément dans les bacs de la bibliothèque, ce sera donc un bon exercice pour m’aider à étendre mon horizon de lecture.
Et pour ne rien gâcher, M’ni Raton a l’intention de participer. Je ne suis pas certaine qu’elle tienne la distance, mais elle a déjà commencé à lire quelques titres, et c’est amusant de pouvoir en discuter avec elle. Evidemment, nous n’avons pas les mêmes goûts, et nos votes n’iront très probablement pas dans la même direction, mais c’est tout l’intérêt de la chose !

79labfs39
Nov. 1, 2022, 4:53 pm

>77 raton-liseur: So much good reading happening here. I'm curious about the local graphic stories prize. Are you going to be a judge or are you following along? I know I'll probably be enticed by your reviews, but the books won't be translated or available through the libraries. I hate it when that happens! :0

80raton-liseur
Nov. 3, 2022, 12:23 pm

I know the frustration... I read a few reviews this year that were really enticing, and then found out the books were not translated. Grrr...

Regarding the prize, it's a readers prize, so anybody can participate (maybe as long as you have a library card I guess). You're right that most of the graphic stories are unlikely to be translated (yet). I read the two that are translated from English: Shadow life (see >72 raton-liseur:) and Automnal (see >75 raton-liseur:). I would not highly recommand them though.

81raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 4, 2022, 5:13 am

101. -. (-) Le Petit Frère de JeanLouis Tripp
Titre en anglais : non traduit



Il est difficile d’écrire une note de lecture pour une œuvre aussi personnelle quand on ne l’a pas vraiment appréciée. Parce que c’est une œuvre très personnelle, il n’y a pas de doute, et JeanLouis Tripp y a, c’est certain, mis beaucoup de lui-même. Pour être tout à fait honnête, je ne suis pas certaine que j’aurais lu ce roman graphique de mon propre chef s’il n’avait pas fait parti de la sélection du prix bd (très local et qui n’aura aucun impact sur la notoriété de la bd récompensée...) auquel j’ai décidé de participer. C’est assez à la mode en ce moment de faire des ouvrages sur un traumatisme que l’on a eu dans son enfance ou son adolescence, et je suis assez peu portée sur ces livres en général. JeanLouis Tripp explique en quelques mots à la fin du livre ce qui l’a amené à faire cette bd et je crois que je peux comprendre cette envie, finalement, tant de temps après, de partager, partager « l’histoire de la mort de [son] frère et de ce que ça [lui] a fait. »
Pourtant malgré cela, je n’ai pas été convaincue par ce récit graphique. Non pas pour lui-même je pense, mais en tant qu’œuvre littéraire. JeanLouis Tripp évoque les faits, il parle de l’accident qui a coûté la vie à son jeune frère et des conséquences que cela a eue sur les membres de sa famille. Mais il me semble qu’il n’a pas la distance nécessaire avec ces faits. Je les trouve justement trop bruts, pas assez mis à distance pour en faire quelque chose de partageable, quelque chose qui dépasse sa seule expérience et devienne partageable. J’ai trop eu la sensation que JeanLouis Tripp n’avait pas encore fait son deuil (plus de 45 ans après les faits) et qu’il nous livrait avant tout sa colère et ses sentiments à l’état brut.
Alors oui, j’ai eu le cœur serré en lisant ce livre, mais j’ai aussi éprouvé la sensation persistante de faire du voyeurisme dans une histoire qui ne me concernait pas. J’imagine que cette histoire de distance est aussi dans l’œil du lecteur, et je ne peux m’empêcher de penser que certains trouveront que cette distance est celle qu’il fallait, elle ne fonctionne pas pour moi mais peut fonctionner pour d’autres. A moins que le propos de ce livre soit de dire qu’on ne peut pas faire son deuil de telles tragédies, même au bout de 40 ans ? Et dans ce cas, le livre délivre son message avec force, et c’est tragique, il n’y a pas d’autre mot.

82Dilara86
Nov. 4, 2022, 5:15 am

>81 raton-liseur: C'est effectivement très délicat. Je ne suis pas fan non plus de ce genre de livre... (sinon, la "pierre de touche" nous envoie vers un livre de Mafalda :-D)

83raton-liseur
Nov. 4, 2022, 6:04 am

>82 Dilara86: Fixed!
I am not a fan usually, but some are great. On another personal subject, Ce n'est pas toi que j'attendais (having a daughter with Down syndrom) was a wonderful read. Fabien Toulmé did find the right distance to be able to make his experience sharable.

84raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 4, 2022, 1:00 pm

102. 71. (39) Axiomatique de Greg Egan, traduit de l'anglais (Australie) par Sylvie Denis, Francis Lustman, Quarante-Deux et Francis Valéry
Titre original : Axiomatic



Je ne m’attendais pas à apprécier autant ce recueil ! L’étiquette « hard science fiction » me faisait un peu peur, mais M’sieur Raton a découvert cet auteur il y a quelques mois, dans la mythique et regrettée émission La Méthode Scientifique sur France Culture (mythique pour M’sieur Raton en tout cas) et il a lu dans la foulée toutes les nouvelles disponibles en français et s’attaque maintenant aux romans. Il avait très envie que je lise aussi cet auteur, mais nous craignions un peu tous les deux le résultat… Et c’est un franc succès, j’ai aimé, beaucoup aimé. Probablement pas exactement pour les mêmes raisons que M’sieur Raton, mais cela faisait longtemps que lui ou moi n’avions pas découvert un auteur de science-fiction aussi intéressant, et encore moins un auteur que nous appréciions tous les deux en même temps !
Alors oui, le côté scientifique est moins prégnant que ce que je pensais, mais je ne peux pas nier qu’il existe. Avoir une petite idée dans au moins un ou deux des domaines que Greg Egan aborde aide sans conteste à la compréhension et au plaisir de lire ces nouvelles. Mais ce qui est important est ce qu’il fait à l’intérieur de cette gangue scientifique dans laquelle il insère ses nouvelles. Et là il y a beaucoup à dire.
Une des obsessions de Greg Egan est manifestement la notion d’identité : qu’est-ce qui fait que je suis moi, mon cerveau et ses connexions neuronales suffit-il à me définir, est-il possible de répliquer ce cerveau et ce serait toujours moi, ... ? La question a des ramifications sans fin que Greg Egan ne se lasse pas d’explorer, trouvant à chaque fois des scénarios originaux, qui renouvellent le regard que l’on peut poser sur ces questions.
Et puis j’ai beaucoup aimé la façon dont, dans un certain nombre de nouvelles, il associe deux thématiques scientifiques qui a priori n’ont rien à voir ensemble. Comme dans cette nouvelle, une de mes préférées de ce recueil, Vers les ténèbres, qui joue avec l’idée des trous de ver mais qui parle surtout de lois de probabilités, et plus exactement des probabilités conditionnelles, un sujet que j’ai toujours trouvé vertigineux, et j’ai retrouvé ce vertige dans les mots du Coureur qui nous narre cette histoire, navigant entre la rationalité d’un calcul mathématique que l’on sait juste et la sensation du hasard et de la coïncidence qu’on ne peut s’empêcher de ressentir. Bon d’accord, tout le monde n’a peut-être pas ressenti ce vertige des probabilités conditionnelles, mais il y a d’autres choses dans ce recueil.
Il y a des réflexions sur l’eugénisme et jusqu’où on est prêt à aller, hein Eugène ! Il y a aussi des réflexions sur les murs que l’on est prêt à construire pour se protéger de l’autre, pour se positionner au-dessus de l’autre, et rien de tel que des Douves pour cela. Il y a des nouvelles d’une immense tristesse, ou plutôt d’une immense solitude, d’une immense détresse même parfois, comme le Coffre-fort ou Lumière des événements. Et il y a de plus dans tout cela pour quelques piques bien acerbes contre notre monde actuel, parce que ne l’oublions pas, la meilleure science fiction est souvent celle qui nous parle de nous, et celle de Greg Egan, si elle est très étayée scientifiquement, nous parle surtout de nous et de notre société, et aide à porter un regard nouveau et stimulant sur des sujets qui peuvent parfois sembler rébarbatifs.
Une belle découverte pour moi, assez inattendue je crois, ce qui ne l’en rend que plus belle.

85labfs39
Nov. 4, 2022, 6:13 pm

>81 raton-liseur: I do find it hard to relate to author's experiences which are so incredibly personal and immediate that I find no way in as a reader. Some distance seems to be required to make them relatable.

>84 raton-liseur: Wonderful review!

86raton-liseur
Nov. 5, 2022, 5:29 am

>85 labfs39: But you do like testimonies (maybe it's too strong a word, but "account" does not seem powerful enough), such as Grass/Les Mauvaise herbes or From the land of green ghosts/Une odyssée birmane. So this question of distance is interesting, and in all its dimensions: physical (both books I have mentionned are from another continent for both of us, does it make it easier to read?), time (we read so much accounts from war times and we do appreciate them) and then the distance the author takes from his personal story and experience.
I'm just thinking out loud here, so it's not well structured and it's not deep thoughts, but hey, here they are.

(And the Goncourt Prize, the most renowned French prize, has just been awared to a writter who talks about the death of her husband 20 years ago in a moto accident. So when I'm talking about a trend...)

Thanks for the Egan review. It was a really different read from my usual ones, and a very enjoyable experience!

87labfs39
Nov. 5, 2022, 8:05 am

>86 raton-liseur: I do like all things historical, including memoirs, and simply the fact that they are set in a larger historical context makes them less personal, I think. The type of story I have a harder time with is when the author zooms in to something that happened to them and no other without any philosophizing about the larger meaning. It seemed like Tripp's book was this latter type. His experience with his brother's death without it being part of a larger history or trend and without reflection on what a sibling's death means. Without context or meaning, it would be like reading someone's instagram account of what they ate every day. Even if what they ate was especially delicious or especially atrocious, I'm not interested.

88raton-liseur
Nov. 6, 2022, 11:37 am

>87 labfs39: You are absolutely right, there is a big difference depending on how the author's experience resonates or not with the historical context, but it struck me how important that can be when we approach a book (at least for non fiction books).
It seems that the historical background does provide a more evident "justification" (not sure that's the right word to use here) to share a personal experience. If you do not have this historical background, it becomes trickier. The point you make on without reflection on what a sibling's death means is the part that is problematic, as I guess some readers will find that he touched this point (and yes, he did, but not to the level I was expecting) when others won't, and I tend to feel that expectations for a book relating a personal experience and more varied (and therefore how the book is perceived is more varied) than from memoirs grounded in an historical context.

89raton-liseur
Nov. 10, 2022, 3:45 am

103. -. (-) Nouvelles histoires pressées de Bernard Friot
Titre en anglais : le recueil n’a pas été traduit, mais une ou peut-être plus de nouvelles ont été publiées de façon indépendantes, par exemple Worms, qui reprend la nouvelle intitulée« Asticot »



Bernard Friot, je crois que tous les élèves de ces dix dernières années y sont passés à un moment ou à un autre de leur scolarité, et moi-même je ne me suis pas gênée pour glaner des séances de lecture dans ses pages, séances de lecture auxquelles j’ai pris beaucoup de plaisir (j’espère que mes élèves aussi !). J’étais donc curieuse d’enfin lire un recueil en entier et non des nouvelles, oh pardon des histoires pressées, sélectionnées ici ou là pour leur sel particulier. J’ai retrouvé dans ce recueil des histoires qui sont parmi mes favorites, Le Martien bien sûr, ou bien Façons de parler (une superbe façon d’introduire une leçon sur les registres de langue, ça marche à tous les coups !), mais aussi des histoires que je ne connaissais pas.
Bernard Friot aime les histoires à chute, et il y en a beaucoup dans ce recueil. Il aime jouer avec le lecteur, le surprendre, et il ne s’en prive pas. Mais je me suis retrouvée dans un univers plus noir, ou du moins plus inquiétant que ce à quoi je m’attendais. Toutes les chutes ne font pas rire ou sourire comme celles que j’aime en général étudier. Il y a aussi beaucoup d’histoires qui parlent du manque d’amour des parents, ou de leur absence, et certaines sont pleines d’une grande mélancolie. C’est donc un recueil qui n’est probablement pas à étudier dans son intégralité, ou en tout cas pas dans n’importe quelle classe. Je garderai pour ma part les nouvelles qui jouent avec les codes des contes pour enfants, c’est en jouant avec, en s’en amusant et en prenant conscience que c’est drôle de jouer avec qu’on les comprend vraiment (il y a par exemple « Suite et fin », qui ironiquement introduit le récit) ; je garderai aussi les nouvelles à chutes, dont j’ai déjà parlé plus haut. Une livre intéressant, des histoires variées et pleines d’enseignement, mais à utiliser avec discernement donc.

90raton-liseur
Nov. 10, 2022, 4:56 am

Je ne lis pas ce titre dans le cadre du prix de la bd auquel je participe, en tout cas pas directement. Ce titre n'est pas sélectionné, car il date de 2017. Mais la dessinatrice est du coin et fera quelques animations dans le cadre de ce prix.

104. -. (-) Bleu Pétrole de Gwénola Morizur (scénario) et Fanny Montgermont (dessin)
Titre en anglais : non traduit



Avec un tel titre, une telle couverture et de telles autrices, je ne m’attendais pas à ça comme bd… Je pensais trouver un récit de la catastrophe de l’Amoco Cadiz mais si l’Amoco Cadiz est bien là, ce n’est pas à mon avis le sujet de cette histoire. Le personnage autour de qui gravite cette histoire, c’est Léon Larze, un paysan plein d’énergie et d’envie de changer les choses autour de lui qui se retrouve maire de son village, sur la côte Nord du Finistère. Léon Larze, un personnage inspiré d’Alphonse Arzel (la proximité sonore n’est pas fortuite), le maire qui a été à la tête du combat juridique de 14 ans contre la Standard Oil, l’armateur de l’Amoco, un combat victorieux, une date importante pour la cause écologiste.
Et si Léon Larze est le pivot de l’histoire, c’est parce que le sujet principal de cette bande dessinée est sa famille, et l’impact de son combat, et plus largement de son engagement politique, sur cette famille. Alphone Arzel avait une femme et cinq enfants, Gwénola Morizur a donné à son personnage une femme et trois enfants, qui sont comme des condensés des cinq de la vraie vie. Et on a l’impression que plus Léon Larze s’investit, plus sa femme doit prendre en charge la ferme et la famille ; on a l’impression qu’il passe aussi un peu à côté de ses enfants, même s’il les aime. Et on voit comment chacun dans la famille réagit à la tragédie de l’Amoco Cadiz, ceux qui étaient loin et ont du mal à réaliser, ceux qui décident de se battre envers et contre tout, y consacrant leur vie et parfois celle de leurs proches, ceux qui font face dans le quotidien.
C’est un très beau sujet, mais il faut être prêt à ne pas lire l’épopée de l’Amoco Cadiz. Et puis je trouve que ce livre est un peu trop superficiel. Le sujet n’est pas simple, mais il est ici traité sur une très longue durée en finalement peu de pages, ce qui fait que tout est suggéré plutôt que dit véritablement, et cela m’a un peu gênée. Et puis quand on lit les informations fournies à la fin sur la famille de l’autrice, la famille d’Alphonse Arzel, on se rend compte que sa femme était beaucoup moins effacée qu’elle n’est présentée dans le livre. J’imagine que cela sert le propos, mais je trouve cela un peu dommage.
Je sais que le dessin, avec ses traits assez nets et ses couleurs un peu passées, ne fait pas l’unanimité, mais j’ai bien aimé cette douceur pour traiter d’un sujet finalement très domestique. Ces images m’ont rappelé les bd de la revue que je lisais en étant ado, les bd de Tito. Rien de révolutionnaire donc, peut-être, mais un aspect familier qui me semble bien se marier avec le sujet.
En définitive, c’est une bande dessinée qui n’est pas sur le sujet auquel on s’attend, et c’est une bande dessinée dont le scénario me paraît trop lâche pour répondre aux attentes du lecteur. Ce n’est donc pour moi pas une réussite, malgré plusieurs belles planches. Et je ne peux m’empêcher, en refermant cette bd, de me demander ce qu’Alphonse Arzel en a pensé quand sa petite-fille la lui a fait lire. S’est-il rendu compte des répercussions de ses choix de vie sur sa famille ? Le savait-il et en était-il triste, ou faisait-il semblant de l’ignorer, ou encore n’a-t-il rien vu ? Nous ne le saurons pas, et cela ne nous regarde probablement pas, mais cette bande dessinée pose beaucoup de questions, notamment ce qu’est une famille, et ce que les choix personnels signifient pour ceux qui nous entoure. Une interrogation qui va bien au-delà de l’histoire de l’Amoco Cadiz.

91raton-liseur
Nov. 10, 2022, 5:04 am

Deux images tirées de la bd, en lien direct avec la catastrophe.



La narratrice de l'histoire, que l'on voit sur ces deux images s'appelle Bleu. Et la mer est couleur pétrole, plus noire que bleue.

92raton-liseur
Bearbeitet: Nov. 10, 2022, 6:17 am

Avec cette note de lecture, j’atteins les 72 « vrais livres », qui était le maximum que je m’étais fixé pour cette année. Qu’est-ce que je fais maintenant, j’arrête de lire ?

105. 72. (40) The Wonderful wizard of Oz de Lyman Frank Baum
Titre en français : Le Magicien d’Oz



Le Magicien d’Oz… Je connais la chanson, je connais les principaux personnages, mais c’est tout, je n’avais jamais lu le livre, ni vu plus que quelques extraits du film. Il était donc temps, surtout que je voulais absolument lire le livre avant de regarder peut-être le film avec les enfants (quoique… un film en noir et blanc, la perspective n’a pas l’air de les enchanter…).
Et voilà qu’enfin je l’ai lu. Un conte classique du XIXème siècle (de la toute fin, puisqu’il est publié en 1900, et c’est bien encore le XIXème siècle), avec de jolis personnages : une petite fille toute gentillette et toute jolie, mais qui a un caractère bien trempé et qui sait ce qu’elle veut, et bien sûr, ses trois compères, l’épouvantail qui veut un cerveau, le bûcheron de métal qui veut un coeur et le lion peureux qui veut du courage.
Et c’est là que l’on découvre que l’épouvantail est plus intelligent qu’il ne croit, que le bûcheron de métal est d’une gentillesse dont il n’a pas conscience, et que le lion est d’un beau courage. Par contre, le magicien d’Oz, lui, n’est pas aussi magicien qu’on le croyait
Beaucoup de choses classiques, comme les belles descriptions, les grands périls qui se résolvent si facilement (ah, comment venir à bout de la Méchante Sorcière de l’Ouest !…). Mais aussi des choses qui m’ont surprise, notamment beaucoup d’entraide, avec chacun qui met ses talents (connus ou insoupçonnés) au service du groupe. Cela donne un joli conte, que j’ai pris plaisir à découvrir.

93raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 14, 2022, 10:16 am

It’s been a long time since I have posted on my thread, which means a delay of one month and 15 reviews… So it’s time to o something about this situation and start again writing and posting. So with no further ado, the review for the Asia book challenge in November, with a book from the Philippines.

106. 73. (41) Po-on de Francisco Sionil José, traduit de l’anglais (Philippines) par Amina Saïd
Titre original : Po-on ou Dusk



Je n’ai aucune idée de comment j’ai découvert et acheté ce livre probablement plus ou moins au moment de sa parution. Et je n’ai aucune idée de pourquoi j’ai mis tout ce temps à le lire… Enfin si, il était gros et n’était jamais dans les cartons des déménagements de ces dernières années. Mais maintenant que je l’ai lu, je me sens prête à lire les suivants dans cette série. Car il s’agit d’une série de cinq livres qui retrace, à travers l’histoire d’une famille, l’histoire des Philippines au cours des deux derniers siècles.
Po-on est le premier volume au sens chronologique de l’histoire, mais pas de la publication, c’est même le dernier que Francisco Sionil José a écrit et, d’après ce qu’il écrit dans la postface, un des plus difficiles à écrire. Peut-être à cause de la distance historique, ou peut-être parce que c’est à ce moment que l’auteur place la naissance de cette famille qui lui tient tant à cœur, les Rosales. Et tout commence avec Eustaquio, un jeune enfant qui bénéficie d’une éducation poussée grâce à la sollicitude d’un père jésuite, mais qui ne pourra entrer dans les ordres et suivre la voie toute tracée d’une ascension sociale limitée mais désirée. Mais Eustaquio sera un paysan, comme ses parents et comme ses frères, et il le sera dans un nouveau village, arraché à la forêt luxuriante. Il sera aussi le chef officieux du village, et il sera le guérisseur, se partageant entre sa famille et sa communauté, et s’écartelant entre les traditions qu’il a toujours connues et les croyances auxquelles il a été initiées. Mais nous sommes encore au temps de la domination espagnole, et c’est aussi une question d’allégeance.
C’est tous ces tiraillements que Francisco Sionil José met en scène dans ce roman, celui d’un homme et celui d’un peuple aussi, un peuple qui cherche sa voie et qui cherche son indépendance. Le roman ne finit pas bien, parce qu’après la colonisation espagnole, c’est celle des Etats-Unis qui se met en place, mais c’est aussi un livre d’espoir, un livre sur le chemin. Le chemin qu’un homme doit faire pour apprendre à être lui-même, et en parallèle le chemin qu’un peuple doit faire pour trouver sa voix.
Un livre très intéressant, probablement le premier roman philippin que je lis, qui m’a beaucoup appris sur l’histoire des Philippines au XIXème siècle, que j’ignorais encore plus que je ne le pensais. Mais un livre intéressant aussi pour les portraits qu’il brosse, diversifiés dans leurs origines ethniques et sociales, dans leurs parcours et leurs opinions, à l’image de la société philippine dont Francisco Sionil José veut rendre compte, et surtout, au centre de cette histoire, le portrait tout en nuances, en contradictions peut-être même parfois, d’Eustaquio, cet homme à la croisée de plusieurs mondes qui incarne, probablement à son corps défendant, les Philippines en construction, une nation en devenir dont ce livre illustre les premiers pas.

94raton-liseur
Dez. 14, 2022, 11:34 am

107. -. (-) Moon River de Fabcaro
Titre en anglais : non traduit



C’est sûr, c’est bien, parfois, de sortir de sa zone de confort, mais c’est bien d’y rester aussi parfois. Parce que là, c’était trop loin de cette fameuse zone pour moi. L’idée n’est pas mauvaise, un pastiche des films américains de série B en noir et blanc, et puis on rajoute dessus un peu de mise en abyme avec l’auteur de la BD qui met en scène son propre processus de création, et tout cela avec un humour bien potache.
Et pour moi, c’est l’humour potache qui est en trop… La grossièreté gratuite, ça ne me fait pas rire, et les blagues un peu trop au ras des pâquerettes non plus. Mais P’tit Raton a ri à gorge déployée (probablement parce qu’elle savait que je savais ce qu’elle lisait et qu’elle a aimé rire de tous les gros mots qu’elle n’a pas le droit de dire - en ma présence, bien sûr, je ne suis pas naïve…).
Difficile pour moi de donner une opinion informée sur cette BD. Pas pour moi, c’est sur, mais je ne vois pas trop ce qu’elle cherche à faire, où est-ce qu’elle veut aller. C’est drôle, mais pour d’autres, peut-être est-ce autre chose aussi, mais pas pour moi.

95labfs39
Dez. 14, 2022, 11:58 am

>93 raton-liseur: Wonderful review. Into the tickler file it goes.

96raton-liseur
Dez. 17, 2022, 8:55 am

>95 labfs39: I'm glad this book made it into your tickler file, I hope I'll like it if you read it.
And I love how this tickler file sounds! (I prefer it to book bullets, I've never been a supporter of bullets, even when they are books ;)

97raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 17, 2022, 9:17 am

108. 74. (42) La Mort d'Ivan Illitch, suivi de Maître et serviteur et Trois morts de Léon Tolstoï, traduit du russe (Russie) par Michel-R. Hofmann, Boris de Schloezer et J.W. Bienstock
Titre original des deux principales nouvelles : Смерть Ивана Ильича et Хозяин и работник
Titre en anglais des deux principales nouvelles : The Death of Ivan Ilych et Master and Man



En effet, Caius est mortel. Il faut qu’il meure. C’est la loi. Mais moi, moi, Vania, moi, Ivan Illitch, avec toutes mes pensées, toutes mes sensations, n’est-ce pas autre chose ? Il est impossible que je doive mourir. Ce serait trop affreux !
(p. 57, Chapitre 6).

« Qu’est-ce que cela signifie ?… Pourquoi ?… Ce n’est pas possible !… Il ne se peut que la vie soit aussi laide, stupide !… Et, si elle l’est vraiment, à quoi bon mourir, à quoi bon mourir dans les affres ?… Il y a là quelque chose qui ne va pas.
« Peut-être n’ai-je pas vécu comme je devais vivre ? Se demanda-t-il soudain… Allons donc, j’ai fait tout ce que j’avais à faire ! » répliqua-t-il aussitôt, chassant l’unique, mais impossible solution du problème de la vie et de la mort.

(p. 80, Chapitre 9).

La quatrième de couverture était un peu racoleuse, non ? Promettant six morts le livre. Et c’est bien ce que l’on a avec ces trois nouvelles, qui vont en quelque sorte crescendo : elles sont de plus en plus courtes, mais elles contiennent de plus en plus de morts…
Alors certes, on en a pour son argent, on a bien les six morts promises, mais à la mode Tolstoï. J’ai décidé de ne pas les lire dans l’ordre choisi par l’éditeur, mais dans l’ordre chronologique, commençant par « Trois morts », une courte nouvelle écrite en 1859, qui dans une construction très classique, oppose la mort d’une bourgeoise qui n’a guère vécu et redoute la mort et celle d’un vieil ouvrier qui, après une vie de labeur, sait qu’il est temps de retourner à la source. C’est le Tolstoï un brin païen que l’on trouve ici, écrivant d’une plume classique et un peu convenue.
Puis vient « La Mort d’Ivan Illitch », une longue nouvelle publiée en 1856, le clou de ce livre, et pour cause. Ici, pas d’opposition, Ivan Illitch est le centre unique de cette nouvelle. Tout commence par l’annonce de sa mort dans les journaux et la réaction de ses collègues, petits fonctionnaires comme lui, et tout de suite le ton est donné. Puis dans un long retour en arrière, Tolstoï déroule toute la vie d’Ivan Illitch. Sa jeunesse, ses premières réussites professionnelles et personnelles puis, très rapidement, la découverte de sa maladie et sa longue agonie. Une agonie physique, certes, mais surtout un temps qui lui est donné pour examiner sa vie sous un jour nouveau. J’ai compati avec ce personnage qui vit la vie que la société lui a tracée, qui fait les choix que la société attend de lui, et qui pourtant s’aperçoit de la vacuité de son existence et de l’artificialité des relations qu’il a nouées avec ceux qui l’entourent, que ce soient ses collègues, ses amis et même sa famille. Difficile, malgré tout ce qui nous sépare, de ne pas réfléchir à sa propre vie et au sens qu’elle peut avoir, se demander l’intérêt de se conformer aux attentes extérieures, de jouer le rôle que l’on s’attend à nous voir jouer, ou bien faut-il ruer dans les brancards pour, à la fin, avoir la sensation d’avoir existé ?
J’extrapole peut-être un peu trop par rapport aux propos de Tolstoï et au message qu’il veut transmettre, mais probablement pas tant que cela. Cette longue nouvelle, écrite avec une plume souvent pleine d’acide (le responsable de cette édition, Dominique Fache, parle de « réalisme cruel », un terme qui me semble tout à fait adapté), est à la fois une critique sociale, comme beaucoup des œuvres de Tolstoï, mais aussi une réflexion sur l’angoisse de la mort, qui semble n’avoir jamais quitté Tolstoï, comme une des réponses à cette terrible phrase écrite dans une lettre datant de 1860, « Quand on réfléchit que la mort est la fin de tout, il n’y a rien de pire que la vie. »
Et la troisième nouvelle de ce recueil, dans l’ordre chronologique, est célèbre elle aussi, puisqu’il s’agit de Maître et Serviteur, paru en 1895. Ici, comme dans Trois Morts, ce sont deux personnages qui s’opposent, leur classe sociale déterminant leur vision de la vie et de la mort. Une belle parabole, que j’avais bien aimée lors d’une lecture précédente, mais peut-être un peu trop manichéenne à mon goût, et qui n’a pas la force de La Mort d’Ivan Illitch.

En conclusion, voici un recueil intéressant parce qu’il permet de se rendre compte de comment Tolstoï, au cours de trente années importantes du point de vue de sa production littéraire, revisite un même thème, entre obsession personnelle et maîtrise stylistique croissante. La nouvelle-titre est celle que j’ai préférée (et ça tombe bien, c’est pour elle que j’ai entrepris cette lecture!), mais je suis bien consciente qu’il s’agit là d’une préférence toute personnelle.

98raton-liseur
Dez. 17, 2022, 9:13 am

La couverture de mon édition de La Mort d’Ivan Illitch est un détail d’un tableau du peintre russe Ivan Kramskoï, intitulé Chagrin inconsolable. On y voit une femme, de toute évidence bourgeoise, profondément affectée par la mort d’un proche, que l’on devine à tous les objets liés au deuil qui l’entourent. Ce tableau a été peint à la suite de la mort du fils de l’artiste, et la femme représentée est très probablement sa femme, la mère de ce fils perdu. Le tableau fait plus de 2 mètres de haut et représente donc le personnage en taille réelle. Il doit être assez impressionnant et exprime effectivement le chagrin et la tristesse face à la mort d’un proche, ce qui ne représente pas de façon vraiment fiable le contenu du livre où la mort d’un proche semble souvent plus une obligation sociale désagréable, un accroc dans le bon déroulé de la saison, plutôt qu’un événement personnel douloureux, et encore moins insurmontable...

99labfs39
Dez. 18, 2022, 8:32 am

>97 raton-liseur: Fantastic review! I've been meaning to reread Death of Ivan Ilych, but now when I do, I might seek out your edition so I can read the other two stories as well.

>98 raton-liseur: Thanks for this too.

100raton-liseur
Dez. 18, 2022, 11:14 am

>99 labfs39: La Mort d'Ivan Illitch/Death of Ivan Ilych is a great book on its own, but the larger perspective made the reading even better. It made a lasting impression on me.

101raton-liseur
Dez. 18, 2022, 11:15 am

109. -. (-) Le Peuple du chemin de Marion Achard
Titre en anglais : non traduit



Un livre pour enfants soutenu par Amnesty International, et basé sur un reportage d’Anne Sibran (reportage qui a donné lieu à un création radiophonique sur France Culture que j’avais beaucoup aimé, Le Cercle sauvage je crois), voilà deux bonnes raisons (et une m’aurait suffi) pour emprunter ce livre qui était sur les étagères de la classe.
Je ne connaissais pas Marion Achard, mais j’ai beaucoup aimé ce qu’elle a réussi à faire dans ce livre, en essayant de nous faire ressentir ce qu’une fille vivant depuis toujours en autarcie dans la forêt amazonienne pouvait ressentir lorsqu’elle entre en contact avec le monde moderne (une expression que j’emploie faute de mieux, cette fille aussi est moderne puisqu’elle vit aujourd’hui, c’est juste une modernité bien différente de la nôtre, une différence rendant la cohabitation impossible). L’incrédulité est bien rendue, le langage qui nous fait bien comprendre cette incompréhension…
C’est une histoire dure, mais pourtant moins dure que la réalité, car dans la réalité, les deux petites filles rescapées du massacre de leur tribu n’ont subi que déchirement et aliénation. Marion Achard a su trouver le bon équilibre entre ménager ses jeunes lecteurs (des lecteurs de 9 à 12 ans je dirais) et ne pas cacher la réalité. La question des peuples premiers d’Amazonie n’est plus vraiment à la mode, bien que la déforestation continue encore et encore, et ce livre rappelle donc des vérités difficiles à entendre, et les met à la hauteur des jeunes lecteurs, pour leur faire découvrir ce qu’il se passe loin de chez nous, mais qu’on ne peut ignorer.

102labfs39
Dez. 18, 2022, 8:46 pm

>101 raton-liseur: That sounds very interesting, if sad. My niece and I have been studying South America lately and the Amazon is a big part of that. She feels very strongly about protecting trees (it was her wish that we vote for people in our most recent election who would not cut down trees! - she's six), so it has been hard for her to read even picture books that talk about deforestation. One interesting fact we read was that there are over 300 extant Amazonian languages!

103raton-liseur
Dez. 19, 2022, 9:22 am

>102 labfs39: So nice from your niece. It gives some hope in the future, if it's not too late for her generation to act.
As I said, unfortunately, I feel that the issues around the Amazonian forest are not very high on the agenda here, but it might change with the coming change of government in Brazil.
The more I think about it, the more I feel I should try to read this book to my school students. I wonder how they will react.

104raton-liseur
Dez. 19, 2022, 9:23 am

110. 75. (43) Les Bohémiens des vendanges de John Steinbeck, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean-François Chaix
Titre original : The Harvest Gypsies



Cela fait longtemps que je veux lire ce livre, depuis que je l’ai repéré dans la première collection de ce qu’étaient alors les livres à 10 francs des éditions des mille et unes nuits, mais il a été vite épuisé et je suis donc contente de l’avoir enfin trouvé d’occasion. Il s’agit en fait d’articles que Steinbeck a fait paraître dans un journal, le San Francisco News, en 1936. Fruit d’une enquête en Californie auprès des paysans jetés sur les routes après la grande sécheresse de 1934 dans le Middle West américain, connue sous le nom de Dust Bowl à cause de la poussière soulevée par les vents incessants parcourant les terres desséchées et nues des exploitations agricoles ruinées.
Ce que Steinbeck a vu pendant ce reportage lui donnera l’idée et la matière pour écrire Les Raisins de la colère, publié quelques années plus tard, en 1939 (et qu’il va maintenant falloir que je lise, enfin !). Ces paysans qui ont migré parce qu’ils ont tout perdu et qui, arrivés en Californie, perdent encore plus. Steinbeck décrit la mécanique de la perte de la dignité, de la déchéance inéluctable, à cause de la façon dont le secteur est organisé et dont les aides sociales (ou leur absence) sont dispensées. Steinbeck n’hésite pas à plaider pour un état mieux organisé, pour une meilleure prise en compte de la réalité, par de l’humanité et un peu plus de bon sens et de bonne volonté.
Ce qui est décrit fait parfois penser à ce qu’on lit sur le système latifundiste d’Amérique du Sud, et on n’en est effectivement pas loin, les mêmes mécanismes sont à l’œuvre. C’est intéressant de voir que les mêmes causes aboutissent aux mêmes conséquences, c’est le système qui est pourri, pas les hommes qui le subissent.
Un livre qui parle d’un autre temps, donc, mais qui montre la plume efficace de Steinbeck et son œil qui sait donner du sens à ce qu’il observe, et qui décrit des mécanismes économiques et sociaux qui ne diffèrent pas de ceux que l’on peut voir à l’œuvre aujourd’hui. Intéressant, et triste aussi quand on se dit que, si la forme a changé, le fond, lui est toujours là presque cent ans plus tard. Un livre à conseiller principalement aux inconditionnels de Steinbeck, les autres pourront commencer par ses ouvrages plus connus avant de devenir des inconditionnels à leur tour.

105labfs39
Dez. 19, 2022, 4:03 pm

>104 raton-liseur: Not one I had heard of

106raton-liseur
Dez. 21, 2022, 1:55 pm

>105 labfs39: It's worth the read, maybe mainly for completists though.

107raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 22, 2022, 5:42 am

At the end of November, I have entered in a Classics reading spree, partly due to P'tit Raton school assignments, as I have decided to read along some books with him. And this led me (but not him...) to other books. Starting with a book from one of the most prominent philosophers from the Lumières.

111. 76. (-) Candide, ou l’optimisme de Voltaire
Titre en anglais : Candide



Ça y est, P’tit Raton commence à entrer dans ces années où il doit lire des livres du patrimoine, en se demandant parfois pourquoi on lui demande de les lire. Pour moi, c’est l’occasion de lire ou de relire certains de ces classiques et d’y prendre plus ou moins de plaisir selon les cas. Candide, donc… que j’ai lu plus ou moins à l’âge de P’tit Raton et dont j’avais aimé l’irrévérence, mais que j’avais trouvé un peu long.
C’est un peu le même sentiment aujourd’hui. J’y ai probablement vu plus e choses, notamment tous un tas de sous-entendus et des petites piques lancées à divers puissants de ce monde qui m’avaient échappées à l’époque. Mais il faut bien avouer que la thèse de Voltaire est vite exposée, et que la charge contre la philosophie de Leibnitz est un peu lourde et répétitive. Heureusement, quelques digressions comme la visite de l’El Dorado sont les bienvenues pour enrichir le propos et renouveler l’intérêt du livre, et bien sûr, la phrase de la fin, qui reste tout de même un brin obscure, mais quand même pleine d’un sage espoir, « il faut cultiver son jardin ».
Une relecture intéressante et riche, donc, pour me remettre en tête un classique des Lumières. Il a vieilli, certes, mais seulement dans la forme, car le fond, lui, reste suffisamment d’actualité pour nourrir une réflexion actuelle et personnelle.

108raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 22, 2022, 10:19 am

112. 77. (-) Une Vie de Guy de Maupassant
Titre en anglais : A Woman’s Life ou A Life : The Humble Truth



Une Vie, le premier roman de Maupassant, publié en 1883, deux ans avant le succès que sera Bel-Ami, conte la vie de Jeanne, une petite aristocrate de province, depuis sa sortie du couvent jusqu’aux premières années de sa vieillesse. Jeanne est une jeune fille pure et pleine d’espoir. Elle voit la vie s’ouvrir devant elle, rêve d’amour et de mariage (ce qui est la même chose à ses yeux), image une vie de bonheurs simples et tranquilles. A part le grand amour (mais elle ne s’en rend pas compte), Jeanne ne demande rien d’extravagant, et pourtant sa vie ne semble être qu’une suite de déconvenues. Elle se marie vite (trop vite, le lecteur, surtout celui d’aujourd’hui, le sent bien), et une fois cela fait, il semble qu’il n’y ait plus rien à attendre de la vie : la seule décision importante, le seul véritable choix qu’elle devait faire est fait, il n’y a plus qu’à laisser le reste se dérouler, pour le meilleur ou pour le pire. Et pour Jeanne, ce sera plus souvent le pire, car elle n’ira finalement que de déceptions en déceptions, voyant ses espoirs et ses rêves s’évanouir un à un, et ses illusions s’envoler les unes après les autres.
Je m’attendais à un roman qui serait représentatif de ce qu’est la vie d’une femme de la petite aristocratie ou de la bourgeoisie provinciale cossue du XIXème siècle, mais Jeanne n’est pas tout à fait une femme comme les autres. Maupassant choisit de faire de son héroïne une femme trop pure, trop pétrie d’idéaux, une femme finalement incapable des compromissions de son temps, et par là incapable de s’insérer dans la société, une femme qui ne peut qu’être déçue par la trivialité des choses et par les petits accommodements qui permettent aux autres de vivre avec leur conscience et avec leurs semblables. Cela m’a peut-être un peu dérangée parce que le personnage de Jeanne en ressort moins crédible, elle est cette figure que la vie abîme et que le bonheur fuit, parce qu’elle n’est pas adaptée à ce qui l’entoure. Et cela donne un ton triste, voire mélancolique, à ce court roman. Il est sous-titré (d’un sous-titre qui s’est un peu perdu et que je ne connaissais pas avant de faire quelques recherches sur ce livre) « L’humble vérité ». La vérité de ce qu’est la vie pour de vrai, et je ne suis pas sûre que c’est le mot « humble » que j’aurais choisi, plutôt quelque chose autour de la notion de déception, je crois.
Et au cours de cette lecture, deux comparaisons se sont imposées. La première avec Madame Bovary. J’ai d’ailleurs tendance à confondre Maupassant et Flaubert, nos deux écrivains normands, et il est tentant de rapprocher Jeanne de Lamare d’Emma Bovary, son aînée de 26 ans (en terme d’année de publication). Toutes deux sont des jeunes femmes au seuil de leur vie d’adulte, pleines d’espérance et avide de ce qu’elles se pensent en droit d’attendre de la vie. Toutes deux, par des chemins différents, ne rencontreront que déceptions et espoirs déçus. Des parcours différents, deux visions de la même réalité. J’ai un petit faible pour Flaubert plutôt que pour Maupassant que je trouve toujours très froid et distant, très moqueur vis-à-vis de ses personnages, ce qui m’a fait ressentir d’autant plus une certaine pitié apitoyée pour cette femme complètement inadaptée aux réalités quotidiennes, ne vivant que de la déception de ses rêves trop tôt enfuis.
La deuxième comparaison qui m’est venue à l’esprit est d’ailleurs avec le roman suivant de Maupassant, Bel-Ami, où là, ce mordant de Maupassant va comme un gant à l’arriviste qu’est Georges Duroy, qui à la différence de Jeanne sait on ne peut mieux utiliser les codes de la société pour s’y faire la place qu’il estime être sienne. Deux personnages que tout oppose, un grand écart social, qui peut-être met encore plus en relief la tristesse et la vacuité de la vie de Jeanne.
En conclusion, Maupassant n’est certes pas mon auteur préféré, et cette lecture m’a parfois fait grincer des dents, mais je suis contente d’avoir lu ce roman qui manquait à ma culture générale. Il m’a même donné envie, pourquoi pas, de relire Bel-Ami (lu dans mes années adolescentes, cela date…).

109raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 22, 2022, 10:19 am

Tiens, tiens… Un fait intéressant que je viens de noter, une coïncidence qui n’est très probablement pas fortuite. Je lis que le personnage de Jeanne est inspiré de la mère de l’auteur (la voyait-il aussi pure, naïve et sans compromission avec la morale qu’il a dépeint Jeanne ?) et du personnage d’Emma Bovary (ma comparaison entre Une Vie et Madame Bovary n’est donc pas hors de propos).
Et l’on sait qu’Emma Bovary est elle-même inspirée d’un fait divers réel, le suicide d’une femme à Ry en 1840. Cette femme s’appelait Delphine Delamare. Et Jeanne, dans Une Vie, devient par son mariage Jeanne de Lamare.

110raton-liseur
Dez. 22, 2022, 11:02 am

113. 78. (-) Dernière Manche de Catherine Dabadie
Titre en anglais : non traduit



La dernière manche, c’est bien sûr la fin d’une compétition, celle qui décide si l’on est du côté des vainqueurs ou des vaincus. La Manche, c’est aussi le dernier obstacle avant de pouvoir atteindre l’Angleterre, un pays dans lequel Hazrat, jeune migrant clandestin venu d’Afghanistan, et Manoé, adolescent en manque de repère vivant avec son père marin pêcheur à Calais, veulent se rendre, chacun pour des raisons bien différentes. Ce qui commence comme une confrontation devient vite une amitié improbable, principalement fondée sur la nécessité de s’entraider, puis par une découverte de l’autre et un respect qui s’installe petit à petit.
Avec cette histoire écrite pour des ados de l’âge de Manoé (4ème-3ème, on va dire), Catherine Dabadie réussit un très bon roman. Il y a du rythme, à aucun moment on ne s’ennuie, il y a de quoi faire réfléchir (sur les choix que l’on fait, les chemins que l’on choisit de prendre et ceux qu’on nous force à prendre, les opportunités que l’on a ou que l’on n’a pas) mais le ton n’est jamais démonstratif et encore moins lénifiant, chacun se fera sa propre opinion et réfléchira à son rythme. Il y a aussi beaucoup de réalisme, avec des personnages qui ont tous leur complexité, autant les adultes que les enfants.
Il m’est difficile d’en dire plus sans en dévoiler trop, car il est bon de se laisser entraîner par le même enchaînement des événements que Manoé, qui est le narrateur de cette histoire. Mais il faut que je dise que ce livre est probablement un des meilleurs romans pour ados que j’ai lus depuis un bout de temps. Je n’en lis certes pas assez pour me considérer à la pointe de ce qui s’écrit actuellement pour ce public, mais celui-là m’a vraiment convaincue et je ne suis pas étonnée qu’il soit publié par les éditions Actes Sud Junior, qui sortent régulièrement de petites merveilles pour lecteurs juniors (et moins junior car je prends aussi beaucoup de plaisir à les lire même si je ne rentre plus dans cette catégorie).
Les difficultés de la jungle de Calais ne font plus guère la une des journaux en ce moment, nous avons décrété que nous avons d’autres chats à fouetter, plus importants parce qu’ayant un impact plus direct sur nos vies personnelles, mais les naufrages dans la Manche (ou en Méditerranée) sont toujours une réalité, que l’on en parle ou pas, tout comme le sont les contrôles et les refoulements à la frontière. Une bonne occasion, ce livre, de faire réfléchir les jeunes sur un sujet qui n’est pas prêt de se tarir, celui de l’immigration et de l’immigration clandestine. Un livre à mettre entre toutes les mains, à condition d’accepter que les jeunes lecteurs posent des questions dérangeantes après l’avoir lu. Des questions de morale et et des questions de politique, des questions de citoyens en devenir.

Un grand merci aux éditions Actes Sud Junior de m’avoir permis de découvrir ce livre très réussi, via netgalley.

111raton-liseur
Dez. 22, 2022, 1:03 pm

114. 79. (-) Un Cœur simple de Gustave Flaubert
Titre en anglais : A Simple Heart



Dois-je l’avouer, j’ai tendance à confondre Maupassant et Flaubert. En commençant la lecture d’Une Vie de Maupassant il y a quelques temps pour accompagner P’tit Raton dans ses lectures scolaires, je pensais lire le récit de la vie d’une servante, avec la fameuse scène du perroquet, et tout et tout. Mais j’avais confondu… Un peu vexée, j’ai fini le livre de Maupassant et je me suis dit qu’il fallait pour compenser que je lise celui-là aussi. Ce que j’ai fait. Enfin, c’est plus une relecture qu’une lecture puisque je l’avais lu avec les oreilles dans une version abrégée mise en voix par Marie-Christine Barrault, et il se pourrait même que je l’ai lu avant cela, mais je n’en suis pas tout à fait sûre.
En tout cas, cette lecture avait un air de déjà vu, même si les détails m’avaient échappé. Elle est d’une immense tristesse, une tristesse tranquille, celle d’une vie morne et sans espoir, celle de Félicité, l’ironiquement nommée, la bonne de Mme Aubain, que la vie a malmenée mais qui demeure pourtant pleine d’un dévouement simple et d’une droiture sans égal. Félicité est une femme simple comme son cœur, et ce qui lui confère un caractère d’héroïne tragique, c’est qu’elle n’aspire à rien, elle vit sa vie comme elle est, sans demander plus, sans rien demander, même. Elle prend tout comme cela vient, et ce tout ne sera qu’épreuves ou déceptions, mais jamais Félicité ne se plaindra, jamais elle ne se dira que l’herbe est plus verte dans le champ du voisin. Elle continuera sa vie, effacée et efficace, trouvant son bonheur dans une abnégation totale et une fidélité sans faille.
Gustave Flaubert décrit cette Félicité, cet archétype de femme qui n’a probablement jamais existé, avec beaucoup de tendresse et de délicatesse. Malgré ses attachements excessifs, ses naïvetés, sa dévotion un peu mystique et franchement hérétique, Flaubert ne se moque jamais, il ne s’apitoie pas non plus. Il dit les choses et en les disant dans leur simplicité, leur nudité, il donne par procuration ses lettres de noblesse à Félicité, il donne un sens à une vie qui n’en a peut-être pas eu. Flaubert voulait écrire un livre où il ne se passe rien, il y réussit ici, en transformant ce rien en quelque chose qui remue le cœur.

112raton-liseur
Dez. 22, 2022, 1:10 pm

November recap
A skippable post, mainly for personal reference

At last, I have finished writing and posting my November reviews, so it’s time for a little recap.
November has been a strange reading month, with most books being unplanned and a frenzy of classics, one because of the Geek who love the classics read along for this quarter, the others because P’tit Raton had some assigned reading to do in class, and I decided to accompany him in case he would like to discuss the books (which he did not, but that’s another story…), but also just because I was in the mood for it.
I had some nice reads as well: Axiomatique by Greg Egan, an unexpected read and unexpected like, La Mort d’Ivan Illitch by Tolstoy as well, and to finish up the month, a teen book, Dernière Manche by Catherien Dabadie which, I felt, was great, maybe the best teen book I’ve read this year.
Now the stats...

The degrowth goal: Read more owned books than bought.
This month, I have bought no physical new books, and no ebook (but, hum…, 7 used books...). In the same time, I have read 5 owned physical books (including three bough this year, including one bought by M’sieur Raton and one bought used this month: those two books are therefore not included in my buying stats but included in my read stats, who said I was cheating?) and 0 bought ebook. So I’m positive (thanks to skewed rules?).
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have bought 29 physical new books and 1 ebook, while I have read 43 owned physical books and 2 bought ebooks.

The serene sobriety goal: Read an average of 4 to 6 books per month, no more.
9 proper books read this month (even if a few are on the limit to qualify as proper books as they are quite thin). I am above my goal by large, and there is one month left in the year...
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 79 proper books, while my annual total target is a maximum of 72 books.

The open-ended goals
Read global and diverse (i.e. books outside of France, UK and US).
Out of my 9 proper books for this month, 4 is French (one teen book and three classics), 2 are from the US. The 3 others are from authors from Australia, Philippines and Russia. Not a diverse month, although it might well be the first book from the Philippines that I read.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 28 books from French authors, 6 from UK authors and 7 from a US author. 38 books are from authors that are neither from France, UK or the US.

Read classics and forgotten classics, both European and non-European.
Lots of classics this month, mainly from France (Voltaire, Maupassant and Flaubert), plus one from the US, The Wizard of Oz at last (I bought it more than a decade ago in a bookshop in New Delhi I think I remember, and it’s been two years I want to read it before watching the film on Christmas vacations. I will allow myself to do so this year, if I manage to convince the Raton teens to watch a black and white film…) and one form Russia, La Mort d'Ivan Illitch/The Death of Ivan Illytch. So I have read 5 classics in total this month, out of the 9 proper books I’ve read during this period, and an almost 50 % increase in my annual stats !
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I read 16 classics.

Read at least one book for each of my personal challenges.
Nothing new.
Cumulative totals: Unchanged. Since the beginning of the year, I have read 0 book for my Emile Zola personal challenge and 1 book for my Luis Sepúlveda personal challenge.

Read at least two books with more than 400 pages.
I have read lost of books this month, so most of them are pretty short. I still have read one book over 400 pages, Axiomatique by Greg Egan.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I have read 4 books with more than 400 pages.

Read at least one book directly in English.
I have read The Wizard of Oz, which was unplanned, but it caught my eye and was just what I was needing/wanting to read at the beginning of the month.
Cumulative totals: Since the beginning of the year, I read 1 book in English.

113raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 23, 2022, 3:56 am

It’s a bit odd to post a monthly planning for a month that is almost over, but hey, nevermind, here it is. At the time of publishing I have already read all books that I had included in this plan, but I have not touched the subsidiary list, so how my overall reading month will look like.

~~~~~~~~ 🦝 ~ December ~ 🦝 ~~~~~~~~

Again, December will be a month with unrealistic plans. It’s the last month of the year, with a few reading goals not achieved yet, plus the Asia book challenge, plus a few press service books awaiting to be read, the graphic books prize I participate to… And because it is December, I know that I will soon start reading comfort books. It is not a tradition, or something intentional, but this is something I noticed over the past few years : I tend to read more graphic books and softer books around the holiday period. In order to get ready, I even made a reservation for such a book at the library (so I guess it is becoming a personal tradition?).
So without further ado, here is the plan for this month:

December reading plans:
(Asian book challenge - Writers from the Asian diaspora) One Amazing Thing de Chitra Banerjee Divakaruni
(netgalley) Enfin libre : Grandir quand tout s'écroule de Lea Ypi, traduit de l'anglais (Albanie) par Emmanuelle Aronson et Philippe Aronson
(netgalley) Abondance de Jakob Guanzon, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Charles Bonnot
(masse critique Babelio) Sables noirs d'Hervé Giraud (on going at the beginning of the month)
(comfort book borrowed from the library) Ce genre de petites choses de Claire Keegan, traduit de l’anglais (Irlande) par Jacqueline Odin

I won’t be totally unrealistic, so I’m including in the subsidiary list the books for my unmet annual goals, as well as two Asian books I really would like to read before the end of the year (and one or two of them might be good options for my holiday season comfort books, so there is a chance I finally read them...):
(Les Rougon-Macquart) (relecture) La Curée d’Emile Zola
(Victorian Tavern Q1 read along) David Copperfield de Charles Dickens, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Paul Lorain
(Asian book challenge - Writers from Korea) Voler! de Kim Jaeyeon, traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel
(Asian book challenge - Writers from Indo-China) La Fin du chant de Galsan Tschinag, traduit de l’allemand (Mongolie) par Dominique Petit et Françoise Toraille

Note: This plan does not include the graphic stories, as I will read them over the coming four or five months, depending on the availability at the library.

114raton-liseur
Dez. 22, 2022, 1:18 pm

115. 80. (-) Sables noirs d’Hervé Giraud
Titre en anglais : non traduit



Y a-t-il quelque chose que je n’ai pas compris ? Ce livre, avec un tel synopsis, avait tout pour me plaire. Un roman pour ado engagé, parlant de terrorisme, cela me paraissait vraiment intéressant. Pourtant, je n’ai pas accroché, et c’est presqu’un euphémisme que de dire cela.
D’abord sur la forme. C’est un livre dans lequel, finalement, il ne se passe pas grand-chose. L’auteur passe plus de temps à décrire les choses, à dérouler les pensées et les raisonnements de ses personnages (ou plutôt de son personnage principal, Lilu) qu’à les faire vivre. Je ne suis pas certaine que cette plume discursive soit le meilleur moyen d’attirer les jeunes lecteurs de l’âge de Lilu (14 ans nous dit-on) et de leur donner envie de poursuivre leur lecture.
Ensuite, et c’est le plus important, sur le fond ensuite. Une première chose, j’ai eu beaucoup de mal avec certaines incohérences du bouquin (Lilu connaît son âge, bien qu’il ne connaisse pas ses parents ; il semble savoir lire le français qu’il n’a parlé que pendant les 4 premières années de sa vie ; il a des souvenirs très précis d’événements passés quand il était très petit, et j’en passe…). Lorsqu’on s’adresse à des lecteurs d’une quinzaine d’années, il me semble que la vraisemblance est nécessaire si l’on veut donner du poids à son histoire : il y a assez de coïncidences et de deus ex machina dans ce bouquin, ce n’est pas la peine d’en ajouter.
Et quelque chose de plus important, j’ai eu du mal à voir où ce bouquin voulait en venir. Je suppose que c’est un appel à la paix, une façon de dire que les violences et les guerres, quelles qu’elles soient, ne sont jamais légitimes et ne devraient jamais exister. Mais si le discours des militaires français au Sahel est un ramassis de bêtises et a des relents de racisme et de colonialisme, le discours des djihadistes est un peu plus subtil, du moins dans ses prémisses, avec un rejet de la société de consommation, une interrogation légitime sur la façon dont le monde tourne, des choses dans lesquelles beaucoup peuvent se retrouver. Les conclusions que les djihadistes sahéliens en tirent sont par contre tout à fait condamnables et erronées, mais je m’interroge sur la façon de présenter ces deux discours, dont l’un est facile à rejeter en bloc (et alors que c’est un peu simple de peindre les militaires français dans leur ensemble comme racistes et nostalgiques de la colonisation) et dont l’autre a des fondements intéressants et dont il peut être plus difficile d’identifier là où il dérape.
C’est donc un livre qui m’a mise très mal à l’aise, avec son message peu clair et sa façon assez insidieuse de présenter les différents discours et points de vue. Il y avait matière à faire un bouquin intéressant, avec un sujet d’actualité fort et une interrogation sur l’identité et la culture, avec ce Lilu, enfant de parents français (qui l’ont adopté, même si on se demande pourquoi cela est mentionné, car il n’est pas exploité dans l’intrigue ni dans la réflexion, juste une couche supplémentaire de complexité jetée là un peu au hasard), élevé par des Touaregs, ballotté entre deux cultures et devant trouver par lui-même sa place dans l’une ou dans l’autre, la bonne distance par rapport à son histoire et à son milieu. Des éléments intéressants, donc, mais traités d’une façon qui m’a beaucoup dérangée. Sachant que ce livre était sélectionné pour les pépites du Salon du Livre Jeunesse de Montreuil cette année (mais heureusement il n’a pas gagné), je me dis qu’il y a quelque chose que je n’ai pas dû comprendre, mais pour moi, ce livre ne sera pas au nombre des lectures que je recommanderai aux jeunes lecteurs de mon entourage.

Merci aux éditions Thierry Magnier de m’avoir permis de découvrir ce livre dans le cadre de la masse critique de Babelio. Je suis désolée de cette note de lecture qui peut paraître à charge, j’aurais aimé aimer ce livre, mais je ne peux que donner mon opinion honnête et entière, en espérant qu’elle soit prise pour ce qu’elle est, a savoir une opinion, celle d’une simple lectrice (même si elle ne mâche pas ses mots et peut avoir la dent dure), qui reconnaît le difficile et inestimable travail des auteurs et des éditeurs qui permettent des expressions variées et diversifiées, ce dont nous avons tous un immense besoin.

115labfs39
Dez. 24, 2022, 10:56 am

>109 raton-liseur: I love the background info

>113 raton-liseur: Can't wait for the Galsan Tschinag review!

116PaulCranswick
Dez. 26, 2022, 2:11 am



LT makes the world smaller and better. Have a good holiday.

117raton-liseur
Dez. 27, 2022, 5:27 am

>115 labfs39: I am behind on my reviews, so it will have to wait a bit, but I finished La Fin du chant yesterday, and it was a great read. I hope it will be translated in English, I think you would like it.

>116 PaulCranswick: Thanks Paul: thanks for stopping by, and thanks for your greetings. I hope you enjoy the holiday season too!
And yes, LT is wonderful, maybe it makes the world more readable as well?

118raton-liseur
Dez. 27, 2022, 10:52 am

116. -. (-) Et à la fin, ils meurent : la sale vérité sur les contes de fées de Lou Lubie
Titre en anglais : non traduit



Une drôle de BD documentaire, sur l’histoire des contes. A partir de plusieurs contes, du plus classique au plus obscur, l’autrice propose une balade originale et érudite dans le monde des histoires qui, pour beaucoup, ont bercé notre enfance. Il y a tout : de l’histoire (Cendrillon viendrait de Chine et ferait la promotion de la mode naissante des pieds bandés), un peu de psychanalyse (avec les différentes interprétations du Petit Chaperon rouge en particulier), des comparaisons de versions (entre les frères Grimm et Perrault, bien sûr, mais pas seulement), et bien sûr, une tentative de définition.
Cela donne une bd où on ne s’ennuie pas, le rythme est soutenu, le propos varié, et c’est une façon sympathique de faire le point sur les contes, un sujet en vogue à un moment où l’on se pose des questions sur l’opportunité de continuer à raconter ces histoires à nos enfants, les messages véhiculés semblant peu en accord avec les évolutions actuelles de la société. Mais c’est sans compter sur le fait que les contes, issus de la tradition orale, sont des objets mouvants. La conclusion du livre est un peu faible par rapport au reste de l’ouvrage, hélas, mais on peut faire évoluer ces histoires pour qu’elles reflètent mieux notre époque, on peut mettre en avant des contes peu connus qui introduiraient un peu de diversité, et surtout, on peut arrête de simplifier les choses et de croire que les contes sont immuables et que c’est Disney qui en a fixé la forme définitive.
Un livre qui se lit avec jubilation, qui ne dit rien de nouveau mais a le mérite de rassembler beaucoup de matériau dans uns forme compacte et accessible, et un livre qui peut nourrir une réflexion argumentée sur ces histoires qui ont bercé tant de générations et qui continueront à le faire, si l’on sait y mettre un peu d’intelligence.

119raton-liseur
Dez. 27, 2022, 11:13 am

117. -. (-) Chaussette de Loïc Clément (scénario) et Anne Montel (dessin)
Titre en anglais : non traduit



Après avoir emprunté cette bd à la bibliothèque, juste parce que la couverture était jolie, je me suis aperçue que j’avais déjà lu plus tôt cette année une bd du même duo, Les Jours sucrés. Et je crois que je pourrais copier la note de lecture que j’avais faite à ce moment-là. Encore une fois, c’est une bd gentillette, toute simple et toute mignonne. Cette fois, le sujet est plus sombre, puisqu’il est question de solitude, vue par les yeux de Josette, prénom que notre jeune narrateur n’arrive pas à prononcer et qui devient donc « Chaussette ». C’est assez triste, mais d’une jolie façon, un instant de douceur un peu amère, à prendre pour ce qu’il est.

120labfs39
Dez. 27, 2022, 11:38 am

>118 raton-liseur: Interesting that she chose to write this history as a graphic story.

121raton-liseur
Dez. 27, 2022, 12:04 pm

>120 labfs39: Well, I think it makes it more accessible. A lot of readers (including myself) would not read an essay about tales, their history and interpretations, but a graphic story, well, why not!
This type of non-fiction graphic books seems to be a (small) trend recently. I can think about L'esprit critique (critical thinking) that I read last year, and another one, L'Odysée évolutive (about the evolution theory and its more recent developments) that M'sieur Raton got for Christmas (he had put it on his letter to Santa Claus).
I feel it's a good way to popularise science and ideas. At least, it works for me!

122raton-liseur
Bearbeitet: Dez. 27, 2022, 12:07 pm

118. 81. (-) Ce genre de petites choses de Claire Keegan, traduit de l’anglais (Irlande) par Jacqueline Odin
Titre original : Small Things Like These



L’aube ne pointait pas encore et Furlong regarda au-dessous de lui la ville éclairée et son image d’égale à égale dans le miroir de la rivière sombre, brillante. Tant de choses avaient une façon de paraître plus belles quand elles étaient un peu à distance. Il ne savait dire ce qu’il préférait : la vue de la ville et son reflet dans l’eau.
(p. 63, Chapitre 5).

J’ai coutume, pendant la période de Noël, de faire moi aussi une trêve, et de lire des livres plus tendres que d’habitude. Suite à plusieurs avis élogieux sur ce titre, je me suis dit que c’était le candidat parfait pour cette année, d’autant que l’histoire se passe à Noël ! Pourtant, je n’ai pas résisté et, à peine rentrée de la bibliothèque où je l’ai emprunté, je me suis mise à la lecture, début décembre, donc, trop tôt pour ma trêve de Noël à moi…
Et c’est effectivement un livre gentil, avec de belles descriptions de la ville et de la neige, et un sujet grave, celui des Magdalen laundries en Irlande. Une réflexion sur la famille et les normes sociales, écrite d’une plume très douce, qui effleure le sujet et dit bien peu. Ce n’est pas que je n’ai pas aimé, mais c’est une écriture trop délicate et trop dans la suggestion pour que je puisse dire que j’ai vraiment aimé cette histoire. Et la façon dont Claire Keegan finit cette histoire fait plus penser à une longue nouvelle qu’à un roman. Ce ne fut pas une lecture désagréable, mais ce ne sera pas non plus un livre qui me marquera.

123raton-liseur
Dez. 27, 2022, 12:36 pm

119. -. (-) Méridien d’Arnaud Le Gouëfflec (scénario) et Briac (dessin)
Titre en anglais : non traduit



La couverture de ce roman graphique est étrange. Un trait acéré, des couleurs qui jurent les unes par rapport aux autres… A la fois pas très engageant et suffisamment intriguant pour qu’on ait envie de le lire séance tenante. Je ne savais pas à quoi m’attendre puisque je n’avais pas lu le résumé, mais j’aurais dû m’en douter… J’ai lu il y a quelques années le livre de Florence Trystram cité dans la bibliographie, Le Procès des étoiles, qui décrit l’expédition de quatre hommes de science en Amérique du Sud pour mesurer la longueur du méridien à l’Equateur, et la couverture de cette bd représente probablement le plus célèbre des gentilshommes ayant participé à cette expédition, La Condamine.
Le livre parle bien sûr de l’expédition, mais bien peu du côté scientifique (je suis contente d’avoir lu le livre de Florence Trystram pour comprendre un peu mieux le contexte). Ce qui intéresse les auteurs ici, ce sont les relations entre les scientifiques, leur comportement dans ces pays étrangers et étranges, ainsi que leur relation à la science et leur motivation pour entreprendre ce voyage.
Pas de thèse facilement identifiable ici, et encore moins « résumable » dans le cadre d’une note de lecture, non, cette bande dessinée est toute d’atmosphère. J’ai d’ailleurs lu une autre œuvre graphique de Briac, l’année dernière je crois, Armen (dont il est l’auteur du scénario et des dessins cette fois), et il y a très nettement une parenté entre les deux livres. Le choix des couleurs n’est pas le même, mais le trait et la technique graphique sont proches, et dans les deux cas, et il s’en dégage une impression de malaise, d’atmosphère oppressante. La couverture semble à la fois suinter l’humidité malsaine de la forêt tropicale et nous crier à quel point cet homme, peinturluré comme un acteur de théâtre et prenant la pose, est déplacé dans ce contexte. La comparaison avec l’acteur de théâtre n’est d’ailleurs pas fortuite, car l’on s’aperçoit rapidement que La Condamine n’est pas vraiment là pour la science, mais plus pour espérer se faire un nom et passer à la postérité.
Une bd à découvrir, qui dit, je crois, la vanité de la science et de la mise en équation du monde, à moins que ce soit la vanité des hommes et leur propension à se croire maîtres de tout. Avec son dessin anguleux et dérangeant, sa narration à plusieurs voix et l’opposition entre deux figures de scientifiques que sont La Condamine et Jussieu (Joseph, pas celui qui a donné son nom à l’université, celui qu’on a oublié malgré ses découvertes), c’est un livre qui offre plusieurs angles de lecture et qui distille une sensation d’inconfort en même temps qu’il fait réfléchir. Une belle réussite.

124raton-liseur
Dez. 27, 2022, 12:55 pm

120. -. (-) Walk me to the corner d’Anneli Furmark , traduit suédois (Suède) par Florence Sisak
Titre original : Gå med mig till hörnet
Titre en anglais : Walk me to the corner



C’est étrange, j’ai lu une bd sur un suje très proche en début d’année, Soixante printemps en hiver, est-ce un nouveau genre qui émerge ? Celui des histoires de femmes qui s’émancipent de leur couple à 50 ou 60 ans passés et qui découvrent par la même occasion leur homosexualité.
Mais autant j’avais beaucoup aimé le roman graphique d’Aimée de Jongh et Ingrid Chabert, autant ici j’ai été assez déçue. Le fait que le sujet ne m’a paraissait pas nouveau a joué, ce qui est injuste puisque ce livre est paru avant, mais ce n’est pas la seule raison. En effet, ici, la personnage principale, Elise, semble un peu irréaliste. Elle est infidèle à son mari, mais elle l’aime toujours et souhaite donc rester avec lui tout en poursuivant sa liaison, mais quand lui se met à chercher ailleurs, elle se sent blessée, et puis une fois qu’elle se retrouve seule, elle voudrait que son amante la rejoigne... Je sais que les sentiments ne sont pas toujours rationnels, mais Elise donne un peu l’impression d’être très égocentrique et de vouloir le beurre et l’argent du beurre. Cette façon de se comporter ne me l’a pas rendue sympathique et mon plaisir e lecture s’en est ressenti.
Et puis les dessins en noir et blanc ne m’ont pas convaincue non plus. Je n’ai cessé de les comparer aux superbes dessins de Soixante printemps en hiver, à leur tendresse et leur empathie. Ici, rien de tout cela, un trait noir assez grossier, qui n’a pas su me faire ressentir la douceur ou la profondeur des sentiments (la couverture, avec ce visage tout simple qui semble si serein étant plutôt l’exception que la règle). C’est donc une petite déception que ce livre pour moi, et une envie encore plus grande de dire à quel point Soixante printemps en hiver est un superbe roman graphique !

125raton-liseur
Dez. 27, 2022, 1:31 pm

121. 82. (44) One Amazing Thing de Chitra Banerjee Divakaruni
Titre en français : L’histoire la plus incroyable de votre vie ou Une Histoire extraordinaire



J’ai un petit faible pour Chitra Banerjee Divakaruni, c’est vrai. Je dois avoir presque tous ses livres (sauf ceux pour enfants), et je les ai presque tous lus, que ce soient les romans ou les nouvelles. Ils sont plus ou moins réussis, mais j’aime toujours retrouver sa plume, le regard tendre qu’elle porte sur tous ses personnages, quels qu’ils soient, et la façon qu’elle a de décrire les difficultés de l’exil et de la double culture. A cela, il faut ajouter sa propension à décrire les plats indiens qui met toujours l’eau à la bouche, et sa façon de décrire les sentiments ou les émotions avec des images qui font toujours mouche.
One Amazing Thing, traduit en français sous le titre L’histoire la plus incroyable de votre vie, est un roman un peu différent des précédents, puisque c’est la première fois que je vois cette autrice mettre en scène des personnages non indiens. Il y a tout de même un lien avec l’Inde, puisque cette histoire se passe dans la section des visas du consulat indien de San Francisco. A la suite d’un tremblement de terre, neuf personnes qui ne se connaissent pas (à part un couple d’Américains et une grand-mère et sa petite fille, d’origine chinoise) se retrouvent prisonniers dans l’attente des secours. Dans une longue introduction qui ne m’a pas convaincue, Chitra Banerjee Divakaruni décrit comment nos personnages s’organisent pour faire face à la situation, heureusement qu’ils ont un ancien militaire parmi eux, qui connaît les bons gestes et commence à organiser leur survie. Mais l’attente se fait longue et une des prisonnières suggère, pour tromper l’ennui, que chacun raconte une histoire qui lui est arrivé, car tout le monde a une histoire incroyable dans sa vie, n’est-ce pas ?
Commencent alors ces neuf histoires, certaines à la première personne, d’autres racontées par la narratrice, des histoires de lieux et de générations différentes, qui nous donne chacune un aperçu de la personnalité et de l’histoire de ces hommes et de ces femmes qui n’ont pas grand-chose en commun à part le projet de voyager en Inde. Ce sont comme neuf nouvelles, dont certaines se répondent, d’autres non.
Chitra Banerjee Divakaruni s’éloigne ici de son sujet de prédilection, car si certaines histoires sont bien des histoires d’exil (et la première, celle de la grand-mère chinoise, est ma préférée), d’autres sont sur le mal-être des femmes dans les banlieues chics d’Amérique, ou bien sur les guerres que les Etats-Unis ont livrées à droite ou à gauche, et si les histoires sont intéressantes, elles ne sonnent pas aussi juste que ce à quoi cette autrice m’a habituée. J’ai aussi eu l’impression qu’elle avait du mal à se mettre à la place des jeunes d’origine indienne d’aujourd’hui, comme si elle savait d’intinct trouver la voix pour sa génération ou celle de ses parents, mais qu’elle avait du mal à parler pour la génération de ses enfants.
Je ressort donc un peu déçue de cette lecture, en partie parce que quand il s’agit de livres de cette autrice je place la barre assez haut. Elle a essayé de sortir de ses sujets classiques, et à mon avis ce n’est pas aussi réussi que je l’avais espéré. Cela ne me détournera pas de cette autrice, mais pour un lecteur qui ne la connaîtrait pas, je ne conseillerais pas de commencer par ce livre, peut-être plutôt La Maîtresse des épices, son livre le plus connu (et bien meilleur que le film!) ou pourquoi pas ses nouvelles, par exemple avec The Lives of Strangers.

126raton-liseur
Bearbeitet: Jan. 2, 2023, 1:45 pm

122. 83. (-) Enfin libre : Grandir quand tout s’écroule de Lea Ypi, traduit de l’anglais (Albanie) par Emmanuelle Aronson
Titre original : Free : Coming of Age at the End of History



Lea Ypi est aujourd’hui professeur de théorie politique à la London School of Economics, spécialisée notamment dans la théorie marxiste. Une théorie marxiste qu’elle a vécue et qu’elle a vu fonctionner, comme elle nous le raconte dans ce livre, avec sa jeune enfance dans l’Albanie d’Enver Hoxha, puis son adolescence alors que le régime s’effondre et que l’économie de marché se met en place. C’est un témoignage intéressant, d’abord parce qu’il est rare, et ensuite parce qu’elle essaie de nous faire vivre tout cela à hauteur d’enfant qui croit à tout ce qu’on lui dit, puis d’adolescente qui a besoin de se construire.
La première partie, où on la voit tellement convaincue de ce que lui explique sa maîtresse, socialiste et communiste jusqu’au bout des ongles, et ce bien qu’elle soit d’une famille qui a beaucoup perdu avec le socialisme, et qui, si certains croient en la théorie, ne porte pas le régime dans son cœur. Lea Ypi nous livre différentes anecdotes de son enfance, la plus savoureuse étant probablement celle de la cannette de Coca, ou bien peut-être celle des bonbons.
Pour cette petite fille, la chute du régime, c’est aussi la chute de tout ce en quoi elle croyait, la perte de tous ses repères, et l’adaptation est rude, surtout lorsque l’on est une jeune adolescente. Il faut d’abord apprendre à désapprendre, comprendre les mensonges dans lesquels on a vécu (même ceux des parents qui ne pouvaient pas toujours être honnêtes avec leur propre fille), puis apprendre à penser par soi-même.
Même si le livre peut parfois paraître décousu car il égraine les anecdotes ou les instants de vie sans toujours avoir un fil conducteur clair, il est plein de fraîcheur et ne manque pas d’ironie. Lea Ypi regarde avec tendresse et amusement l’enfant et la jeune fille qu’elle a été, essaie de comprendre comment une enfance si particulière l’a modelée et tente de nous faire partager cette réalité qui nous paraît si étrangère quand bien même ce pays et cette époque sont hier et la porte à côté.
Dans sa conclusion, Lea Ypi explore rapidement quelques aspects de sa vie actuelle qui ont été influencés, ou façonnés par cette enfance particulière. En particulier, il est intéressant de voir comment elle aborde la théorie marxiste, après son expérience de première main de ce qui s’est dit un régime en route vers le communisme. Elle a en effet étudié cette théorie pour comprendre l’histoire récente de son pays, en quoi il était socialiste et en quoi il ne l’était pas. Une façon de boucler une boucle qui ne manque pas de sel et qui fait réfléchir.

Merci aux éditions du Seuil de m’avoir permis de découvrir ce livre, via netgalley.

127LolaWalser
Bearbeitet: Dez. 27, 2022, 5:52 pm

Je dirais qu'elle a vécue peut-être une vision très particulière de la "théorie marxiste". Il y on avait et il y on a des autres. Quand même, on ne peut pas la soupçoner de promouvoir aujourd'hui le stalinisme albanien--et elle se définit comme marxiste.

Autre chose qui m'a frappé, elle trouve des bons côtés même dans ce système (qui peu de gauchistes oseraient défendre), en l'opposant aux démocraties libérales. Qui souffrent tout autant des mensonges... et du pire.

128Dilara86
Dez. 28, 2022, 3:08 am

>93 raton-liseur: and >123 raton-liseur: are also going into my wishlist! Thank you for putting them on my radar :-)

129raton-liseur
Jan. 2, 2023, 1:44 pm

>127 LolaWalser: En lisant ton commentaire, je me suis rendue compte que ma note était incomplète, puisqu'effectivement, je voulais conclure sur comment elle se situait en tant qu'adulte par rapport à cette expérience et son positionnement politique. Je viens (partiellement) d'y remédier.
Je ne savais pas que tu avais lu ce livre, j'irai voir la critique que tu en as faite!

>128 Dilara86: Good choices!

130raton-liseur
Jan. 2, 2023, 1:45 pm

I am late with the last book reviews for 2022. I'll write them in the coming days, and then I'll set up my 2023 thread. In the meantime, happy new year to all!

131raton-liseur
Jan. 2, 2023, 3:49 pm

123. 84. (-) Abondance de Jakob Guanzon, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Charles Bonnot
Titre original : Abundance



Abondance, un livre au titre tout en ironie puisque ce roman raconte l’histoire d’un homme tellement désargenté qu’il compte le moindre de ses centimes et qu’il n’a pas assez non seulement pour finir le mois, mais la semaine, et même le jour. On est donc dans l’extrême précarité, dans la pauvreté la plus entière. Et l’histoire de cet homme nous est contée au travers de deux histoire entremêlées : celle de son adolescence et de comment il en est arrivé là, et celle d’une journée, marquée par l’anniversaire de son fils.
Il y a certes quelques longueurs dans le livre et on comprend très vite le message de l’auteur, mais c’est un premier roman et, vues ses qualités, on peut sans difficulté lui passer quelques défauts. Parce que j’ai beaucoup apprécié cette lecture. C’est difficile de dire que j’ai aimé ma lecture, du moins, pas au sens premier du terme. D’abord, le personnage principal, Henry, a tout du looser sans grande volonté. Certes il n’est pas parti avec beaucoup d’atouts dans la vie (mais il en avait quand même un ou deux), et le système s’acharne sur lui, mais c’est difficile parfois de ne pas avoir envie de lui secouer un peu les puces, surtout dans la partie adolescente du roman. Ensuite, l’histoire est très dérangeante. Très d’actualité aussi, car on nous parle de plus en plus de ces gens qui ont du mal à finir le mois, vraiment du mal. Dans la partie actuelle du récit, celle de la journée d’anniversaire d’Henry Junior, ce qui frappe, c’est à quel point la société ne pardonne pas. Oui Henry (le père) a beaucoup trébuché, il a beaucoup fauté. Il a payé pour ses erreurs, mais il n’a pas le droit à une seconde chance. Et ce que décrit cette seconde partie, c’est une lente descente aux enfers, un combat de chaque minute pour survivre. Henry a perdu son logement (un mobil-home qu’il avait aménagé pour qu’il ne soit pas trop miteux, mais dont il ne peut plus payer la location), il doit chaque jour trouver où se laver, lui et son fils, quoi manger quand on n’a qu’un réchaud rudimentaire pour cuisiner, l’argent à mettre dans le pick up pour chercher du travail et amener Junior à l’école.
Cette deuxième partie est la plus difficile à encaisser car on voit la spirale infernale se mettre en place, et on peut à peine blâmer Henry pour cela. On voit ses sentiments pour son fils et tous les efforts qu’il fait, trop souvent en vain. On voit les petites accommodements avec la réalité pour ne pas se voir comme un père au rabais, on voit les calculs et les choix à faire pour essayer de s’en sortir : vaut-il mieux mettre de l’essence dans le pick up ou acheter une recharge pour le téléphone ? faut-il acheter un dîner nourrissant pour ce soir ou un déodorant pour être présentable à un entretien d’embauche ?
Et si cette deuxième partie est la plus difficile et la plus intéressante, Jakob Guanzon, l’auteur, a eu l’intelligence de la mêler à la première partie où le personnage d’Henry est un peu plus monolithique. Ainsi, on compatit au personnage complexe d’aujourd’hui, ce père pathétique et aimant qui se bat pour lui et pour son fils, tout en comprenant d’où il vient et en ayant du mal à trouver des circonstances atténuantes au p’tit con qu’il a été. Cela crée une relation très ambivalente au personnage, ce qui est un des principaux ressorts du récit.
Et bien sûr, à travers ce personnage, on voit ce que sont les laissés-pour-compte d’une société que l’on dit d’abondance mais qui n’est pas d’abondance pour tout le monde. On dit souvent que ça coûte cher d’être pauvre, ici, on nous montre la pauvreté qui est trop pauvre pour le rester, trop pauvre pour se maintenir à flot. Et l’on voit à quel point le système n’aide pas à s’en sortir. On est au Etats-Unis, certes, mais si ce roman se passait chez nous, il ne serait pas différent de beaucoup. La même société d’abondance, les mêmes laissés-pour-compte et les mêmes engrenages.
Un roman que j’ai apprécié lire, car il décrit, me semble-t-il avec justesse et sans être trop démonstratif ou déterministe, une réalité que je n’avais jamais touchée du doigt. Je lis peu de romans urbains ou noirs, peut-être que ces sujets y sont plus représentés, mais pour moi, c’est une nouveauté, et une nouveauté pleine d’intérêt. On ne peut pas aimer ce roman, car il est comme un coup de poing qui coupe la respiration, mais c’est une lecture dérangeante qui mérite d’être faite, pour une histoire et des personnages qui resteront longtemps dans ma mémoire.

Merci aux éditions La croisée de m’avoir permis de découvrir ce livre, via netgalley.

132raton-liseur
Jan. 3, 2023, 2:47 pm

124. 85. (45) La Fin du chant de Galsan Tschinag, traduit de l’allemand (Mongolie) par Dominique Petit et Françoise Toraille
Titre original : Das Ende des Liedes
Titre en anglais : non traduit



En réalité, on sait bien que la nature, toute cette grande vie alentour, est insensible à la souffrance d’une mère animale, au destin d’un poulain et aux efforts vains d’un être humain. (p. 7).

N’était-ce pas le soupir des fleurs qui s’étaient redressées le matin même avec ardeur, s’offrant joyeusement au soleil, et qui attendaient maintenant leur déclin ? N’était-ce pas celui des herbes dont la vie consistait à croître en dépit du bétail, des fraîches nuits de gelée et des orages incessants ? Celui des forêts encore présentes ? Des pierres inertes, apparemment éparpillées au hasard, et pourtant animées en réalité d’une vie exigeante et haute en couleur ? Cette plainte n’émanait-elle pas de tout ce qui vivait ou semblait ne pas vivre, engagé cependant dans une âpre lutte pour l’existence ?
(p. 157-158).

A y regarder d’un peu plus près, c’est peut-être bien le premier roman de Galsan Tschinag que je lis, après ses récits autobiographiques et un recueil de deux longues nouvelles. Et c’est un petit bijou que j’ai découvert sous cette couverture toute verte toute simple.
Nous sommes dans les steppes de l’Altaï, au cœur d’une famille qui a connu des malheurs et des bonheurs aussi. Shumuur est veuf depuis peu, cette histoire est la sienne, mais aussi surtout celle Dombuk sa fille aînée qui chante comme une future chaman, et de Gulundshaa, la belle femme qui aime Shumuuk. C’est une histoire simple, où il ne se passe pas beaucoup de choses, à part une jument qui accepte de nourrir un poulain qui n’est pas le sien (tout un symbole de la famille de Shumuuk), un repas partagé, une yourte déplacée… Une histoire toute simple de la vie ordinaire, avec ses moments de tendresse et aussi ses moments de violence.
Et l’on a l’impression d’être transporté dans un autre monde, ou hors du temps peut-être, dans un ailleurs qui malgré sa dureté et ses habitants taiseux fait rêver. Mais alors, le dernier chapitre, en nous projetant quelques trente ans plus tard pour nous brosser à grands traits le devenir des personnages principaux, nous ramène dans la réalité et donne un relief tout différent à cette lecture.
C’est un livre tout simple avec lequel pourtant on apprend beaucoup sur la vie des Touvas, sur leur histoire récente et sur l’évolution (pour ne pas dire la disparition) de leur civilisation. C’est aussi un livre qui fait beaucoup réfléchir, et qui semble étrange car Galsan Tschinag semble justement assez fataliste quant à cette disparition. Il est parti et semble nous dire qu’il n’est donc plus légitime pour critiquer ce qui se passe sur place, que ce soit ce que font les Touvas ou les Kazakhs qui se sont installés plus récemment. C’est un regard étrange, plein de sagesse et peut-être de renoncement. Un regard et une histoire qui peuvent paraître tristes, mais Galsan Tschinag semble nous inviter à en conserver l’image en nous, sans chercher à la chercher dans la réalité. Ce livre est la fin de plusieurs chants, celui de Dombuk qui finit par amadouer la jument, celui d’un peuple aussi, c’est un livre qui a de nombreux niveaux de lecture, du singulier au général, du réaliste au symbolique. Une lecture qui m’a touchée, plus que je ne m’y attendais, touchée par sa simplicité au premier abord mais aussi par les sentiments complexes qu’elle véhicule. Une très belle œuvre de fiction, qui mérite d’être lue et relue.

133raton-liseur
Jan. 3, 2023, 2:50 pm

125. -. (-) Douce France de Lionel Chouin (dessin) et Simon Rochepeau (scénario)
Titre en anglais : non traduit



J’ai eu la chance de rencontrer le dessinateur de cette bd, Lionel Chouin, il y a quelques semaines et je voulais donc commencer à découvrir son travail, très éclectique, tant par les sujets qu’il aborde (de l’Histoire avec un grand « H » aux Sex Pistols en passant par la fiction) que par son trait, qu’il renouvelle à chaque projet. Avec Douce France, c’est la Seconde Guerre Mondiale et la Résistance qui sont évoquées, mais sous un prisme assez nouveau, celui de la construction, quelques décennies après les événements, d’un Mémorial de la Résistance dans un petit village breton qui a accueilli un maquis de réfractaires au STO.
Un p’tit gars du coin, qui a réussi socialement est responsable du projet. Il s’interroge sur la résistance dans la zone : le rôle Monsieur Raymond, figure locale et haut fonctionnaire, l’attitude de sa propre famille. Et tout cela est mélangé à des préoccupations plus récentes : le chômage et les plans sociaux, les compromissions pour faire avancer sa carrière. C’est une bd sur l’idée de faire des choix, de prendre position, dans les grands événements mais aussi dans les périodes qui peuvent paraître plus calmes.
Et le dessin est en accord avec ce fond. Deux couleurs : des bleus froids et des oranges chauds, qui s’affrontent et se complètent, en cases juxtaposées ou mélangées dans un même dessin. Une façon de montrer que les personnages ne sont jamais ni tout blancs ni tout noirs, faire des choix c’est une chose, faire les bons choix en est une autre…
La bd m’a parue un peu brouillonne, avec un peu trop d’idées, toutes trop peu esquissées pour être vraiment intéressantes ou faire véritablement réfléchir. J’ai mis beaucoup de temps à m’y retrouver et à comprendre où cette bd voulait en venir, et mon sentiment, pour le moins mitigé, est dommage parce qu’il y avait de bonnes choses au départ dans l’idée de cette histoire. Mais en définitive, tout est un peu mis sur le même plan, comme si toutes les compromissions se valaient. Une compromission n’est jamais belle, certes, mais il me semble qu’il y en a qui sont plus lourdes de sens et de conséquences que d’autres.

134raton-liseur
Jan. 3, 2023, 2:51 pm

126. -. (-) Les Portugais d’Olivier Afonso (scénario) et Chico (dessin)
Titre en anglais : non traduit



Olivier Afonso n’est pas un auteur de bd, ou du moins ne l’était pas avant celle-ci, parue au début de l’année 2022. Il a voulu, dans une veine très à la mode en ce moment, raconter son histoire familiale, ou plutôt l’histoire de ses parents, immigrés portugais des années 70. Il ne se passe pas grand-chose dans cette bd, car ses parents ont finalement eu un parcours très classique d’immigrés européens clandestins des Trente Glorieuses. Ne pas chercher d’incroyables péripéties ou d’actes d’héroïsme donc, mais justement cela en fait un témoignage d’une époque, d’une génération, d’une catégorie sociale, et, même si je ne crois pas avoir appris grand chose sur cet aspect d’une période de notre histoire récente dont nous n’avons pas à être fiers, j’ai trouvé l’évocation intéressante pour mettre en lumière des événements que l’on aime habituellement mettre sous le tapis.
Ce n’est donc pas, à mon avis, une grande bd, mais c’est un témoignage tout simple et intéressant qui permet de porter un autre regard sur une période récente de notre histoire et de la construction de notre société que l’on passe trop souvent sous silence.

135LolaWalser
Jan. 3, 2023, 3:00 pm

Bonne année, gentil raton! Ce livre de Galsan Tschinag m'intéresse beaucoup, j'ai aimé quelques CDs du chant caractéristique des Touvas, mais je n'y connais rien de leur culture.

136labfs39
Jan. 3, 2023, 6:31 pm

>132 raton-liseur: Thank you for the tantalizing review of La fin du chant. I am in love with Galsan after reading The Blue Sky and The Gray Earth earlier this year, the only two of his books translated into English. I hope that The White Mountain gets translated so that I can at least finish the trilogy.

137raton-liseur
Jan. 4, 2023, 3:31 am

>136 labfs39: I was thinking about you while writing this review as I think you would really like this book. I've not read any book by Galsan Tschinag for a while, but felt this one could be my favourite (although to appreciate it I think one should read Ciel bleu/The Blue Sky or Le Monde gris/The Gray Earth beforehand).
I hope I'll have time to read the trilogy myself this year, and I hope La fin du chant will get translated at some point in a forseeable future. It's the beginning of a new year, so an adequate time for hoping, right?

138raton-liseur
Bearbeitet: Jan. 4, 2023, 8:53 am

127. -. (-) Tananarive de Mark Eacersall (scénario) et Sylvain Vallée (dessin)
Titre en anglais : Antananarivo



Rien ne m’attirait dans cette bd. La couverture, avec son trait passe-partout et ses personnages croqués de façon un peu moqueuse ne m’attirait pas et me faisait redouter une bd l’humour un peu lourde. Mais je suis consciencieuse, et cette bd étant dans la sélection du prix auquel je participe, je me suis attelée à la tâche. Et grand bien m’en a pris…
Car j’ai trouvé une jolie histoire touchante d’un notaire à la retraite qui se lance dans une enquête généalogique pour retrouver l’héritier de son meilleur ami qui vient de mourir. Dit comme cela, l’histoire n’a rien d’engageant, mais cet ami était un personnage haut en couleur, qui avait toujours une anecdote incroyable à raconter sur tous les endroits de la Terre qu’il avait visités, et ce notaire est un homme terne à l’étroit dans sa vie à qui un peu de nouveauté ne ferait pas de mal. A cette histoire improbable mais à laquelle la candeur dont veut faire preuve l’auteur nous fait croire, s’ajoute un dessin dont le trait est certes dans la veine classique des belles heures de la bd franco-belge, mais là aussi, la composition un peu décalée des cases, le mélange de la réalité et du rêve qui semble aller de soi, tout cela fait souffler sur cette histoire un vent de fraîcheur et de tendresse d’une grande simplicité mais aussi d’une grande crédibilité.
Peut-être en partie parce que je ne m’attendais pas à aimer cette bd, j’ai été cueillie par surprise et je suis complètement rentrée dans cette histoire, qu’importe son côté improbable (je sais, j’ai dit au paragraphe précédent que cette bd était crédible, mais c’est bien là le tour de force : une histoire improbable rendu crédible par le regard plein de tendresse et de douceur dont le scénariste et le dessinateur la parent chacun à leur manière). Ça a été pour moi un instant de lecture d’une grande douceur, comme une couette dans laquelle on peut s’enrouler ou une tisane bien chaude pour le soir d’hiver pendant lequel j’ai lu cette jolie histoire sans prétention.

139raton-liseur
Jan. 4, 2023, 3:32 pm

128. 86. (46) Voler ! de Kim Jaeyeon, illustré par Kim Sehyeon et traduit du coréen (Corée du Sud) par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel
Titre original : non précisé
Titre en anglais : Pe Pe the Duck



C’est ce qu’on appelle un écho, mon petit. En fait, toute notre vie ressemble à un écho. Si tu désires un monde plein d’amour, tu dois d’abord en remplir ton cœur. Le monde contient ce que ton cœur y met.
(p. 28, Chapitre 2).

J’achetais de drôles de livres quand même, quand j’étais étudiante… C’est à cette époque que ce livre a rejoint mes étagères, peut-être tout simplement à cause du mignon petit caneton qui en fait la couverture ? Ou parce qu’à cette époque, tout ce qui venait d’Asie m’attirait ? Toujours est-il qu’il m’a fallu une vingtaine d’années et la participation à un défi de lecture sur l’Asie pour enfin le dépoussiérer et le lire.
Ma connaissance de la religion bouddhiste et de philosophie zen étant au mieux lacunaire, je ne crois pas pouvoir faire totalement justice à ce livre, dont probablement un grand nombre de réflexions m’ont échappé. Car ce livre, c’est la quête d’un petit caneton tout mignon qui veut voler. Pilou, c’est le nom de notre héros à deux pattes et deux ailes, habite dans un élevage, mais en voyant passer des oiseaux migrateurs lui vient le désir de voler. Il se met alors en quête de ceux qui pourront lui apprendre ce qu’il ne sait pas encore. Chemin faisant, il rencontrera différents oiseaux (une merlette, une grue, une chouette, un canard aussi, et puis une sterne) qui tous le feront avancer sur la voie de son apprentissage en l’aidant à méditer ou à prendre conscience de la relation qu’il entretient avec ceux qui l’entourent et la nature en particulier.
C’est une belle histoire, avec de beaux aphorismes mais aussi des phrases à méditer. Le lien entre le fait de vouloir réaliser son rêve et la solitude est un sujet récurrent qui m’a particulièrement marquée, comme la notion d’absence de désir et d’attachement que l’on associe au bouddhisme mais qui apparaît ici bien plus complexe que ce que j’en avais perçu jusqu’à présent. Et je le précise d’ailleurs, malgré le statut de l’auteur qui est moine, ce livre est bien sûr teinté de bouddhisme, mais ne nécessite pas que l’on adhère à cette religion pour y trouver matière à réflexion. A aucune moment (à moins que je ne l’aies pas vu) il n’est question de bouddha ou de réincarnation.
Ce petit canard, ce pourrait être chacun d’entre nous, même s’il semble bien seul dans sa quête, alors que la multitude se contente d’une vie sans question, que ce soit dans un élevage ou au bord d’un lac. Le livre invite à se demander quel canard nous sommes, quel sens nous voulons donner à notre vie, si nous sommes capables de chercher notre voie, ou au moins de suivre la voie qu’un autre aura trouvé. Les aquarelles qui émaillent ce livre sont bien mignonnes et rendent cette lecture aussi agréable à l’œil qu’au cerveau. Une longue méditation dont les lecteurs occidentaux ne sont probablement les premiers destinataires, mais que nous avons la chance de pouvoir lire grâce au travail des éditions Philippe Picquier, et c’est une belle lecture pleine d’évasion, de vents frais et de belles réflexions.

140raton-liseur
Jan. 4, 2023, 3:35 pm

129. -. (-) Nettoyage à sec de Joris Mertens
Titre en anglais : non traduit



Un livre aux couleurs sombres, à l’atmosphère sombre et pluvieuse (le titre étant à la fois une référence au travail du personnage principal dans une blanchisserie et une contre-référence au temps pluvieux qui règne pendant tout l’album). On a l’impression que l’histoire est un prétexte pour l’auteur pour pouvoir dessiner Paris, ou Bruxelles, ou une ville-capitale imaginaire, et il ne s’en prive pas. Les cases resserrées autour d’un ou de quelques personnages alternent en effet avec de nombreux paysages urbains en pleine page.
L’histoire est noire, triste et ironique à souhait, digne d’un petit polar qui ne dirait pas son nom, les couleurs sont sombres et saturées, les images chargées, le tout créant un sentiment d’étouffement dans un bel alliage entre la forme et le fond.
Pour ma part, je n’ai pas apprécié autre mesure cette bande dessinée parce que les dessins urbains réalistes ne sont pas forcément ce que je recherche dans ce type de livre, mais les lecteurs qui aiment ce genre d’ambiance sauront l’apprécier à sa juste valeur. M’ni Raton, qui a aussi lu cette bd, en est le parfait exemple. Elle dit même que c’est la meilleure bd qu’elle ait lue pour l’instant dans la sélection pour un petit prix local auquel nous participons ensemble. Et, même si M’ni Raton n’a pas les mêmes goûts que moi, elle a bon goût. A conseiller sans hésiter donc à ceux qui aiment ce genre d’atmosphère.

141Dilara86
Jan. 5, 2023, 1:07 am

>139 raton-liseur: ça me dit ! Le côté Nils Holgersson bouddhiste m'intrigue...

142raton-liseur
Jan. 5, 2023, 5:46 am

>141 Dilara86: Je n'avais pas fait le rapprochement! :) Il manque quand même le petit garçon dans Voler!.
Par contre, je crains qu'il soit épuisé et difficile à trouver. Je ne l'ai même pas trouvé sur le site des éditions Picquier où j'espérais trouver quelques éléments de biographie sur l'auteur... Mais si tu le trouves et le lis, je suis curieuse de voir ce que tu en penseras!

143raton-liseur
Jan. 6, 2023, 12:46 pm

130. -. (-) Les grands cerfs de Gaétan Nocq, d'après le roman de Claudie Hunzinger
Titre en anglais : non traduit



Gaétan Nocq a décidé d’adapter le récit de Claudie Hunzinger, paru en 2019, après l’avoir écoutée lors de son passage dans une émission de France Inter, L’Heure bleue. Ce n’est pas une émission que j’aime particulièrement, et ce que j’avais entendu du bouquin ne m’avait pas particulièrement attirée. J’étais donc partagée au moment d’ouvrir cette bd, entre une certaine prévenance et une réelle attirance due à la très belle couverture. Et finalement, je suis restée partagée pendant toute ma lecture, entre le fond, avec une histoire que j’ai trouvée assez artificielle (en particulier avec une pseudo-enquête qui ne dévoile pas grand-chose de nouveau et une sorte de révélation finale qui tombe plus à plat qu’autre chose…), et la forme, avec de magnifiques dessins aux traits fondus et dans des camaïeux de bleu qui disent plus que les mots la nature froide et neigeuse. Le même trait et le même camaïeu servent à dessiner les personnages, qui en conséquence ne s’incarnent pas (ce qui a peut-être contribué à la distance que j’ai conservée avec l’histoire) et les animaux. Cela donne un dessin qui suggère, sans détail, et pour les paysages et les animaux, cela crée une atmosphère quasi onirique, où tout est suggéré, comme un point de départ pour l’imagination du lecteur.
J’ai aimé ce parti-pris de Gaétan Nocq, cette façon d’adapter un livre sur la nature et ses fragiles beautés en lui offrant un cocon ouaté comme la neige qui stimule l’imagination et la rêverie plutôt que la précision et la rigueur des observations naturalistes. Je ne sais pas dans quelle mesure cela est un parti-pris du dessinateur ou bien si cela reflète fidèlement le ton du livre (je penche cependant un peu plus pour la première hypothèse), mais cela donne une œuvre que j’ai trouvée particulièrement intéressante et agréable à explorer et à regarder. On peut rester immergé dans une double page sans texte ou presque, c’est véritablement une bande dessinée de la contemplation.
On m’aurait enlevé l’histoire, cela ne m’aurait pas embêtée, au contraire même. Je n’ai pas bien compris la façon de vivre de Pamina, ni sa philosophie. Mais les paysages parlent d’eux-mêmes, chaque page, chaque dessin est une ode qui les magnifie, et j’ai passé de merveilleux moments plongées dans ces dessins dont je n’ai finalement émergé qu’à regret à la fin de cette longue et belle lecture.

144raton-liseur
Jan. 6, 2023, 1:33 pm

December recap
A skippable post, mainly for personal reference

I am not that late for my monthly recap post, at least not as late as last month. I am even up-to-date on my reviews as I have not yet finished my first book for 2023, but this is a story for another thread.
December as been fairly busy with 16 reviews, but “only” 7 proper books (above target again…), the other 11 reviews being for graphic books. Three of the “proper books” were for the Asia book challenge (two carry-over from previous months and one fitting the month theme) and three others were press service (two netgalley and one babelio). So there is only one book that was not a (self-imposed) assignment! Sadly, it was not a great book (from my point of view, I know lots of readers liked it much more than I did). So (self-imposed) assignments do not necessarily seem a bad thing! There was one highligh from the Asia bbok challenge, definitely La Fin du chant by Galsan Tschinag and another one from press service, Abondance/Abundance by Jakob Guanzon.
On the graphc stories front, I might have my winning trio for the prize I participate in, but I should wait as I have 4 books left to borrow and read, out of 13. My winning trio for the moment is (in order of reading, I don’t know yet how I will rank them): Méridien by Briac, Tananarive by Mark Eacersall and Sylvain Vallée, and Les grands cerfs by Gaétan Nocq.
Without further ado, here are this month stats…

The degrowth goal: Read more owned books than bought.
This month, I have bought 2 physical new books (ont being for 2023 Q1 Victorian read-along, Feuilles d’herbe/Leaves Of Grass by Walt Whitman, knowing that I almost never read poetry...), and no ebook. In the same time, I have read 3 owned physical books (all three have been waiting on my shelves for quite some time, including one that I bought probably more than 20 years ago...) and 0 bought ebook. So I’m positive!

The serene sobriety goal: Read an average of 4 to 6 books per month, no more.
7 proper books read this month, above my target again, no comment...

The open-ended goals
Read global and diverse (i.e. books outside of France, UK and US).
Out of my 7 proper books for this month, 1 is French (a teen book) and 1 is from the US. The 5 others are from authors from Irlande, India (from an author who migrated to the US), Albania (from an author who migrated to the UK), Mongolia (from an author who migrated to Germany) and from Korea. It seems like a divers month to me, but with a lot of migration included!

Read classics and forgotten classics, both European and non-European.
I had an intensive classics-reading month in November, but nothing to report on that fron this month, maybe an expected swing of the pendulum?

Read at least one book for each of my personal challenges.
Nothing new.

Read at least two books with more than 400 pages.
No doorstop this month: Two books of 366 pages, and then smaller books.

Read at least one book directly in English.
Yep… I read One Amazing Thing by Chitra Banerjee Divakaruni, as planned!

145labfs39
Jan. 6, 2023, 2:22 pm

Congrats on a great year of reading! I can't wait to see what 2023 brings. I will be following with interest.

146raton-liseur
Jan. 7, 2023, 4:27 am

>145 labfs39: Thanks! I'll make a quick annual recap and then start working on setting up my 2023 thread (and catch up with the numerous threads blooming in Club Read 2023!).

147raton-liseur
Jan. 7, 2023, 7:52 am

My annual stats
Another skippable post!

I had a few more-or-less quantitative goals at the beginning of 2022, so it’s time to check how I did against those, and maybe start deciding how I want to proceed for next year.

The degrowth goal: Read more owned books than bought.
I know my rules are a bit skewed, but I was considered it was the best way to make this personal challenge a realistic horizon, and therefore a useful tool to to prevent compulsory buying.
With such rules, this year, I I have bought 31 physical new books and 1 ebook, while I have read 46 owned physical books and 2 bought ebooks.
Closing remarks and way forward: I am good on all fronts, so again, it’s a success. But I start feeling it is a bit too easy, and I feel I am cheating. So I will change the rules next year and compare the books I read against all bought books, be it new or used.

The serene sobriety goal: Read an average of 4 to 6 books per month, no more.
Well, 86 proper books read this year… 14 books above my maximum target, 20 % over-reading, 7,2 books read per month on average… I can put this the way I want, I am off-target here.
Closing remarks and way forward: This quantitative objective was probably not realistic, but I felt it helped me slow down my reading pace (to enjoy more what I was reading), not feel “guilty” when I was reading slowly, and choose more large books. So all in all, I’ve blown this objective, but it had a positive impact on my reading, so I’ll keep it unchanged, and never mind if the conclusion is the same one year from now!

The open-ended goals
Read global and diverse (i.e. books outside of France, UK and US).
This year, out of 86 proper books, I have read 29 books from French authors (34 %), 6 from UK authors (7 %) and 8 from a US author (9 %). 43 books are from authors that are neither from France, UK or the US (exactly 50 %). I’ll make a finer analysis of my wanderings around the world in my “around the world” thread, but I can already say it heavily leans towards Asia, as I have read 21 books for the Asia book challenge, almost half of my non-French/UK/US reads!
Closing remarks and way forward: This is not too bad considering that I have read a good bunch of French classics this year, and as I know my reliance on press services pulls me towards French and anglophone language (mainly US) literature.
For next year, I’ll keep tracking the origin of my reading diversity, and hope to read less than one third of French literature and at least half of non-US foreign literature.

Read classics and forgotten classics, both European and non-European.
I have read 16 classics this year, almost one fifth of my readings, which is, I think, a great achievement, that I might not renew next year!
Closing remarks and way forward: I felt it’s too difficult to decide what is a classic and what is not, so I’ll change this objective and will just track the date of writing, hoping to read at least one third of books pre-20th century.

Read at least one book for each of my personal challenges.
I have not read any Rougon-Macquart this year, which is sad. I absolutely need to do better next year. I have read only one book by Luis Sepúlveda, but I have bought quite a few of them, so I should try to do better next year as well.
Closing remarks and way forward: I won’t change anything, but ought to do better!

Read at least two books with more than 400 pages.
I have read 4 of those books last year, which is great.
Closing remarks and way forward: That’s kind of a silly objective, and I think I am back on track reading large books when I feel in the mood. So, I’ll drop this objective once and for all.

Read at least one book directly in English.
2 books this year, I’m happy with that!
Closing remarks and way forward: Nothing to change here, it’s a great goal and a great way to keep some fluency in English despite not practising on a daily basis.

148raton-liseur
Jan. 7, 2023, 9:37 am

Wrapping up my 2022 reading log
With 86 proper books read and a total of 130 reviews posted, 2022 has been a busy year. I continue a trend of increasing the number of reviews year after year, as I had 90 reviews in 2020 and 109 in 2021. This is partly due to an explosion in the number of graphic stories I have read. I think 2022 was a turning point for that matter, as I now consider graphic stories as an integral part of my reading, and not just a side-reading as it might have been before. I think this year, I fully realised the diversity of format and themes that can be found in graphic stories, and that some of those books can engage me, as a reader, as much as a wordy book. And that’s why, starting next year, I will replace my “proper book” category by a “wordy book” one! I’ll keep tracking independently wordy books and graphic books, because I feel they can’t compare and be in the same category, but will give more space and visibility to graphic stories in my 2023 journal.

2022 has also been a year of many commitments, with the Victorian read-along (where my participation has not been visible, but I did read some of the read-along books), but most of all the Asia book challenge.
I have participated 10 months this year (nothing for Iran in April as I did not have books on my shelves, and I skipped China in July despite ambitious plans because I was in my summer holiday reading mode). Within those 10 months, I have read 21 books (including two unfinished). Countries I am familiar with (from a reading point of view!), like India, Japan or Korea, are over-represented in those 21 books (as I did not buy books for the challenge, my reading reflects the past or existing trends of my buying habits), but I managed to paper-visit for the first time two countries: the Philippines and North Korea. This participation also allowed me to read books from my shelves I would not have picked otherwise. Considering all this, plus the fact that I read some great books, I am more than happy to join Paul’s next challenge and to paper-visit Africa in 2023. I have started browsing my shelves, and rediscovered books I did not remember I had (how shameful…)!


My 2022 Asia book challenge shelf

Talking about commitments, I have relied a lot on press service this year, with 25 books from netgalley and 9 books from babelio (10 actually, but there is one for which I did not post the review here because it’s a coffee table book and I feel it does not really fit this reading thread). I was kind of willing to limit myself to two netgalleys max per month, so on average I am doing well, but as a matter of fact, I have a few months with nothing and many with 3 books, even 4. If a few books did not meet my expectations (but not in a higher proportion than books from other sources), I have made some great discoveries thanks to those press services (actually some of my memorable reads for this year are from press service books), so even if it is sometimes a bit heavy on my reading schedule and limits my ability to make some impromptu choices, I’ll continue using those services, trying again to be reasonable when I feel like it.


My 2022 press service shelf

So 2022 was a good reading year, with variety in formats and genre, in places and stories, and I feel ready to start 2023. From what I can see, it should structure itself the same way, but as always, books will decide on the journey, plans can be well thought about and very tight, serendipity is never far, and that’s what makes the journey interesting!

149raton-liseur
Jan. 7, 2023, 1:16 pm

And with these last posts, I think I can officially close this thread.
Further reading will happen in my 2023 reading journal in Club Read 2023. See you there!

150labfs39
Jan. 7, 2023, 7:28 pm

I'm so impressed with your reading, and I love your virtual bookshelves. See you on the next thread.

151raton-liseur
Jan. 8, 2023, 12:51 pm

>150 labfs39: Just some nice musing here and there, that's all. But I must admit I enjoyed myself immensely! See you on the 2023 side!